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Billet de blog 4 octobre 2017

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Pauvreté : une histoire de peur et de confiance

Peur de perdre son emploi, inquiétude pour l'avenir, peur de l'autre... nos raisons d'angoisser sont nombreuses. La précarité et la pauvreté renforcent ces peurs qui rendent docile et empêchent de réfléchir. En revanche, la confiance libère l'esprit, permet de se dire les choses, donne des ailes. Remplacer l'exclusion et la peur par la confiance, voilà le défi de la lutte contre la pauvreté.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Paulette, une retraitée active dans cette commune située sur l'un des dix "territoires zéro chômeur de longue durée", s'étonne presque de la question de la journaliste qui lui demande comment elle soutient ce projet : "oh, je ne fais pas fait grand chose... juste du porte à porte pour présenter le projet aux gens qui ne le connaissent pas."

Sans toutes les Paulette et tous les autres habitants (avec ou sans emploi) qui dépassent leurs peurs, tendent l'oreille à ce projet et en parlent autour d'eux, aucun "territoire zéro chômeur de longue durée" n'aurait vu le jour (10 sont nés début 2017, en attendant des petits frères dans les mois/années à venir).

C'est ce que cette expérimentation initiée par ATD Quart Monde appelle "l'étape zéro" : recueillir un consensus par un patient travail de rencontres, de réunions, de groupes de travail... et de porte à porte persévérant.
Sur des territoires où le projet était porté par des élus et des acteurs économiques, mais sans consensus suffisamment fort de tous sur le terrain, il n'a pas démarré.

Présentation de l'expérimentation "Territoires zéro chômeur de longue durée" © Public Sénat

Sur ces territoires zéro chômeur, se faire confiance signifie plusieurs choses : croire que l'ennemi n'est pas l'autre (le patron, le chômeur, l'élu, le retraité, etc.) mais l'indifférence, le fatalisme et, en l'occurrence, le chômage ; croire que ce n'est pas parce qu'un autre retrouve un emploi que cela m'empêche ou empêche d'autres d'en retrouver un aussi ; croire que tous "méritent" cela, et pas seulement les plus qualifiés ou les plus performants ; bref, croire que tous ont intérêt à ce que chaque personne qui souhaite travailler puisse le faire.

La peur est mauvaise conseillère. L'absence de peur est libératrice. Elle permet de consacrer son énergie non plus à des stratégies de protection, de défense ou d'attaque, mais de changement personnel et de construction collective. Elle offre à nos neurones la possibilité de travailler en paix et de trouver des idées neuves pour vivre mieux ensemble.

Dans notre société méritocratique et où l'on a tous la critique facile(1), ce pari de la confiance bouleverse les habitudes et les conventions.
Bien sûr, il ne s'agit pas d'idéaliser l'autre, mais de lui proposer de construire ensemble un cadre qui permette à chacun(e) de contribuer à atteindre des objectifs. Dans ce "chacun", il y a le (la) retraitée qui veut s'engager, l'élu, l'entrepreneur, le voisin, le parent, etc., jusqu'aux élus nationaux, qui devraient sinon impulser, au moins soutenir ces dynamiques de confiance.

jean-christophe.sarrot@atd-quartmonde.org

Notes

(1) : Faites avec Tweeter le test que je fais souvent : un tweet moqueur ou critique est bien plus retweeté qu'un tweet positif. "Good news is bad news" disent les gens de médias, qui savent bien que notre cerveau possède deux modes de pensée : l'un, rapide et intuitif, mais producteur de préjugés, l'autre, plus logique, demande un effort de réflexion, mais permet de penser de façon libre et de résister aux préjugés. Voir D. Kahneman, Système 1 / Système 2 : Les deux vitesses de la pensée, Paris, Flammarion, 2012 ; O. Houdé, Apprendre à résister, Éd. Le Pommier, 2014, et A. Jack, A. Dawson et alii, « fMRI reveals reciprocal inhibition between social and physical cognitive domains », NeuroImage, 2012.

Et n'oubliez pas...

Illustration 2
Tous à la République à Paris les 14 et 15 octobre 2017 !
La société peut changer si l'on s'y met tous !

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