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Billet de blog 3 février 2025

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Comment gérer l’épidémie d’obésité chez l’enfant et l’adolescent ?

La grande bascule vers des régimes déséquilibrés et leur impact sur l'IMC a débuté dans les années 1980, lorsque sont apparus à grande échelle la restauration rapide et les aliments ultra transformés.

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Nous sommes en pleine épidémie mondiale d’obésité. Cependant, la France est moins touchée que d’autres pays dits « riches » en Occident. Elle se classe au 143ème rang des populations les plus obèses au monde, loin derrière les États-Unis au 10ème rang, le Royaume-Uni au 55ème rang ou l’Allemagne au 80ème rang. Le Japon, exemple vertueux, se classe au 161ème rang (1).

Comment conserver notre rang, voire progresser ? Nous avons en gros (sans mauvais jeu de mots) deux possibilités pour réduire le taux d'obésité : modifier notre style de vie ou prendre certains médicaments, l'un n'excluant pas l'autre.

L’indice de masse corporel (IMC) est un critère de référence simple pour estimer notre poids idéal. La grande bascule vers des régimes déséquilibrés et leur impact sur l'IMC a débuté dans les années 1980, lorsque sont apparus à grande échelle la restauration rapide et les aliments ultra transformés.

Les bonnes pratiques pour garder la forme sont bien connues : consommer une quantité suffisante de fruits et légumes et d'aliments peu transformés, manger à des heures régulières, éviter le grignotage entre les repas et faire de l’exercice physique régulièrement. Les bonnes habitudes devraient être transmises dès le très jeune âge afin de les rendre quasiment innées, plutôt que de les imposer de façon draconienne plus tard dans la vie. En tout cas, la volonté est une qualité nécessaire pour se prendre en main et se maintenir en bonne santé. Faire preuve de volonté permet d’éviter la prise de médicaments contre l’obésité récemment mis sur le marché et leur cohorte d’effets secondaires.

L’épidémie d’obésité témoigne du fait que cette volonté n’est pas suffisamment cultivée pour résister à la facilité de consommation du fast food et des produits ultra transformés. Ce qui laisse tout loisir à l’industrie pharmaceutique de proposer comme solution, par exemple, l’injection une fois par semaine d’un produit miracle nommé Wegovy. Sa commercialisation avec comme indication la gestion de l'obésité chez les diabétiques de type 2 date de 2022.

Sa promotion sur les réseaux sociaux, et notamment sur TikTok par des personnes auxquelles Wegovy a été prescrit et ayant maigri, en a fait exploser la vente. Ainsi, le fabricant danois, Novo Nordisk, a très vite saisi l’occasion de commercialiser un autre produit quasiment identique en 2024 (Ozempic) mais cette fois ciblant toute personne souhaitant perdre du poids sans forcément changer de style de vie. (2)

Le résultat pour Novo Nordisk est impressionnant : plus de $ 12 milliards de vente d’Ozempic dans les neuf premiers mois de 2024. Mais qu'en est-il du rapport bénéfice/risque de ce médicament pour les consommateurs ?

Le journal Prévention publiait le 1er février 2025 une tribune intitulée « Une nouvelle étude confirme les effets secondaires graves d’Ozempic : ce qu’un médecin veut que vous sachiez » (3, 4). Cette tribune évoque une étude publiée le 20 janvier dans Nature Medicine après analyse des données de plus de 2 millions de personnes atteintes de diabète qui ont pris des médicaments comme Ozempic et Wegovy pour aider à gérer leur poids.

Il n’existe pas de comparaison directe entre Ozempic et Wegovy pour la perte de poids, mais des études suggèrent que des doses plus élevées de leur principe actif (le sémaglutide) peuvent entraîner une perte de poids plus importante. Les chercheurs mettent en avant le constat que ces médicaments aident à réduire le risque de développer 42 problèmes de santé, y compris la démence, l’arrêt cardiaque et certains types de cancer. Parallèlement, ils ont découvert que les personnes qui prenaient ces médicaments avaient un risque plus élevé de développer 19 résultats négatifs pour la santé.

Le journal Prévention postule que la plupart des gens savent que ces médicaments peuvent provoquer des effets secondaires comme des nausées et de la diarrhée. Selon le site web officiel d’Ozempic, les effets secondaires les plus courants sont : nausée, diarrhée, constipation, douleurs au niveau de l’estomac et vomissements. Cependant, les dernières études révèlent des complications plus graves telles que la pancréatite ou des lésions rénales (5).

Pour les personnes qui ne supportent pas bien ces médicaments, il est conseillé de rester bien hydraté, de manger des repas plus petits et de limiter les aliments transformés, les aliments riches en graisses et les glucides raffinés. Ironiquement, ce sont quasiment ces mêmes bonnes pratiques qui pourraient aider les gens à mieux gérer leur poids… sans médicaments !

Alors que les lésions rénales figurent parmi les effets indésirables reconnus de l’Ozempic, ce médicament a été approuvé par la FDA (la haute autorité de sécurité sanitaire aux États-Unis) pour « réduire le risque de maladies rénales » (6) Un comble ! Autres effets secondaires graves, mais moins connus du grand public : le cancer de la thyroïde et la cécité (7).

Posons-nous la question suivante : comment un fabricant de médicaments réussit-il à commercialiser un produit avec de tels effets secondaires ? Le fabricant est censé fournir aux agences de sécurité sanitaire des données issues d'essais en laboratoire dits « précliniques », avant d’obtenir une autorisation de passer aux essais cliniques chez les patients. Ces données doivent convaincre les agences que le produit est sûr et efficace. Le fabricant est libre de choisir la façon dont il va atteindre cet objectif. Il peut se fier principalement à des essais sur des animaux ou utiliser des technologies modernes n’impliquant pas de recours à l’animal (8).

En l’occurrence, le fabricant Novo Nordisk a opté de tester son produit sur des animaux, principalement des souris, des rats et des singes. Ces tests ont révélé certains effets indésirables, comme le cancer de la thyroïde chez des rats. Le fabricant affiche dans la notice d’utilisation du médicament que le risque du cancer de la thyroïde chez l’homme reste inconnu. Cette affirmation sous-entend que les essais sur des animaux ne sont pas concluants ni fiables par rapport à la santé humaine.

Tant que les agences de sécurité sanitaire autoriseront les essais sur des animaux plutôt que d’exiger l’utilisation des technologies modernes désormais disponibles, ce sont les patients et les consommateurs de médicaments qui continueront à jouer les cobayes et à subir les pires effets indésirables. Exigeons de notre gouvernement qu'il remplace un système de sécurité sanitaire vieux de 75 ans par quelque chose digne du 21ème siècle !

En ce qui concerne l’épidémie d’obésité, commençons par imposer l’activité physique et la nourriture saine comme la norme dans notre société et ce, dès le plus jeune âge.

Références bibliographiques

  1. Ranking (% obesity by country) | World Obesity Federation Global Obesity Observatory
  2. Sémaglutide — Wikipédia
  3. FDA approves weight loss drug Wegovy to lower heart disease risk
  4. https://www.ozempic.com/how-to-take/side-effects.html
  5. Une étude confirme les effets secondaires de la pancréatite et des lésions rénales d’Ozempic
  6. FDA Approves Ozempic to Treat Kidney Disease
  7. L'Ozempic responsable d'une maladie pouvant causer la cécité - AlloDocteurs
  8. L'industrie pharmaceutique face à un dilemme | Le Club

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