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Billet de blog 17 janvier 2012

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Un jeu de casino autour de la faillite de la Grece

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Je me suis toujours demandé comment s'y prenaient les spéculateurs pour tirer profit de la dette grecque. J'ai fini par comprendre, et j'aimerais partager ma perception des choses car il m'a fallu un certain temps pour en comprendre le mecanisme.
Je ne m'attarderai pas sur les magouilles du gouvernement grec, je trouve tout simplement curieux qu'on ait pu lire sur le New York Times un article qui s'intitulait « Comment Goldman Sachs a aidé la Grèce à falsifier ses comptes » et que ni G.S.ni les responsables grecs n'en ont été inquiétés. Dans un état de droit, une falsification des comptes implique une sanction, mais apparemment quand il s'agit de G.S. ou de plénipotentiaires grecs cela semble faire partie de la normalité ambiante. Je remarquerai en passant que des responsables  islandais sont actuellement en prison pour avoir provoqué la faillite du pays, ce qui à mes yeux donne un peu plus de crédibilité à l'Islande concernant sa demande de rentrée dans l'euro. Je ne m'attarderai pas non plus sur l'incurie des élus grecs qui, grâce à l'euro et à des taux extrêmement faibles au départ, ont pu endetter le pays de manière astronomique...
Pour entrer dans le vif du sujet, suite à la volonté allemande de réduire la dette grecque en faisant payer les banques, et grâce aussi au ralliement de Sarko à cette idée, une volonté de réduction de 30%, voire maintenant 50%, a fini par rallier l'assentiment des pays européens, sur base d'un accord « volontaire » de la reduction de la dette. Ce dernier point est fondamental, et pas encore atteint. En fait, l'accord devrait etre conclu avant Mars, puisque les Grecs ont besoin d'un refinancement de 14,8 Mrds pour cette date, sans quoi le pays tombe en defaut de paiement.
Sur un total de 355 Mrds, la troika (FMI, BCE et EU) ont acheté plus d'une centaine de Mrds, et environ 200 Mrds sont détenus par les banques, fonds de pension internationaux et, de plus en plus, par des hedge funds, les fonds spéculatifs.
Pourquoi les hedge funds se mettent-ils à acheter de la dette grecque ? Non pas pour sauver la Grèce, mais bien pour provoquer son défaut de paiement.
Comment ? Plus ces fonds auront acheté de dettes grecques, plus ils seront en position de refuser le « hair cut »  (la reduction volontaire de 30 ou 50% proposée par Merkel), ce qui amènera fatalement le defaut de paiement, le « credit event » tant attendu par the International Swaps and Derivatives Association et tous les traders de Londres.
Où serait leur profit ? Et bien tout simplement via les CDS que ces fonds ont acheté massivement et qui leur garantissent un remboursement de 100%, en cas de défaut grec. En d'autres mots, une obligation de valeur nominale 100 euros, achetée 32 euros (prix du marché) à une banque très contente de s'en débarrasser malgré la perte, coutera au total 40 euros au hedge fund si l'on tient compte d'un prix de 8 euros supplementaires pour l'achat d'un CDS. Ce qui revient à dire un profit de 150% d'ici Mars!
Mais d'où viendront les 100 euros garantis par le CDS me demanderez vous ? Tout naturellement du contribuable européen, si pas US. Pourquoi ? Et bien parce que les émetteurs de CDS, à savoir les banques d'investissement américaines, les banques européennes dites universelles et les compagnies d'assurance ne pourront honorer leurs obligations. Exactement comme avec les subprimes. Il est probable que le gouvernement US refusera de payer l'incurie grecque, c'est à peu près certain vu l'endettement des Etats-Unis, reste alors le contribuable européen qui aura le choix entre la peste (se saigner à mort pour payer aux hedges funds les 100% et éviter l'effondrement des banques européennes) et le cholera (l'effondrement des banques  avec le reste de l'économie).
Comment tout cela est-il possible ? Parce que les produits dérivés s'échangent en dehors des bourses régulées, donc en dehors de tout contrôle, et de plus ne sont meme pas visibles par les banques centrales car comptabilisés hors bilan. Les Etats ne se sont jamais donné les moyens de contrôler ce que Warren Buffet a appelé des instruments de destruction massive, et ce sont les contribuables européens qui vont payer le prix de cette incurie. Accessoirement, ca donnera encore plus de pouvoir à ces memes hedge funds qui, le moment venu, auront les moyens de faire leur choix pour racheter à bas prix toutes les entreprises en quasi faillite que les gouvernements aux abois voudront leur vendre.
Pour la petite histoire: avant la crise de 2007, les 20 « meilleurs » hedge fund managers ont totalisé pour plus de 20 Mrds de $ de bénéfices personnels (je ne parle pas du rendement des fonds mais bien de bénéfices individuels). En 2009, une fois que les Etats sont intervenus massivement pour sauver les banques,  les 20 « meilleurs » hedge fund managers ont totalisé 25 Mrds de $ de profits (à titre personnel), dont 4 milliards pour un seul d'entre eux !
C'est pas beau la finance dérégulée ? Et pourtant, je me considère plutot comme un libéral, ce qui ne m'empêche pas d'affirmer la nécessité essentielle d'un Etat de Droit qui brille ici par son absence.

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