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Le jour d’après, j’espère le voir.
Je vous écris de Colombie. Je m’appelle Luciana, j’ai 24 ans, j’élève seule mes enfants de 5 et 2 ans.
Depuis 2 ans, je me bats contre un cancer. On m’a dit que de l’autre côté de l’océan, en Europe, vous avez des systèmes de sécurité sociale. Ici, dans mon pays, comme dans beaucoup d’autres pays, ça n’existe pas. Mais j’ai eu une chance inouïe : par hasard, j’ai rencontré un Français de voyage dans ma ville. Il a organisé une solidarité en France, et en Belgique aussi, pour payer les traitements, les opérations, les frais d’hôpital. Sans cette générosité qui a traversé l’océan, je ne serais plus là pour écrire. Quand je pense à toutes ces personnes qui m’ont secourue, et que je j’espère pouvoir connaître un jour, je pleure.
J’adore la poésie, même si je ne comprends pas tout. J’ai dû arrêter l’école à 14 ans. Je me suis battue pour reprendre mes études, je suis aujourd’hui en seconde année d’université. On m’a dit que de l’autre côté de l’océan, en Europe, l’éducation est gratuite. Dans mon pays, étudier est réservé à ceux qui en ont les moyens. Je ne mange pas tous les jours, mais j’élève mes enfants du mieux que je peux, je travaille dans une pizzéria pour payer mes études, et donc j’étudie. Ce n’est pas facile tous les jours, mais je me bats.
Je ne suis pas jalouse des richesses que vous avez de l’autre côté de l’océan. Le jour d’après, j’aimerais simplement qu’ici, il y ait un peu moins de pauvreté, que nous ayons toutes et tous, quel que soit l’endroit où nous sommes nés, les mêmes droits fondamentaux. Education, santé, alimentation.
Si vous avez pris le temps de me lire, merci d’excuser ma naïveté.
Je vous aime. Prenez soin de vous, et aussi de notre avenir commun.
Luciana Vargas, Medellin (Colombie), 5 avril 2020.