Pour des informations sur les définitions, voici un billet détaillant les anticorps, Spike, RBD, le SARS-Cov2...
Pour la stratégie vaccinale et le développement d'une réponse immunitaire, c'est ici.
Les problèmes des variants indien ou sud-africain ou brésilien.
Basiquement lors d'une infection, l'organisme active différents mécanismes et cellules aboutissant à l'activation de lymphocytes T cytotoxiques pour tuer les cellules infectées, des lymphocytes B produisant des anticorps. Les anticorps produits peuvent bloquer l'entrée du virus dans nos cellules ou le recouvrir (opsonisation), permettant leur captation (phagocytose) puis destruction par des macrophages (et autres).
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L'organisme développe une réponse contre les éléments reconnus comme du non-soi. Il était intellectuellement intéressant de se dire qu'un vaccin constitué de virus tué/atténué (vaccin chinois) serait très efficace car on monte une réponse complète contre toutes les parties du virus. Ainsi, on est moins sensible à des mutations à des endroits précis puisque l'on possède pleins d'anticorps ciblant différentes zones et donc on devrait être capable de compenser. Or, les données actuelles montrent que ce n'est pas le cas.
La protéine virale Spike n'est qu'une cible comme une autre. Cependant, 90% de l'activité neutralisante/bloquante des anticorps des séra de patients convalescents est portée par les anticorps ciblant le RBD de Spike (plus de détails et références ici). C'est pourquoi, les variants portant des mutations en cet endroit sont problématiques. Les Spike des variants et de la version initiale ont une séquence protéique quasi identique. Les différences d'acides aminés sont indiquées en rouge par rapport à la souche précédente (représentation issue de COG-UK). La grande majorité des anticorps obtenus par l'immunisation par infection ou vaccination reconnaîtra le Spike du variant de la nouvelle infection. Puisque 90% de l'activité neutralisante est due au ciblage du RBD, l'évasion immunitaire est causée par les mutations dans le RBD. Ces mutations font que les anticorps bloquants ciblant cette zone ne sont plus capables de se fixer, ils ne reconnaissent plus la cible. L'activité neutralisante est donc perdue (ou diminuée).
C'est ce que l'on constate pour les variants britannique B117, sud-africain B1351, brésilien P1 (il en existe d'autres, ce sont ceux dont on parle actuellement)... La perte d'activité est faible contre le variant britannique : les vaccinés et convalescents d'une première infection possèdent des anticorps capables de bloquer le virus. Par contre, il y a une forte littérature scientifique prouvant que les B1351 et P1 ont une forte capacité d'évasion immunitaire (voir ici, notamment la moitié des vaccinés (2 doses) Pfizer ou Moderna n'ont plus d'activité neutralisante contre B1351 !). Cela explique l'explosion des cas au Brésil et en Amérique du Sud malgré les hauts niveaux de vaccination dans des pays comme le Chili ou bien déjà fortement impactés par les vagues précédentes comme le Brésil. En Israël, le ministère de la Santé a noté que l'efficacité du vaccin Pfizer contre le B1351 est 8 fois inférieure sur les données "vie réelle". Le vaccin Astrazeneca a montré une efficacité limitée de 20% sur la Covid symptomatique en Afrique du Sud (variant B1351)...
Un apparté : il en est évidemment de même pour le thérapies à base d'anticorps monoclonaux (2 à 10.000 € la dose) qui ciblent Spike et son RBD : LY-CoV555, LY-CoV16, REGN10989, REGN10933, REGN10934, REGN10987 (liste non exhaustive, vous pouvez la trouver entièrement sur http://sars2.cvr.gla.ac.uk/cog-uk/). Au passage, vous aurez noté que certains font partie des anticorps achetés par l'épidémiologiste en chef.
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D'où la nécessité de rappels.
Pfizer, Moderna & co ont annoncé la mise en développement de rappel contre les variants. Ils n'ont pas annoncé la stratégie choisie. Cependant, s'agissant d'un vaccin à ARN (ou un adénovirus), le choix a dû se porter sur le variant B1351. Il a été montré que des patients convalescents ont des séra capables de neutraliser le B117 et la version initiale (mais pas l'inverse, d'où l'évasion). C'est donc cette séquence qui sera probablement utilisée (ou une séquence hybride entre le B1351, P1 et autres) qui forcera l'organisme à produire ce Spike afin de développer une immunité contre elle.
Cependant, à mon avis, il y a un hic. Les personnes vaccinées ou ayant déjà été infectées possèdent déjà de nombreux anticorps ciblant ce Spike. Ce sont les lymphocytes B et T capables de la cibler qui vont se réactiver. Il n'y a pas de pression à ce que l'organisme sélectionne (développe) des lymphocytes envers les quelques zones de séquences divergentes mais qui sont primordiales.
Il serait plus pertinent :
- de vacciner MAINTENANT contre le variant B1351 au lieu de la souche initiale
- ou d'utiliser des vaccins à protéine/peptide contenant des mélanges du RBD ou des épitopes du variant B1351, P1 et autres. L'organisme n'aura pas la mémoire de ces antigènes et donc s'immunisera fortement.
Conclusions (comme toujours) :
- tant que circulera le virus, l'apparition de variants sera inévitable
- une population faiblement immunisée (sélection par faible pression) est un terrain excellent pour l'apparition de nouveaux variants échappant à l'immunité acquise par l'infection ou la vaccination
- même tous vaccinés, la circulation du virus conduira à de nouveaux variants
- la vaccination est une arme efficace lorsque le nombre de cas est faible
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