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Billet de blog 15 mars 2008

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Résister par le style ?

Eric Laurrent revient avec Renaissance italienne (Minuit, 160 pages, 14 euros). Le narrateur, double de l'auteur, y tombe amoureux d'une femme. Mais leur relation reste, à son grand désespoir, platonique.

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Eric Laurrent revient avec Renaissance italienne (Minuit, 160 pages, 14 euros). Le narrateur, double de l'auteur, y tombe amoureux d'une femme. Mais leur relation reste, à son grand désespoir, platonique.

Ce qui est intéressant chez Eric Laurrent, c'est sa manière de jouer avec les conventions, de travailler son style, d'introduire des références culturelles. C'est d'en faire trop dans des domaines où l'on en fait pas assez : la langue et la culture. Il répond, pour le Bookclub, à trois questions.

Votre attention à la langue et vos références culturelles ne sont-elles pas un moyen de dénoncer la société actuelle ?

Rien n'a jamais été plus éloigné de mon esthétique que la prise de position politique. Pour résumer sommairement mon approche romanesque, disons que je serais plutôt un fervent tenant de "l'art pour l'art", ayant toujours considéré que le roman devait se garder autant faire se pouvait d'exprimer des idées sur la marche du monde, mais se contenter de décrire celui-ci le le plus objectivement possible.

Pour autant, je n'ignore pas qu'un parti pris esthétique est aussi un parti pris politique. De ce point de vue, le style litteraire qui est le mien, caractérisé par une langue chatiée, assez précieuse, voire désuète, aux tournures soutenues, parfois archaïsantes, par d'interminables périodes, profuses en digressions, manifeste une résistance évidente à la vulgarité ambiante (laquelle atteint de telles proportions qu'elle a, depuis peu, fini par se propager jusqu'au sommet de l'Etat). Quant aux nombreuses références culturelles qu'on rencontre dans mes textes, même si elles traduisent avant tout un goût personnel, il ne serait pas déplacé non plus de les interpréter comme un combat contre la "misologie" généralisée.

Est-ce que Renaissance italienne est aussi un roman sur la pornographie et le puritanisme (et leur impasse à tous les deux) ?

Non, même si les multiples scènes à caractère sexuel qui se trouvent dans ce roman peuvent être entendues comme un refus à la fois du puritanisme (lequel fait un retour sensible et -selon moi- hautement regrettable) et, par la manière poétique -ou, disons-le moins présomptuesement, très "écrite"- avec laquelle elles sont rapportées, de la pornographie.

Peut-on lire vos romans sans références culturelles ?

Renaissance italienne est effectivement un roman où abondent les références culturelles -bibliques, mythologiques, picturales, musicales, etc. A l'instar des mes précédents ouvrages, mais peut-être davantage, il renvoie en outre à nombres de textes, essentiellement des "classiques", soit par la citation cachée, soit par le pastiche, voire la parodie, sot par la revisitation, le détournement, etc., autant de "clins d'oeil" que seule une familiarité acec la littérature peut rendre perceptible. Cela étant, je prends toujours soin de rendre possible une lecture au "premier degré" en m'astreignant à maintenir une tension narrative, de telle sorte qu'on puisse simplement, naïvement, s'attacher à l'histoire relatée."

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