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Billet de blog 2 novembre 2024

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Police, extrême-droite : au Portugal aussi !

Au Portugal aussi... la police peut tuer. Odair Moniz, un chef cuisinier de 43 ans, originaire du Cap-Vert, ancienne colonie africaine du Portugal, a été abattu par la police de la PSP (police sécurité publique) le 21 octobre dernier, à Amadora, banlieue de Lisbonne.

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Odair Moniz se rendait à sont travail et aurait franchi une ligne blanche continue. La police l’intime de s’arrêter, refus d’obtempérer, il a été poursuivit et finalement la police l’arrête sur le bas-côté. Selon les policiers il les aurait attaqués avec une arme blanche. Une version mise à mal par des vidéos de surveillance, aucun couteau n’ayant été trouvé. Il tente de s’enfuir et un policier de 20 ans l’abat de deux balles.

Le lendemain, des policiers enfoncent la porte de l’appartement de la famille à coups de pied. Le collectif ‘‘Vida Justa’’ (vie juste) a publié une vidéo Instagram, où plusieurs personnes sont intimidées et menacées par la police.

En réponse à cet harcèlement policier, des dizaines de personnes se sont réunies devant l’appartement de la famille Moniz dans le quartier Zambujal d’Amadora, pour lui rendre hommage. Et pendant quatre jours, des révoltes ont éclaté dans plusieurs quartiers au nord de la capitale.

Des manifestations importantes ont eu lieu à Lisboa et surtout dans les quartiers populaires où résident beaucoup d’immigrés des anciennes colonies, Angola, Guinée Bissau mais surtout du Cap-Vert. Des dégâts importants sont à enregistrer au cours de ces affrontements avec la police. Le gouvernement n’ayant trouvé d’autre réponse que la répression.

Alliance Police-extrême-droite

On constate une proximité revendiquée entre les forces de police et les milieux d'extrême droite. Une quarantaine de personnes, anciens hommes politiques, musiciens et avocats portugais ont porté plaine contre des membres du parti d'extrême droite Chega (Ça suffit!). En effet le chef du parti André Ventura, a dit que le policier qui a tué Odair Moniz devrait être "décoré et non mis en examen" (in Público). L'un des députés du parti, Pedro Pinto, a déclaré à la RTP3 : "si les forces de sécurité tiraient davantage pour tuer, le pays connaîtrait davantage d’ordre".

Ces propos sont inacceptables et condamnables, affirme un juriste, à la RTP, la radio-télévision publique portugaise"C'est une incitation à commettre un crime, une atteinte, aussi, à la mémoire de la personne décédée". Pour Miguel Prata Roque, professeur de droit constitutionnel, l'un des signataires de la plainte pénale contre Chega. "Lorsqu'une personne ayant une responsabilité politique encourage la police à utiliser des armes contre les citoyens, elle incite à la désobéissance collective et cela est également puni par le Code pénal".

Notícias sem fronteiras / Nouvelles sans frontières

Le journal en ligne ‘‘Nouvelles sans Frontières’’ [http://nsf.pt/] a publié des reportages et plusieurs informations sur les évènements autour de la mort d’Odair Moniz. Notamment une brève de Luísa Semedo, une voix portugaise contre le racisme, la discrimination et l'injustice, qui parle de la peur et de la terreur : ‘‘Medo’’

«Imaginez : vous venez de perdre brutalement un membre de votre famille, assassiné par la police, et la police arrive en masse, enfonce votre porte et violente les membres de votre famille à l'intérieur. Mais qu’à cela ne tienne, ce sont des noirs du quartier, aucun d’entre eux n’est innocent et l’État de droit ne s’applique pas à eux. Les médias et les commentaires parleront de violence, de vengeance, de colère, d'agressivité, et jamais, jamais de la PEUR que ressentent ces personnes». [/medo/]

Des milliers de personnes ont demandé justice pour Odair

Un autre article du 26 octobre:

"Le défilé bien organisé, les manifestants étant protégés par leurs propres cordons de sécurité, a parcouru l'Avenida da Liberdade depuis Marquês de Pombal avec une présence policière très discrète à proximité et une dominante lorsque le cortège a terminé son parcours à Restauradores, avec l'exigence de «Justice pour Odair».

  Criés avec beaucoup d'énergie et même une certaine colère, les slogans mêlaient souvent la langue portugaise et le créole et transformaient la manifestation, au-delà de l'acte politique de revendication, en une expression vivante du multiculturalisme qui enrichit l'identité hybride des Portugais d'aujourd'hui, quelles que soient leurs racines. 

L'adaptation du slogan omniprésent dans toutes les actions de rue depuis le 25 avril sur l'Avenida da Liberdade, "Le peuple uni ne sera jamais vaincu" en "Les quartiers unis ne seront jamais vaincus" a renforcé l'unité des milliers de participants, qui dans leur grande majorité avait des liaisons avec les quartiers de la périphérie de Lisbonne et les communes voisines de Loures, Amadora, Cascais et Sintra.

Bien que l'accent ait été mis sur Odair et sur l'urgence de rendre justice, d'autres sujets ont été abordés par les groupes et organisations qui ont défilé sur l'avenue, avec l'émergence de thèmes anticoloniaux et la relation nouvelle entre racisme et colonialisme, ce qui a injecté une forte dose politique et historique dans le contenu revendiqué de l’évènement. En la matière, la boîte de Pandore s'est ouverte sur les raisons profondes de certains sujets tabous comme le racisme, qui s'est toujours limité dans le débat public à la couleur de la peau et aux comportements de ségrégation provoqués par les différences d'us et de coutumes. 

Ainsi, à l’avenir, des défis inquiétants pourront provenir des quartiers et provoquer des tensions qui ne seront certainement pas atténuées par certains petits programmes sociaux à vocation normalisatrice et disciplinaire, comme cela s’est produit dans le passé.   Le défi de créer une communauté exigera honnêteté et ouverture. Les relations paternalistes des uns et le faire semblant des autres doivent enfin être remises à leur place, c'est-à-dire à la poubelle, au nom des relations entre Portugais, que nous sommes et continuerons de l'être".

Carlos Ribeiro [/milhares-pediram-justica-para-odair/]

* *  Le 5 février 2024, dans un bref billet, j’évoquais un rassemblement qui avait eu lieu à Lisbonne (Largo Camões), contre l'islamisation de l'Europe et critiquaient le gouvernement portugais. Leurs banderoles, rappellent des mots d’ordre : « Stop Islão » ou « Portugal aos portugueses » ! /au-portugal-aussi-la-facho-sphere-defile

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