Recueil d'écrits poussés pour dénoncer non seulement ce que des financiers de l'Ordre libéral imposent à tout un peuple mais aussi pour établir la chronique de ces "experts" serviles qui, dans les médias, jouent à fond la carte des dominateurs. L'espoir : non seulement des commentateurs de renom ne hurlent pas avec les loups, mais l'activité foisonnante pro-Grèce des réseaux sociaux trouble les tenants de l'ordre établi.

Ne vivons plus comme des esclaves...
Résumons le bras de fer entre la Grèce et l'ex-Troïka (FMI, BCE, CE) : la Grèce doit payer 1,6 milliard d'euros au FMI au 30 juin en échange de quoi elle pourra recevoir un prêt de 7,2 milliards. Pourquoi un arrangement ne peut pas se trouver : par exemple déduire les 1,6 des 7,2 ? Parce qu'il faut absolument faire accepter aux Grecs qu'ils prennent des mesures drastiques dont la réduction du montant des retraites, qui ont déjà été réduites du tiers, y compris pour ceux qui sont déjà en retraite. Comment Syrisa, élu sur un tout autre programme, peut l'accepter ? [19 juin]
Voir mon texte sur mon blog : Faire condamner la Troïka pour la tragédie grecque.
Photo : dans les rues d'Athènes extraite du film de Yannis Youlountas Ne vivons plus comme des esclaves

La Résistance grecque
En Grèce, la résistance a lieu aussi dans des ateliers, des théâtres, des industries occupées, des terrains militaires réquisitionnés et transformés en parcelles de culture, des appartements vides convertis en dispensaires gratuits, en cantines sociales ou en crèches. Ces initiatives se sont développées dans les ruines de l’État social, à mi-chemin de l’autogestion, de l’humanitaire, de la micro-entreprise et des luttes sociales et politiques. Dimitri Alexakis, l'auteur de ce billet bien informé (Grèce : l'invention sous la crise (ressources), sur Mediapart) donne de très nombreux liens de sites d'information (dont plusieurs en français) sur tout ce qui se fait en Grèce pour garder la tête hors de l'eau, non pas pour rester en marge mais dans le cadre d'un véritable projet politique.[19 juin]
Les Gracques, un groupe de réflexion "social-libéral", vient de sortir un texte dans Les Echos qui ose accuser les Grecs de vouloir "braquer les banques". Cette "gauche", car ils se disent de gauche, "gauche moderne" même, conforte partout où elle s'exprime les thèses néo-libérales, sans réelles traces de "social". On compte en son sein : Jean-Pierre Jouyet, Mathilde Lemoine de la banque organisant l'évasion fiscale HSBC, fidèle de "C dans l'air" [17 juin]
L'Appel du 18 juin d'Arnaud Leparmentier
Dans sa chronique du Monde, comme il le fait depuis des mois, Arnaud Leparmentier publie une charge terrible contre les Grecs. Lui qui se pavane dans son bureau avec sa photo au mur qui le représente tout fier aux côtés d'Angela Merkel (vu dans le documentaire Les Gens du Monde) déroule ses articles comme autant d'insultes, d'accusations, de menaces. Aucune circonstance atténuante pour le peuple grec, responsable de tous les péchés du monde, n'ayant fait, selon lui, aucun effort, alors que d'autres articles dans le même journal, écrits par des journalistes qui se sont rendus en Grèce, donnent à voir une tout autre réalité. Dans quelques temps, il faudra que ses phrases à l'emporte-pièce soient rapportées et démontées au regard du bilan de Syrisa. Hier soir, plusieurs milliers de personnes ont manifesté devant le Parlement à Athènes au cri : "Tsipras se bat pour nous. On veut qu'il sache qu'on est avec lui" (et c'est Le Monde qui titre ainsi ce matin !).[18 juin]
Quelques chiffres : La Grèce a une dette publique de 322 milliards d'euros. Enorme ! Au Café du commerce, on nous dit que c'est bien la preuve de l'irresponsabilité des Grecs, qui ont vécu au-dessus de leurs moyens. Certes, c'est une somme élevée. La Grèce compte 11 millions d'habitants. La France a une dette de 2037 Mds€ pour 66 M d'hab. Donc, par rapport au nombre d'habitants, la Grèce a une dette inférieure à celle de la France (en proportion, la France a 100 Mds de dette supplémentaire). Les USA ont une dette publique de 18.000 Mds de dollars soit 16.134 Mds € pour 320 M d'hab. Pour être en proportion de la Grèce, cette dette américaine devrait être de 9367 Mds€. Or elle est presque du double. Et ce sans parler de la dette privée aux USA qui est astronomique et fait courir de graves dangers à l'économie mondiale (60.000 Mds de dollars).[12 juillet]
Les plus pauvres des pauvres...
Dans son intervention auprès de l'Eurogroupe, le 18 juin, Yanis Varoufakis a réclamé un compromis. Il a dit qu'il ne fallait pas "frapper les pauvres sauvagement comme les réformes précédentes l'ont fait" ("does not hit the poor savagely like the previous reforms did"). Il a listé tout ce qui avait été fait déjà : "les salaires ont baissé de 37%, les pensions ont été réduites de 48%, l'emploi public a diminué de 30%". Et cela a provoqué plus de problèmes que de solutions : le PIB a chuté de 27 %, le taux de chômage est monté en flèche à 27%, le travail non déclaré a atteint 34 %, (...), la dette publique a dépassé 180% du PIB. Les jeunes gens bien qualifiés abandonnent la Grèce en masse. La pauvreté, la faim et la privation d'énergie ont enregistré des augmentations habituellement associées à un état en guerre. L'investissement productif s'est évaporé". Il fait tout une liste de propositions d'ajustements réalistes mais pas à l'encontre des plus pauvres comme cela a été fait jusqu'alors sur injonction de l'Europe "poussant ainsi, dit-il, les plus pauvres des pauvres dans la plus grande pauvreté".[19 juin]
Excédent de la zone euro : 250 milliards
Vous lisez bien : selon Reuters, la zone euro dégage un excédent annuel de 250 milliards d'euros (2,5 % du PIB de ladite zone). Et on nous tient en haleine sur 1,6 Mds€ que la Grèce ne parvient pas à payer ? En la menaçant de l'exclure avec les conséquences systémiques que cela aurait inévitablement. Et alors que les décideurs européens se disent prêts à prêter 7,2 Mds, mais à condition que les Grecs se mettent à genoux. Et en notre nom ! [20 juin]
30 000 € par mois non imposés
Gagner plus de 30 000 euros par mois, sans payer d'impôts et faire la morale aux Grecs pour qu'ils payent les leurs c'est de l'indécence pure. En matière d'indécence, elle a de qui tenir: les réseaux sociaux rediffusent actuellement la lettre trouvée chez elle lors d'une perquisition dans laquelle elle exprimait son allégeance totale, de façon servile même, à Nicolas Sarkozy. Mais bien sûr, ce sont deux affaires sans aucun rapport.[20 juin]
Christine Lagarde montrant la faiblesse de ses revenus ?

La stratégie du choc
Dans un article (Les créanciers instaurent la stratégie de la terreur), Martine Orange montre comment les autorités financières européennes, par des déclarations alarmantes, poussent les Grecs à retirer leur argent déposé à la banque. Elle parle de "stratégie du choc", allusion au livre de Naomi Klein. Elle évoque le mépris de Christine Lagarde qui dit vouloir discuter avec des "adultes", alors qu'elle impose des conditions à la Grèce qu'elle n'exige pas de l'Ukraine, et alors même que des études internes du FMI ont reconnu les erreurs commises par cette institution à l'encontre de la Grèce. Et la France, pour se concilier les bonnes grâces des décideurs européens et d'Angela Merkel, qui reste en retrait et n'affirme pas sa solidarité avec le peuple grec ! [21 juin]
Facture salée pour les contribuables ?
En France, les propagandistes vont bon train pour appuyer la stratégie des ultra-libéraux européens, comme ce Eric Dor, directeur d'une "School of Management" (pour en imposer), qui, dans Sud-Ouest du 21 juin, prétend que les Grecs doivent 1035 € à chaque Français ("une facture salée pour les contribuables") si la dette était annulée (par une sortie de la Grèce de l'euro par exemple). Or ce raisonnement fonctionne comme si le budget d'un Etat (qui peut emprunter sur la longue durée) était comparable au budget d'un particulier. Or il n'en est rien, ce qui n'empêche pas un nombre impressionnant de trolls sur Internet de colporter cette vision primaire sur les forums de commentaires. La Tribune, qui ne peut pas être taxée de journal d'extrême gauche, a démonté cette conception d'une dette phénoménale de la Grèce envers la France. Si la dette grecque venait à être annulée, cela constituerait une perte de 400 millions au budget de la France, soit, d'après mes calculs, 1/1000ème du budget. Cela ne signifie pas que les Grecs n'ont pas à se mettre en règle sur un certain nombre de points (propositions que Tsipras fait d'ailleurs), en particulier pour que les classes sociales les plus riches payent réellement des impôts, et que l'impôt, de manière générale, soit collecté normalement dans un Etat de droit, mais cela ne justifie pas que l'on entretienne un climat de rejet à l'encontre du peuple grec, comme le fait ce prétendu "manageur", sans que Sud-Ouest ne le corrige.[21 juin]
Certains devront rendre des comptes...
Je souhaite qu'une fois un accord passé avec la Grèce soit décrit en France comment des propagandistes ont mené campagne contre le peuple grec, pas seulement Arnaud Leparmentier [Le Monde] qui a eu une position de militant ultra-libéral et non de journaliste. Mais il n'est pas le seul : je pense à Jean-Dominique Giuliani, de la Fondation Robert-Schuman, particulièrement violent lors de l'émission de C dans l'air, sur France 5, le 9 juin et à bien d'autres. [24 juin]
Voir Marianne : "Quand "Le Monde" rêve d'un putsch contre Tsipras"

[à suivre]
Ces petits billets ont été régulièrement postés sur mon compte Facebook et aussi sur le compte Facebook du groupe "Nous soutenons le parti Grec SYRIZA". Certains ont été commentés, partagés et recommandés plusieurs centaines de fois.
Je dis en chapeau que les tenants de l'ordre établi sont troublés par la contestation dont ils sont l'objet que ce soit par des commentateurs de renom ou dans les réseaux sociaux très actifs. J'en veux pour preuve, entre autres, la nécessité pour Angela Merkel de faire ovationner au Bundestag le pauvre Wolfgang Schäuble, largement contesté pour son intransigeance, et aussi, plus modestement, le billet de Sylvie Kaufmann dans le Monde du 19/20 juillet qui évoque un "tollé sur les réseaux sociaux" à l'encontre d'Angela Merkel et relève que Twitter, au petit matin du 13 juillet, ne diffusait que : "coup d'État", "crime contre l'humanité", "génocide social", "mise en esclavage", "viol" de la démocratie hellène. "Pourquoi tant de haine ?", se lamente-t-elle.

Documentaire Arte
Billet n°207
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Contact : yves.faucoup.mediapart@sfr.fr
[Le blog Social en question est consacré aux questions sociales et à leur traitement politique et médiatique. Voir présentation dans billet n°100. L’ensemble des billets est consultable en cliquant sur le nom du blog, en titre ou ici : Social en question. Par ailleurs, tous les articles sont recensés, avec sommaires, dans le billet n°200]