Notre association Sauvons l’élevage de Plein Air est née suite à la décision préfectorale d'abattage totale d'un troupeau de bovins à la ferme du Pré Jourdan, à St-Laurent, en Haute-Savoie, il y a tout juste un an, pour une vache ayant été détectée positive à la brucellose en novembre 2021[1].
Cette politique sanitaire d'abattage total date d'une trentaine d'années, alors que la maladie brucellose s'exprimait encore faiblement dans les troupeaux de ruminants domestiques. Elle avait pour objectif d'éradiquer la maladie sur le territoire français pour obtenir un statut officiellement indemne de brucellose (dès lors que 99,8% des troupeaux français étaient indemnes). Cela lui permet d'exporter ses produits agricoles, viande, lait et produits laitiers, librement à l'étranger.
La maladie brucellose est une maladie dite réglementée, c'est à dire qu'elle est soumise à déclaration obligatoire lorsqu'elle est détectée dans un élevage. D'autres maladies sont réglementées, comme la tuberculose bovine, la grippe aviaire ou la peste porcine africaine. Ces maladies sont réglementées pour des raisons de santé publique et pour des raisons économiques et commerciales, à savoir le libre-échange de denrées agricoles ou d'animaux vivants avec des pays étrangers. Mais toutes les maladies réglementées ne sont pas soumises à l'obligation d'abattage total.
En novembre 2021 une seule vache du Gaec Pré Jourdan a été détectée positive à la brucellose suite à des analyses de routine sur le lait du troupeau. Les autres animaux se sont tous révélés négatifs. Pour si peu, l'état français avait pourtant pris sa décision : il était urgent d'éliminer le troupeau déclaré « infecté » sur la seule preuve d'un seul animal détecté positif et déjà abattu.
Nous avons dénoncé l'année dernière cette aberration profondément immorale et inhumaine, sans pouvoir empêcher l'abattage malheureusement car des rouages très complexes en matière de politique agricole y sont associés.
Nous ne pouvons pas accepter qu'à l'avenir de telles mesures assassines soient encore adoptées, que ce soit pour des bovins ou pour d'autres maladies chez d'autres espèces domestiques comme les volailles ou les porcins. Nous disposons de tests rapides et fiables. Les ruminants sont surveillés périodiquement pour la brucellose en France. Et toute vache qui avorte subit un test sérologique et bactériologique pour s'assurer de l'absence de la bactérie brucella.
Nous avons donc créé cette association Sauvons l'élevage de Plein Air car nous refusons que des mesures sanitaires absurdes détruisent les éleveurs qui pratiquent avec passion leur métier et élèvent leurs animaux dans le respect de leurs besoins et de leur environnement.
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Nous refusons également que la faune sauvage soit le bouc émissaire de ces politiques sanitaires. En 2022, 250 vaches ont été abattues pour conserver un statut indemne de brucellose, et 70 bouquetins ont été également abattus inutilement dans nos montagnes pour satisfaire la colère de certains syndicats et lobbies agro-industriels.
Quoi qu'en disent les décideurs, nous disposons de tests pour la maladie, que ce soit pour les troupeaux domestiques ou pour la faune sauvage. La politique d'éradication est une politique vouée à l'échec. Les exemples ne manquent pas, que ce soit pour la brucellose, la tuberculose ou d'autres maladies réglementées. Le risque 0 n'existe pas. Toute tentative d'éradication coûte cher en temps, en énergie déployée et en argent, et est profondément destructrice des équilibres naturels, mais jamais ne garantit un assainissement total et pérenne.
Nous voulons également répondre à certains articles parus dans des revues agricoles en octobre dernier, suite à la venue du ministre de l'agriculture Marc Fesneau : oui les résultats d'analyse sont enfin parvenus, 9 mois après l'abattage des animaux. Les conclusions de l'ANSES révèlent qu'il n'a pas été possible d'isoler de souches de brucella malgré la mise en œuvre de cultures par enrichissement. Cela signifie qu'il n'a pas été possible de détecter de brucella vivante sur les 1500 bactériologies effectuées au cours de ces 9 mois.
Cependant l'ANSES conclut à la présence de quelques animaux non-négatifs, les résultats non négatifs résultant de PCR, technique d'amplification génique moléculaire. Ainsi, sur les 1348 prélèvements effectués sur les bovins abattus (ganglions, rate, écouvillons génitaux), 9 prélèvements ont eu un résultat PCR positif. Mais ceci n'est pas suffisant pour qualifier ces bovins de contaminés ou infectés. De même les 3 vaches ayant obtenu des sérologies non négatives ne peuvent pas être considérées comme contaminées ou infectées. Aucun organe prélevé sur ces 3 vaches n'est revenu positif en PCR. Et aucune culture bactérienne n'a pu confirmer la croissance bactérienne sur ces 3 vaches non plus.
Ainsi, contrairement à ce qui a été dit, il n'y a pas eu de propagation rapide de la maladie dans le troupeau. Il n'y a pas eu de propagation du tout de la maladie puisqu' aucune vache n'excrétait de brucella.
Les 9 animaux cités ne sont pas considérés comme positifs par l'ANSES. Il s'agit de prélèvements sortis positifs en PCR (recherche d'ADN bactérien, mais pas de bactérie vivante), donc ces animaux sont considérés comme non-négatifs. Les phrases citées dans cet article sont une interprétation de l'interprétation probabiliste des résultats faite par l'ANSES, et constituent de la désinformation, destinée à entretenir la peur d'une maladie réglementée dans le monde de l'élevage.
Mais la réalité est tout autre ! Nous continuons d'affirmer que d'autres méthodes de gestion des maladies sont possibles, à commencer par un accompagnement et une surveillance, plutôt qu'un abattage à la hâte pour satisfaire quelques intérêts économiques...
Quel est le plus important entre défendre un marché mondial pour les produits laitiers ou défendre des éleveurs qui jour après jour élèvent et prennent soin de leurs animaux et nourrissent leurs concitoyens ?
Tout ceci contribue également à entretenir une peur irrationnelle vis-à-vis du vivant non domestique (car non contrôlable). Une peur qui se matérialise par une stigmatisation et une haine injustifiée envers la faune sauvage, et par une volonté d'éradication tout aussi irrationnelle et contre-productives par manque de compréhension des dynamiques du vivant. Il est parfaitement illusoire de croire que l'on va contrôler une espèce sauvage, tout comme il est illusoire de prétendre contrôler des bactéries par des désinfections massives.
Tout ceci est d'autant plus contre-productif que ces mesures destructrices entretiennent les maladies et sélectionnent les populations bactériennes les plus résistantes, parfois les plus dangereuses. C'est méconnaître le génie du vivant, et les capacités d'adaptation, de résistance et de résilience d'un monde invisible qu'est le monde microbien.
L'élevage de plein-air en harmonie avec son environnement et respectueux de la biodiversité naturelle est la voie la plus saine pour nos éleveurs et nos animaux domestiques, loin des mesures de claustration, de concentration et de désinfection qui sont imposées pour certains types d'élevage.
Nous défendons tous les élevages de plein air, élevages de ruminants, de volailles, de porcs dès lors qu'ils tiennent compte des contraintes du milieu, de la disponibilité et du renouvellement en ressources végétales diversifiées et des besoins des animaux. Lorsque l'équilibre global des écosystèmes, de la vie souterraine et de la vie sauvage est respecté, les maladies se font rares, et sont peu contagieuses, contrairement aux élevages hors-sol concentrationnaires que défend notre modèle actuel.
Nous défendons une autre approche de la gestion des maladies, qui tient compte des animaux, des hommes et du vivant non domestiqué (végétal et animal).
Pour toutes ces raisons nous sommes engagés dans un combat juridique pour que dans un premier temps des dérogations puissent être accordées aux éleveurs lorsqu'ils se trouvent confrontés à un arrêté préfectoral pour des maladies réglementées, notamment pour la brucellose.
Mais ces combats sont longs et coûteux. C’est pour cela que nous mettons en place une cagnotte afin de pouvoir payer les frais d'un avocat engagé pour notre lutte :
https://www.helloasso.com/associations/sauvons-l-elevage-de-plein-air/
Un très grand merci d’avance pour votre aide dans notre combat en faveur éleveuses et éleveurs du vivant.
Association Sauvons l’élevage de Plein Air
[1] Lire https://blogs.mediapart.fr/collectif-sauvons-les-vaches-de-saint-laurent/blog/311221/affaire-de-la-brucellose-sauvegarder-le-vivant-ou-cultiver-le-ris
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