En parcourant les commentaires de ce billet, je tombe sur cette vidéo "Entretien avec Étienne Chouard - 3 - le système électif"où Étienne Chouard parle des élections et du tirage au sort :
http ://www.dailymotion.com/video/xhm97w_entretien-avec-etienne-chouard-3-le-systeme-electif_news?start=256
(Désolé, mais je n’arrive pas à copier les liens de dailymotion dans le Blog Mediapart, sans doute parce que je ne suis pas en France).
Et j’aimerais apporter ma pierre à l’édifice que tente de construire Chouard, car si le constat est simple à faire, il me semble que la difficulté à changer de système se heurte à notre façon la plus primitive de fonctionner.
Sur son constat, je suis entièrement d’accord, et j’ai même théorisé sur le sujet en parlant de "préconscient social".
Mais c’est justement à cause de l’existence, dans notre cerveau de ces schémas "préconscients", que le changement préconisé par Chouard est radical : il affecte directement une façon de penser, qui s’est incrustée dans nos gènes, depuis que les mammifères vivent en société. Une évolution qui court sur quelques millions d’années, et peut se constater facilement sur les groupes de chimpanzés, par exemple, au plus près de nous.
Et nous retombons comme toujours sur le miracle grec : les Athéniens l’ont fait pendant deux siècles.
Moi-même, si je donne le fond de ma pensée immédiate, j’éprouve une certaine résistance à ses arguments : comment être sûr que le tirage au sort ne va pas désigner un fieffé coquin au pouvoir ? Ou un imbécile notoire ? La question n'est pas jeune: Quis custodiet ipsos custodes? (merci à LARBI BENBELKACEM, qui vient juste de faire cette citation dans un commentaire sur un billet de JEAN-PAUL BOURGÈS, comme quoi la question se pose à tous les échelons d'une société, fût-elle aussi restreinte que le groupe de blogueurs Mediapart!)
La réponse de Chouard est qu’il ne compte pas sur sa vertu, mais sur l’encadrement de son mandat. Une surveillance par d’autres, eux-mêmes élus par tirage au sort… C’est intéressant. D’ailleurs, nos tribunaux ne fonctionnent-ils pas ainsi ? En dernier ressort, ce sont des citoyens ordinaires qui décident du sort des prévenus.
OK, mettons que ce soit un mécanisme envisageable, toujours est-il que je n’ai pas intériorisé le schéma symbolique qui justifierait ce mécanisme.
Autrement dit, la difficulté à laquelle Chouard est confronté n’est pas d’ordre Imaginaire (on peut assez simplement imaginer la structure d’un tel gouvernement) mais Symbolique. Il manque l’impulsion, le désir, l’attente, l’espérance, la pulsion, bref le mythe fédérateur d’une telle aspiration. Il manque aussi le drame, l’action mythique, le meurtre symbolique ou révolutionnaire qui puisse faire basculer l’ordre ancien pour qu’advienne le nouveau. Et l’on retombe sur Frédéric Lordon : la révolution n’est pas un pique-nique.
PS : j’ai illustré ce billet par la couverture d’un livre édité en son temps dans la collection "Le rayon fantastique", qui berça toute mon adolescence. Et ce titre de Van Vogt, "Le Monde des non-A" qui m’a marqué plus que je ne saurais dire. Le vote de la société non-aristotélicienne qu’il décrit est précisément celle à laquelle aspire Chouard… Toutes les grandes idées sont à l’origine des rêves d’enfants.