Lors de cette élection, la plupart des changements ont été effectués par des candidats qui s'étaient déclarés blancs en 2020 et qui se déclarent désormais métis. Ce groupe représente 40,4 % de tous ceux qui ont modifié leur inscription raciale - en chiffres absolus, il s'agit de 16.900 candidats.
Correction historique, erreurs commises lors des élections précédentes, compréhension de leurs propres privilèges, conscience de n'avoir jamais souffert de préjugés raciaux. La liste des arguments de ceux qui ont "changé" est très variée.
Selon les experts, la législation qui réservait des ressources aux candidats noirs a entraîné une redéfinition de l'autodéclaration raciale, les candidats qui se déclaraient blancs se déclarant désormais métis ou noirs. « Il s'agit d'une transracialisation, d'une tentative opportuniste et afro-convenante de feindre une identité raciale qu'ils n'ont pas, qu'ils n'ont jamais assumée et qui, généralement, n'a pas de support phénotypique », déclare le professeur Samuel Vida, coordinateur du programme de droit et de relations raciales à l'UFBA (université fédérale de Bahia). Samuel Vida préconise que le ministère public électoral prenne des mesures pour identifier les fraudes éventuelles et considère que l'approbation de la PEC d'amnistie en août 2024, qui était soutenue par les partis PT et PL (bolsonariste), constitue un pas en arrière.
La déclaration raciale a un impact sur la distribution des fonds du parti et des fonds électoraux. À partir de 2020, les décisions du Tribunal supérieur électoral (TSE) et du Tribunal suprême (STF) ont déterminé la parité dans la distribution des ressources pour les candidats noirs et blancs, une règle qui n'a pas été respectée par les partis politiques. Avec la modification par amendement à la Constitution, la "PEC d'amnistie", approuvée par les deux Chambres fédérales en août 2024 à Brasilia, le pourcentage est tombé à 30 %.
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Cette année, le TSE a ordonné que les candidats qui ont modifié les informations qu'ils avaient fournies auparavant soient tenus de confirmer leur déclaration et que le ministère public électoral en soit informé pour inspection.
Parmi les candidats qui ont modifié leur déclaration raciale en vue des élections de 2020 (municipales) et 2022 (députés fédéraux et députés d'Etat) figurent au moins dix candidats à la mairie des capitales. Parmi les candidats qui ont fait la déclaration lors des deux élections, 18 % ont modifié leurs informations de "race".
Cinq candidats à la mairie de capitales sont passés du "blanc" au "métis" ["pardo"] :
Paulo Lemos (PSOL, gauche de la gauche) à Macapá (Amapá), Beto Pereira (PSDB, droite) à Campo Grande (Mato Grosso do Sul), Lourdes Melo (PCO, trotskiste) à Teresina (Piauí), Nicoletti (União Brasil, extrême droite) à Boa Vista (Roraima) et Sebastião Melo (MDB, droite) à Porto Alegre (Rio Grande do Sul).
Le changement d'identité raciale qui a eu le plus d'écho en 2024 a eu lieu dans la capitale du Rio Grande do Sul, Porto Alegre, où le maire Sebastião Melo a été critiqué par ses opposants pour s'être déclaré "métis" pour la première fois de sa carrière politique. M. Melo a indiqué que « le MDB de Porto Alegre a procédé à une correction historique en ce qui concerne la couleur du candidat », mais il n'a pas donné d'autres détails sur son ascendance ni sur les raisons de ce changement. Les membres du groupe parlementaire noir de l'assemblée législative du Rio Grande do Sul l'ont critiqué et ont souligné la réduction des ressources allouées par l'administration Melo aux politiques d'égalité raciale.
À Campo Grande (Mato Grosso do Sul), le député fédéral et candidat à la mairie Beto Pereira (PSDB) a modifié sa déclaration, passant du blanc en 2022 au métis en 2024, et a été convoqué par le Tribunal supérieur électoral (TSE) pour fournir des éclaircissements. Le candidat a déclaré qu'il s'était déclaré "métis" lors de toutes les élections auxquelles il s'était présenté depuis 2014, à l'exception de 2022. Dans ce cas, cependant, le changement aurait été une erreur de la part de l'équipe qui a enregistré les données dans le système de justice électorale.
Par ailleurs, 11.500 candidats ont changé leur déclaration de "métis" à "blanc". Dans les capitales des Etats, la liste comprend Vanderlan Cardoso (PSD, droite) à Goiânia (Goias), Delegada Danielle (MDB, droite) à Aracaju (Sergipe), Emerson Jarude (Novo, droite de la droite) à Rio Branco (Acre) et Geraldo Júnior (MDB, droite) et Bruno Reis (União Brasil, extrême droite) à Salvador de Bahia.
À Bahia, cette question est devenue l'un des centres des débats de la campagne électorale depuis l'élection du gouverneur de 2022, et un changement radical s'est produit parmi les candidats à la mairie des autres grandes villes de l'État de Bahia: six candidats ont modifié leur déclaration et se disent désormais blancs.
Lors des élections de 2022, ACM Neto (União Brasil, extrême droite), alors candidat au poste de gouverneur, s'était déclaré "métis", devenant ainsi la cible de critiques. Cette décision lui a valu d'être qualifié d'« afroconvenant ».
Pour cette élection d'octobre 2024, les alliés du gouverneur métis Jerônimo Rodrigues (PT) ont modifié leurs déclarations raciales par rapport aux élections précédentes et se déclarent désormais blancs. Candidat à la mairie de Salvador, et actuel vice-gouverneur de Bahia, Geraldo Júnior (MDB, droite), qui s'est allié en 2024 avec le PT, s'était déclaré "métis" pour les élections de 2016, 2020 et 2022. Il a déclaré qu'il avait l'habitude de traiter cette question de manière protocolaire lors de l'enregistrement de ses candidatures et qu'aujourd'hui, sa compréhension de la question a évolué : « Si la société m'a toujours reconnu comme un homme blanc et que je n'ai jamais été victime de discrimination ou de préjugés raciaux, cela n'avait pas de sens de continuer à me déclarer comme un homme brun ».
Les candidats actuels à la mairie de la deuxième ville la plus importante de Bahia, Feira de Santana (620.000 h.), Zé Neto (PT), de la ville de Camaçari (10 % (34 milliards R$) du PIB* annuel de l'Etat de Bahia, qui était de 352 milliards RS en 2021, soit 70 milliards US$), Luiz Caetano (PT), et de Vitória da Conquista (370.000 h.), Waldenor Pereira (PT) s'étaient déclarés "métis" lors des élections 2020 et ont maintenant décidé de se décrire comme "blancs".
Dans une déclaration, les conseillers de Zé Neto ont souligné qu'il avait changé l'enregistrement de sa candidature de métis à blanc depuis 2022, afin d'éviter l'accès aux ressources destinées aux personnes noires et métis. À Vitória da Conquista, la candidate Lúcia Rocha (MDB, droite) a fait le même changement. Elle affirme être "métis" si l'on tient compte de la couleur de sa peau et de son hérédité, mais a déclaré que ce n'était pas suffisant et a donc décidé de se déclarer blanche.
Le maire de Salvador de Bahia, Bruno Reis (União Brasil, extrême droite) est passé du "blanc" en 2014 au "métis" en 2016 et 2020 et s'est à nouveau déclaré, en 2024, "blanc". Il a déclaré avoir décidé de se déclarer blanc afin de ne pas bénéficier des fonds du parti et des fonds électoraux. L'hypocrisie, le clientélisme, la ségrégation dans les partis politiques et l'opportunisme ont toujours régné en maîtres à Salvador, ville dirigée, à l'exception d'un mandat socialiste et féminin, par les droites libérales et des édiles uniquement "blanches" et masculines, et cela depuis la fin de la dictature.
2.748 municipalités brésiliennes, sur un total de 5.569, auront seulement deux candidats au scrutin d'octobre 2024.
Et Salvador de Bahia, la ville la plus noire du Brésil, aura, nouvellement et scandaleusement, quelle que soit l'issue du vote, un maire masculin et blanc. Blanc, cette fois, sans guillemets.
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(*) Selon le rapport de l'Instituto Brasileiro de Geografia e Estatística (IBGE), publié le 15 décembre 2023, la capitale Salvador, avec un PIB annuel de 62,954 milliards R$ est suivie de Camaçari avec 33,971 milliards R$ et Feira de Santana avec 17,282 milliards R$. Les dix premières villes de l'Etat de Bahia représentent 48,7 % de son PIB. Le PIB annuel de Bahia était de 352 milliards R$, fin 2021.