La soirée proposée par le Comité Européen Européen Marseille fut d’après les termes de notre ami Daniel Micolon, expert européen en matière d’éducation : « Une soirée amicale face aux immenses défis à relever ! Des interventions qui aident à réfléchir sur les enjeux, entre rêve et réalité, dans un monde incertain. Éduquer, informer, interroger, comprendre, tracer un chemin. Quelques mots clés qui nous animent ». On ne pouvait donner meilleur définition du but que s’est assigné notre Comité Européen Marseille, au plus près des Marseillais depuis trente ans d’une action entièrement bénévole.

En l’honneur de la Journée de l’Europe, le Comité Européen Marseille a proposé en partenariat avec le Mouvement européen Provence, un débat sur une situation géopolitique inattendue. Elle renverse l’équilibre du monde au profit de la loi du plus fort. On se dirige vers un futur incertain qui oblige l’Union européenne à réagir ou sombrer.
« Le rêve européen a traversé les siècles » a rappelé la présidente du Comité européen Marseille - il est devenu réalité avec la Déclaration de Robert Schuman, pierre fondatrice de la première Communauté européenne, il y a soixante et quinze ans. Au 8 mai 1945, dernier jour de la guerre, répond le 9 mai 1950, premier jour de la paix. »
L’Union Européenne a réalisé un modèle de relations internationales basée sur le respect de l’autre, la recherche d’une gestion dans l’intérêt commun et la mise en place d’une solidarité interrégionale faisant du continent un havre de paix, de protection sociale inégalée dans le monde. Or, aujourd’hui, se pose désormais la dramatique question : ce rêve a-t-il volé en éclat face à la Russie et les Etats-Unis d’Amérique, s’unissant pour détruire cette Union démocratique ? Les Européens qui avaient fait de la paix leur credo, sont -ils en mesure de reprendre leur destin en mains et d’assurer leur défense tant militaire qu’économique ?

Qui mieux que le Général (2S) Foudriat pouvait indiquer un chemin pour renforcer la Défense de l’Europe dans une Union toujours entravée par des nationalismes dépassés ? Président de l’Association des Auditeurs de l’Institut des Hautes Études de la Défense Nationale (IHEDN), il assure une formation et une information au plus haut niveau pour les responsables militaires et privés sur la situation de la défense nationale et les enjeux stratégiques mondiaux, tout en offrant un accès aux simples citoyens et en éveillant des vocations parmi la jeunesse.
Dans un continent bercé par l’illusion de la paix éternelle à l’abri de l’OTAN, la France reste la seule puissance offrant une armée formée dans tous les domaines de la défense, capable d’intervenir sur le terrain et dotée de la dissuasion nucléaire.
Le retournement idéologique des États-Unis a le mérite de sortir les Européens du déni. Livrés au bon vouloir de notre ancien allié outre-Atlantique qui a bloqué le développement de la défense européenne, il n’est donc plus question d’armée européenne. Pourtant, le Général se montre confiant en la capacité d’évoluer vers un renforcement d’une Défense de l’Europe avec les armées nationales en développant une stratégie commune, harmonisant les systèmes d’armes et de munitions, intensifiant les entraînements en commun.
Ainsi, un plan de près de 800 milliards d'Euros pour "réarmer l'Europe", déjà proposé par l’ex-commissaire européen Thierry Breton, a été présenté par la Commission européenne et accepté par le Conseil Européen pour financer des partenariats dans l’industrie européenne de défense. Par ailleurs, le nouveau Chancelier, Friedrich Merz, rompant avec l’orthodoxie financière allemande, ambitionne de développer une armée conventionnelle de premier plan. Un bataillon allemand permanent de 5000 hommes stationne déjà aux frontières russes en Lituanie.
Mais il ne saurait y avoir d’indépendance stratégique sans le soutien d’une puissance économique.

C’est le Magistrat honoraire à la Cour Administrative d’Appel, Claude Reynoird, Président d’honneur du Mouvement européen Provence, qui a présenté les recommandations du rapport Draghi en matière économique afin que l’UE puisse résister, voire s’imposer, à la concurrence étrangère.
Mario Draghi, ancien président de la Banque centrale européenne (BCE) fait une analyse sévère de l’excès des normes, facteur de ralentissement du développement économique. Ainsi, la loi anti-trust, étroitement interprétée, a-t-elle interdit la fusion Siemens-Alstom, privant l’Europe d’un géant mondial du ferroviaire.
De plus, l’Europe a raté la révolution de la haute technologie, elle dépend à plus de 80% de pays tiers en matière numérique. Le rapport Draghi insiste sur le fait que l’Europe n’a pas de technologue de rupture, c’est-à-dire de capacité d’innovation qui se substituerait à une ancienne technologie existante mais désormais dépassée et rendue caduque.
Par ailleurs, alors que l’épargne est très importante, la faiblesse des investissements privés en Europe, handicape la recherche et le développement des grandes entités économiques. De même, en dépit de son succès, l’Euro est resté une monnaie orpheline sans gouvernement économique intégré de la zone euro. Un marché unique incomplet et morcelé, par exemple, le réseau de télécommunications compte 27 opérateurs contre 4 aux États-Unis, provoque la perte de milliards pour l’ économie européenne.
Les solutions proposées par le rapport Draghi se focalisent sur trois secteurs principaux : les réseaux télécoms, l’informatique et l’IA.
Dans un monde livré au chaos du plus fort, les citoyens européens ne trouveront de salut que dans leur unité pour survivre, la conscience de leur puissance créatrice et la confiance en cette démocratie transnationale unique au monde pour conserver leur modèle politique et social.
*Monique Beltrame
Présidente du Comité européen Marseille
(1) La problématique de cette conférence a été définie sur le billet précédent de l’édition « Carnets d’Europe » du Club Mediapart.