Suite du recueil d'écrits poussés pour dénoncer non seulement ce que des financiers de l'Ordre libéral imposent à tout un peuple mais aussi pour établir la chronique de ces "experts" serviles qui, dans les médias, jouent à fond la carte des dominateurs. L'espoir : non seulement des commentateurs de renom ne hurlent pas avec les loups, mais l'activité foisonnante pro-Grèce des réseaux sociaux trouble les tenants de l'ordre établi.

Les manipulateurs contre la Grèce
C dans l'air sur France 5 le 23 juin : JD Giuliani (Fondation Robert-Schuman), qui avait été odieux à l'encontre des Grecs le 9 juin, est ce soir-là un peu calmé. Il reproche cependant à Alexis Tsipras de se rendre à Moscou, pour faire de la provoc, comme s'il ignorait les questions géopolitiques (la Grèce a des liens traditionnels avec la Russie). Il reproche à Georges Papandréou d'avoir, à son arrivée au pouvoir en octobre 2009, accusé son prédécesseur d'avoir trafiqué les chiffres des comptes publics. Cela a affolé les marchés. Il aurait sans doute fallu dissimuler ces malversations commises avec la complicité de Goldmann Sachs, banque à laquelle une partie des dirigeants ont appartenu : Mario Draghi, BCE ; Mario Monti en Italie (avant l'arrivée de Matteo Renzi) ; Lucas Papadémos et Antonis Samaras (avant la victoire d'Alexis Tsipras en Grèce). Bien sûr, M. Giuliani [photo] ne pourra jamais le dire car ces hommes, défenseurs du capitalisme financiarisé, sont de son clan. De la même manière que C dans l'air se garde bien d'indiquer que ce M. Giuliani siège au CA de la Fondation Robert-Schuman aux côtés de... Wolfgang Schäuble, le ministre des finances allemand le plus agressif à l'encontre des Grecs.

LCP ce soir, 25 juin : Sylvie Goulard, députée européenne dans le camp des "libéraux" (soutien donc à la Finance et aux dégâts qu'elle commet) reproche tout de go à Alexis Tsipras de n'avoir pas fait de réforme fiscale et d'être intransigeant au point que les Grecs, s'ils doivent souffrir davantage, ce sera de sa faute.
Comment fait-on pour supporter que des individus dans les médias se permettent de la sorte de manipuler les faits et d'insulter les représentants du peuple grec, démocratiquement élus. Cécile Ducourtieux, qui défend plutôt les positions de Bruxelles, écrivait pourtant dans Le Monde d'aujourd'hui que, s'il y a un "Grexit", on ne pourra pas empêcher qu'il se dise que c'était l'objectif des créanciers "préférant un scénario catastrophe plutôt que signer avec un parti de gauche radicale".[25 juin]
Devoir corrigé
Les autorités grecques font des propositions mais les négociateurs européens les corrigent de façon humiliante, comme s'ils étaient de mauvais élèves. J'avais noté, réclamant que la Troïka soit jugée pour ses méfaits, ceci : " le mémorandum (le MOU, memorandum of understanding, qualifié de "masturbation intellectuelle de la part des thuriféraires de la pensée unique", selon le député européen Philippe Lamberts) n'y va pas de main morte : non seulement ce sont des milliers de pages détaillant par le menu, de façon souvent humiliante, tout ce sur quoi le pays doit économiser (comme licencier les femmes de ménages des ministères), mais il a imposé, par exemple, le licenciement de médecins : de quel droit, la Troïka pouvait se positionner ainsi ? Qui lui a donné mandat pour le faire ?" [Voir mon billet : Faire condamner la Troïka pour la tragédie grecque.]
Photo : Laurent Desbonnets à Bruxelles, dans le journal de France 2 à 20 h le 24 juin, montrant les pages des propositions de Tsipras avec des paragraphes entiers refusés à l'encre rouge par les créanciers de la Grèce, entre autres, parce que la réforme sur les retraites, déjà bien amputées, n'est pas suffisante.[25 juin]

Bien triste Europe
Romaric Godin, du journal économique La Tribune qui est loin d'être un média de gauche, effectue un démontage en règle des arguments violents tenus par Arnaud Leparmentier à l'encontre des Grecs dans Le Monde. A lire absolument (La bien triste Europe de monsieur Leparmentier). Tout y passe : les comparaisons erronées avec les pays baltes, les propos tendancieux sur le fait que l'Allemagne n'avait pas intérêt de choisir l'euro et sur l'impact criminel de l'austérité imposée par la Troïka.[26 juin]
"Dictamolle européenne"
Soutien à Alexis Tsipras qui ne s'écrase pas devant les fauteurs de la crise financière qui cherchaient à mettre son pays à genoux, sinon à terre, pour qu'il ne soit pas dit que ces gens-là se concilient avec un gouvernement de "gauche radicale". Sauf qu'il est démocrate : moralité, il consulte son peuple. Quel pied de nez à cette "dictamolle européenne" [formule de JL Mélenchon dans Le hareng de Bismarck].[27 juin]
Pathétique Michel Sapin
Michel Sapin sur France inter ce matin (29 juin) : il dit respecter la démocratie grecque, y compris le choix du référendum, mais pour, tout à trac, accuser Tsipras "d'avoir rompu unilatéralement les négociations" alors qu'on était à deux doigts de conclure ! Par ailleurs, il prend la défense du FMI et de sa directrice générale : ce serait les petits pays (Argentine) qui pousseraient à la rigueur avec la Grèce. Il prétend que les négociateurs ont "réduit l'austérité" puisqu'ils exigeaient 3 % de surplus budgétaire (hors remboursement de la dette) et n'exigent plus que 1 % [notons que la France, elle, qui donne des leçons à la Grèce, est à 4 % de déficit, et sur des sommes qui n'ont rien à voir avec la Grèce]. Interrogé par un auditeur pour savoir si l'Europe se comporte de façon démocratique (cf. le Traité transatlantique, ou Mario Draghi ex-de Goldmann Sachs), notre ministre répond à côté : les pays européens sont des démocraties, point. Pathétique. La France a encore la possibilité de se montrer à la hauteur et non pas de ménager les financiers et l'Allemagne pour s'attirer leurs bonnes grâces.[29 juin]

Sortez vos mouchoirs
Jean-Claude Juncker se dit attristé parce que l'Europe c'était le sens de sa vie. Il confie même en privé (pour que tout le monde le sache) qu'il s'estime trahi par la décision de Tsipras d'organiser un référendum. Quel culot pour un leader politique qui a triché en faisant du Luxembourg un paradis fiscal pour 340 multinationales (a-t-on évalué combien la France a perdu dans ces grosses magouilles ?). Par ailleurs, Christine Lagarde veut donner des leçons de sérieux aux Grecs, elle qui est mise en examen dans l'affaire Tapie. Enfin Brice Hortefeux vient gémir dans les radios pour dire que le défaut de la Grèce ajouterait 1200 € à la dette contractée déjà par chaque Français (30 000 €). Présentation fallacieuse, dans la mesure où la dette publique n'est pas exactement comparable à une dette privée, et il le sait dans la mesure même où à l'époque de Nicolas Sarkozy il n'a jamais utilisé ce genre d'argument (alors même qu'entre 2007 et 2012 la dette publique est passée de 1200 à 1800 Mds€).[29 juin]

"Le chœur des éditorialistes ordonne à la Grèce de se soumettre"
Marianne note que "le chœur des éditorialistes ordonne à la Grèce de se soumettre" (du Monde au Figaro, de L'Opinion aux Echos, en passant par Le Journal du dimanche).
J'ajoute à ce concert d'éditorialistes inféodés à la Finance Nicolas Beytout, né avec une cuillère d'argent dans la bouche, qui espère la sortie de la Grèce de l'Europe et de l'euro et qui accuse Tsipras et Varoufakis d'être "les fossoyeurs de l’Europe" qui "ont tout fait pour ne plus laisser à leurs «partenaires» européens que le choix entre des mauvaises solutions". Ainsi la Troïka n'est pas responsable des conditions insoutenables, humiliantes, qu'elle voulait imposer à la Grèce, mais ce sont les victimes qui sont coupables ! Cet ami personnel de Nicolas Sarkozy cherche à faire croire qu'il est journaliste, alors qu'il ânonne la doxa du capitalisme financier sur tous les plateaux de radio et de télé complaisants. Dans la même veine, alors qu'une aide sociale complément des toutes petites retraites devait être supprimée à la demande des négociateurs européens, Juncker vient de prétendre que rien n'était exigé sur les retraites, mensonge éhonté qui a choqué même les journalistes présents à sa conférence de presse. C'est dire.[30 juin]
Propos dignes de Jean-Pierre Raffarin
Jean-Pierre Raffarin, ancien premier ministre de Jacques Chirac, a tenu ce matin [1er juillet] sur France Inter des propos sur la Grèce qui dénotent avec ceux, irresponsables, de certains ténors de l'ex-UMP. Il a dit que rejeter la Grèce c'est contribuer à la déconstruction de l'Europe. Par ailleurs, il a reconnu que les Grecs avaient fait des efforts énormes (avec un excédent budgétaire hors remboursement de la dette, ce dont la France est bien loin). Le discours d'humanité qu'il a exprimé, y compris sur les migrants, montre que tout n'est pas pourri au royaume de France.[1er juillet]
Piketty accuse les apprentis sorciers
Passionnant ce débat où Piketty s'en prend aux apprentis sorciers à propos de la Grèce en s'adressant à Arnaud Leparmentier du Monde qui n'a cessé d'accuser les Grecs et de souhaiter leur sortie de l'euro. À un moment, Piketty dit carrément à son interlocuteur qu'il confond tout (entre excédent primaire que fait la Grèce et chute vertigineuse de son PIB).[4 juillet]
Le silence de la France : quel gâchis !
Guillaume Duval dans AlterEcoPlus, écrit : "Dans le cas de la France en particulier, le silence européen assourdissant de François Hollande depuis 2012 constitue à n’en pas douter une des principales déceptions suscitées par sa présidence. Au lieu d’engager une réorientation de la politique européenne, ce nouveau fiasco de la gauche européenne a donc au final renforcé la main des fanatiques de l’austérité. Dans l’immédiat, ce sont malheureusement, une fois de plus, les eurosceptiques et l’extrême droite qui, selon toute probabilité, en tireront profit en France comme en Europe… Quel gâchis !" [5 juillet]

[A noter que Guillaume Duval tient sur son compte Facebook une veille fort utile sur la presse économique internationale]
Le bruit des bottes
Christine Lagarde, présidente du FMI, sous prétexte de représenter 188 États, a été particulièrement intransigeante avec la Grèce, et en particulier à l'encontre de Tsipras : elle fait savoir que "depuis quelques semaines, [elle] se réveille la nuit pour vérifier où en sont les marchés". C'est vraiment terrible, et on imagine que le peuple grec, qui a perdu 30 % de ses revenus depuis le début des exigences du FMI, doit compatir. Le Monde papier du 6 juillet, qui publie cette information de première importance, la montre campée dans son fauteuil et bien dans ses bottes. Il serait tout autant mesquin d'y voir, de la part de cette exécutante docile, une provocation d'une privilégiée aux revenus exorbitants non imposés, qu'un bruit de bottes toujours possible pour imposer aux Grecs récalcitrants les diktats des puissances financières. [6 juillet]
[détail de la photo paru dans Le Monde du 6 juillet 2015]

"Le FN est un Syrisa à la Française"
Emmanuel Macron, qui venait de tenir des propos apaisants sur la situation grecque, se livre là à une démonstration sans ambiguïté de son appartenance à une droite prête à tout pour discréditer ceux qui dénoncent un libéralisme économique soumis aux spéculateurs de la Finance. De tels propos sont indignes. Comment avec de telles conceptions, la France peut jouer le moindre rôle pour aider la Grèce à sortir d'une crise humanitaire. [6 juillet]
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[à suivre]
Ces petits billets ont été régulièrement postés sur mon compte Facebook et aussi sur le compte Facebook du groupe "Nous soutenons le parti Grec SYRIZA". Certains ont été commentés, partagés et recommandés plusieurs centaines de fois.
Voir Petits billets pour la Grèce (1)
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Billet n°208
Billets récemment mis en ligne sur Social en question :
La mère se porte bien, au cinéma
Psychiatrie : menace sur un lieu de proximité et d'insertion
Et la richesse ruissellera sur les pauvres
Des enfants sont pauvres, leurs parents aussi
Contact : yves.faucoup.mediapart@sfr.fr
[Le blog Social en question est consacré aux questions sociales et à leur traitement politique et médiatique. Voir présentation dans billet n°100. L’ensemble des billets est consultable en cliquant sur le nom du blog, en titre ou ici : Social en question. Par ailleurs, tous les articles sont recensés, avec sommaires, dans le billet n°200]