Les médias ont largement révélé que deux policiers sont accusés d'avoir violé une jeune femme de 26 ans, au dépôt du tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis). Placés en garde à vue et ensuite écroués, ils ont reconnu des relations sexuelles, mais minimisant la gravité car ‘‘elles étaient consenties’’. Surprenante défense comme si une détenue en garde à vue se livrait "en toute liberté" à ses geôliers! L'Inspection générale de la police nationale (IGPN) a été saisie de l'enquête.
C’est à l’appel du Syndicat des Avocats de France (SAF), qui dénonce les conditions d’accueil plus qu’indignes au tribunal de Bobigny, quinze jours après ce viol présumé par deux policiers du dépôt. Et leur remarque est très explicite… ‘‘C’est une zone de non-droit. Le dépôt est tellement déshumanisé que des policiers sont en mesure de se convaincre qu’il est possible d’avoir des rapports « consentis », dans une cellule…’’.
De leur côté le syndicat de la Protection Judiciaire de la Jeunesse, le SNPES-PJJ/FSU 93, qui a également appelé à un rassemblement ce jeudi, sur le parvis du Tribunal de Bobigny, dénonce dans un communiqué que "L'absence des avocats aux permanences mineurs n'a pas empêché le parquet de Bobigny de continuer à déférer, depuis, plus d'une dizaine de mineurs, qui n'ont pas été assistés par leur avocat lors de leurs audiences devant le juge des enfants". Cela constitue, explique le Syndicat une "atteinte grave aux droits des mineurs" puisque la loi "rappelle la présence obligatoire d'un avocat lors du défèrement d'un mineur".
Au-delà des conséquences de cet événement grave commis au dépôt par deux policiers, il y a aussi la situation des professionnels de la PJJ qui déjà, en juillet 2025 alertaient sur la situation en Seine-Saint-Denis, ‘‘en 2024, on met les équipes à terre, en 2025 on les piétine!’’ En effet à la rentrée 2024, des coupes budgétaires importantes ont entraîné le départ d’un grand nombre de contractuel.le.s parfois avec quatre ans d’ancienneté... mais aussi la mise à mal du travail pluridisciplinaire par manque de postes de psychologues et des assistants de service social. Et bien sûr les conditions de rétention des mineurs au dépôt, dans des conditions d’hygiène innommables et souvent victimes de comportements violents de la part des policiers.
Le discours sur la jeunesse et l’éducation dont la Macronie et ses successifs ministres de l’éducation nous rabattent les oreilles, sont ici confrontés justement à l’absence de cadre éducatif et social et, ce qui se déroule dans cette instance judiciaire, va à l’encontre de toute possibilité pour ces jeunes d’être accompagnés et aidés à sortir des circuits de la délinquance.
Et les professionnels de l’enfance et de la jeunesse de la PJJ rappellent les besoins ‘‘afin d’assurer l’accompagnement de ces jeunes et de leurs familles confiées à la PJJ ainsi que les conditions de travail humaines et dignes pour les professionnel.le.s’’.
Sauf erreur, les Juges des Enfants de Bobigny, eux-mêmes confrontés à cette régression en moyens des services éducatifs et aux conditions faites aux mineurs lorsqu’ils sont au dépôt du Tribunal ne semblent pas s’être manifesté, pour le moment. Rappelons qu’il y a sept ans, dans une tribune au journal Le Monde, les Juges des Enfants de Bobigny alertaient sur la situation désastreuse dans laquelle se trouvaient leur juridiction mais aussi les services éducatifs et sociaux d’accompagnement. [/ici/des-juges-lanceurs-dalerte, 23/11/2018]
La situation politique actuelle n'est pas propice à traiter ces questions qui sont pourtant essentielles car il s'agit de la jeunesse et du futur du pays. Mais on peut craindre que dans le futur préconisé par le pouvoir en place et ses soutiens, cette jeunesse en grande difficulté et "perdue" n'y figure pas.