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Billet de blog 20 juin 2011

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A Map of Home

C’est une carte au trait approximatif dont les frontières ne sont pas clairement définies. C’est la carte de Nidali, jeune fille née à Boston d’un père palestinien et d’une mère égyptienne partis vivre au Koweït avant de devoir s’enfuir lors la première guerre du golfe.

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C’est une carte au trait approximatif dont les frontières ne sont pas clairement définies. C’est la carte de Nidali, jeune fille née à Boston d’un père palestinien et d’une mère égyptienne partis vivre au Koweït avant de devoir s’enfuir lors la première guerre du golfe.

Illustration 1

Les questions des origines, de l’identité, de l’éveil et de l’exil sont au cœur de ce court roman de Randa Jarrar paru aux Etats-Unis (Other Press, Penguin Books) et non traduit à ce jour en France. Largement inspirée par la vie de l’auteur née à Chicago qui a passé son enfance au Koweït avant de revenir aux Etats-Unis, l’histoire de Nidali dresse le portrait sensible d’une jeune fille élevée à la dure par son père qui l’incite (parfois violemment) à apprendre, travailler à l’école et apprendre encore. Pour devenir docteur. Ou professeur. Sa mère possède un tempérament d’artiste (elle nourrit une passion dévorante pour le piano). Nidali se construit entre cette mère effacée mais parfois rebelle et ce père exigeant, borné.

A Map of home est un roman d’éveil, celui de la jeune Nidali, née en terre étrangère, vivant sur une terre non moins inconnue. Son père a décidé de vivre au Koweït. Nidali va en classe à la New English School de Jabriyya. Elle découvre d’autres enfants déracinés. Ils sont juifs, musulmans, chrétiens. Peu après la naissance de son frère Gamal, le père de Nidali envoie la jeune fille dans une école arabe. Et lui fait couper les cheveux à la garçonne. Les origines de Nidali sont floues, incertaines. Sa grand-mère maternelle est grecque, son père n’a pas le sentiment d’être Palestinien. Ils vont devoir fuir quand l’Irak attaquera Koweït City. Ils n’avaient pas grand-chose. Si ce n’est une vie. Ils perdront tout.

Illustration 2
© Randa Jarrar / Penguin Books

Randa Jarra a redessiné la carte de sa vie, comme Nidali, adolescente, a tenté de dessiner la carte de la Palestine un soir en Egypte, après la fuite. Pour essayer de comprendre. Son héroïne découvrira les premières brimades racistes, les premiers émois sexuels (solitaires d’abord, puis avec une fille et un garçon de son école), les premiers interdits.

Avec A Map of Home, Randa Jarrar explique comment les mots, l’humour et l’écriture ont été autant de bouées auxquelles Nidali s’est accroché pour grandir et trouver sa voie, sa place. Avec simplicité et beaucoup d’impertinence, Randa Jarrar dresse un «family snapshot», un tableau de famille. Ce premier roman a été salué par la critique lors de sa sortie en 2008 aux Etats-Unis. Il est publié en Italie, en Allemagne, en Israël, à Taïwan et en Chine.

Mais plus encore, A Map of Home est l’histoire d’une polyphonie (le roman mêle mots arabes, anglais, espagnols), d’une pluralité de lieux (la famille de Nidali parcourt le monde pour trouver un endroit où vivre et s’établir, vivre enfin) : Etats-Unis, Koweït, Egypte, Etats-Unis à nouveau. A Map of Home est un récit d’apprentissage, l’histoire d’une construction sur des fondations fragiles, sur une carte imprécise. Aux contours mouvants.

DB

A Map of Home, Randa Jarrar, Penguin Books, 15 $.