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Billet de blog 14 juin 2025

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BRÉSIL■2 journalistes condamnés pour "ironies, insinuations" envers un magistrat

Le Tribunal supérieur de justice a condamné le 9/6 les journalistes Octávio Costa et Tábata Viapiana à verser 150.000 R$ (27.000 US$) de dommages et intérêts au juge et doyen du Tribunal suprême fédéral Gilmar Mendes, pour un article publié en 2017. Une intimidation scandaleuse, sachant des précédentes décisions de 1re et 2e instance, qui avaient jugé légitime et informatif le papier.

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Illustration 1
Gilmar Mendes, doyen du Tribunal suprême fédéral (STF), adversaire de la liberté de la presse © DR

La 3e chambre du STJ (Tribunal supérieur de justice) a ordonné à deux journalistes et à l'hebdomadaire IstoÉ d'indemniser le ministre Gilmar Mendes, du STF (Tribunal suprême fédéral), à hauteur de 150.000 R$ (27.000 US$) au titre du préjudice moral pour un article publié en décembre 2017. Cet article n'est pas, en juin 2025, disponible sur internet.
« La liberté de la presse ou la liberté d'expression ne doit pas être confondue avec l'irresponsabilité de la déclaration », a déclaré le rapporteur de l'affaire, le juge Ricardo Villas Bôas Cueva. Dans sa décision de lundi 9 juin 2025, il a été rejoint par Humberto Martins, Daniela Teixeira et Moura Ribeiro. Un appel des journalistes est en cours.
  
Le doyen du STF, Gilmar Mendes, a intenté le procès en mars 2018 contre la société Editora Três, qui possède l'hebdomadaire IstoÉ, ainsi que les auteurs de l'article intitulé "Negócio Suspeito", Octávio Costa et Tábata Viapiana.  Octávio Costa est aussi ... président de l'Association de la presse brésilienne (ABI).

Illustration 2
Le juge Villas Bôas Cueva

L'ABI a publié un communiqué dans lequel elle affirme que cette décision porte atteinte à la liberté de la presse dans le pays et constitue un précédent inquiétant. "En visant le président de l'ABI, l'une des institutions les plus importantes et les plus respectées du pays, la décision du STJ a un impact direct sur la liberté de la presse elle-même, puisqu'elle envoie pratiquement un message aux journalistes et à la société selon lequel les membres de la Cour suprême sont intouchables et peuvent se retourner contre tout professionnel qui, dans le cadre de son travail, écrit sur eux, quelle qu'en soit la raison. En l'espèce, sur la base d'un rapport largement documenté, comme l'ont compris les juridictions inférieures", précise-t-il.

Les deux journalistes doivent faire appel de la décision devant le STJ.

L'article en question portait sur une enquête relative à une irrégularité administrative liée à la vente d'une université - União de Ensino Superior de Diamantino (Uned) - co-fondée en 1999 et appartenant à la famille du magistrat Gilmar Mendes, dans la ville de Diamantino (20.000 hab., Mato Grosso), au gouvernement du Mato Grosso pour un montant de 7,7 millions R$ (1,4 million US$) en 2013. L'université privée a été fondée par Gilmar Mendes et sa sœur, qui est restée l'un des propriétaires* jusqu'à la transaction finale.

L'hebdomdaire Istoé affirme avoir contacté le magistrat et doyen du STF avant la publication et que celui-ci a confirmé qu'il avait été partenaire de l'Uned jusqu'en 2000, lorsqu'il a été nommé procureur général fédéral. Il a également déclaré qu'il n'était pas impliqué dans la vente de l'établissement d'enseignement.

Villas Bôas Cueva a déclaré que le comportement des journalistes est loin des limites de l'exercice régulier du droit d'informer et d'exprimer ses pensées, mais constitue une agression contre la sphère des droits de la personnalité du doyen - Gilmar Mendes - du STF.

« L'article est truffé d'ironies et d'insinuations clairement dirigées contre la personne du plaignant, dans l'intention manifeste de l'associer, de manière péjorative, à l'image de quelqu'un qui s'éloigne de l'éthique et qui ne vise qu'à sauvegarder des avantages personnels et à favoriser des personnes qui lui sont proches », a déclaré le jugement.

Le ministre du STF avait perdu le litige en première instance et le ministre Villas Bôas Cueva lui-même avait rejeté la première demande, mais Gilmar Mendes avait alors fait appel, en mai 2021. A cette occasion, à l'unanimité, le TJDFT (Cour de Justice du District Fédéral et des Territoires) avait affirmé que le texte se situait dans les limites du droit à la libre expression des activités de communication, garanti par la Constitution.

Octávio Costa a déclaré que le texte était basé sur la documentation du ministère public (MP-MT) du Mato Grosso. Selon lui, le droit à l'indemnisation ne devrait être accordé qu'en cas de faute intentionnelle ou de mauvaise foi. "Il n'y a pas eu de mauvaise foi ou d'intention malveillante. Nous avons écrit un article sur la base d'éléments fournis par le ministère public. Ce n'est que dans ces cas [de mauvaise foi ou d'intention malveillante] que des dommages moraux doivent être accordés. C'est ce qu'a compris la Cour suprême aujourd'hui. Mais la conclusion de l'arrêt cite l'ironie, ce qui est quelque chose de subjectif", dit-il. Le journaliste Costa remet également en question le montant fixé. "Aujourd'hui, le Tribunal suprême fédéral (STF) lui-même comprend que l'indemnisation ne doit pas avoir pour but de briser le condamné, de lui faire connaître des difficultés financières dans sa vie. Ce n'est pas l'objectif".
 
Editora Três ayant été déclarée en faillite au début 2025, les deux journalistes craignent de devoir payer eux-mêmes la somme.

De son côté , la Coalizão em Defesa do Jornalismo (CDJor) avait exprimé, par un communiqué daté du 6 juin 2025, sa profonde 
préoccupation concernant le procès initié par le STJ. Nous le traduisons ci-dessous:
 
Publié en 2017, l'article, intitulé "Negócio Suspeito", a publié  des informations sur une enquête du ministère public concernant l'acquisition 
d'une université privée par le gouvernement du Mato Grosso. L'établissement d'enseignement en question a été fondé par le ministre Gilmar Mendes et sa sœur, qui est restée l'une des propriétaires jusqu'à la vente a fait l'objet d'une enquête.
Les décisions de première et deuxième instance ont jugé l'action  infondée, soulignant la véracité des informations publiées et la légitimité de la critique journalistique.
Lors d'un procès virtuel qui a débuté le 3 juin 2025, le juge rapporteur Ricardo Villas Bôas Cueva a voté pour renverser les décisions précédentes 
et ordonner aux journalistes et à l'organe de presse de payer à  une compensation d'un montant de 150.000 R$. Dans sa décision, le rapporteur souligne, comme motifs de condamnation, les ironies et les insinuations que contenait dans l'article.
Dans le récent jugement des ADIs 6792 et 7055, le STF a renforcé son interprétation selon laquelle « la responsabilité civile des journalistes et des organisations de presse doit être établie lorsque l'intention ou la faute grave (c'est-à-dire la négligence évidente) dans l'enquête et la divulgation  du fait est dûment prouvée, excluant la possibilité d'une responsabilité civile pour la publication de l'article ».
 
 
En 2022, sans vergogne et avec un acharnement rare, Gilmar Mendes a fait condamner un autre journaliste des plus respectés du Brésil, Rubens Valente, pour une citation de ses propos, dans un livre-enquête implacable, à une amende astronomique de 310.000 reais (ce qui correspond à 290 fois le salaire minimum du Brésil).
 
Gilmar Mendes, un adversaire résolu de la liberté de la presse.
 
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(*) Le juge Gilmar Mendes a été l'un des associés fondateurs de l'Uned en 1999, aux côtés de sa sœur, Maria Conceição Mendes França, et de trois autres associés. L'un des associés de la faculté sise à Diamantino est l'homme d'affaires, condamné pour déforestation, Marcos Antônio Assi Tozzatti, ancien conseiller du ministre, et trouble personnage, Eliseu Padilha (1945-2023) dans le gouvernement (1997/2001) du président de la République Fernando Henrique Cardoso.
En 1998, à Brasilia, et avec deux autres personnes, Gilmar Mendes avait également créé l'Instituto Brasiliense de Direito Público (IDP), dont il est toujours associé aujourd'hui en 2025.
 
 

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