Billet de blog 16 septembre 2015

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La sangle qui attache tue le lien humain qui soigne

Une pétition du Collectif des 39, signée par de nombreuses personnalités du monde intellectuel, du soin psychiatrique et des arts interpelle les parlementaires au sujet du retour de la contention physique dans les lieux sensés soigner des patients. « Proscrire la contention physique permettra aux patients, aux familles, aux soignants de retrouver une dignité nécessaire et indispensable pour traverser les dures épreuves de cette souffrance psychique inhérente à l’humanité de l’homme. »

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Une pétition du Collectif des 39, signée par de nombreuses personnalités du monde intellectuel, du soin psychiatrique et des arts interpelle les parlementaires au sujet du retour de la contention physique dans les lieux sensés soigner des patients. « Proscrire la contention physique permettra aux patients, aux familles, aux soignants de retrouver une dignité nécessaire et indispensable pour traverser les dures épreuves de cette souffrance psychique inhérente à l’humanité de l’homme. »


En France, chaque jour, on enferme,  on immobilise, on attache, on sangle, des personnes malades.

Ces pratiques de contention physique d’un autre âge se déroulent quotidiennement dans ce pays. Ces pratiques dégradantes avaient quasiment disparu. Or les contrôleurs généraux des lieux de privation de liberté, Jean-Marie Delarue puis Adeline Hazan, l’ont constaté, elles sont désormais en nette augmentation, qui plus est banalisées comme des actes ordinaires.

Dans le projet de loi « de modernisation du système de santé », on lit même que ces actes auraient des vertus thérapeutiques !

Nous l’affirmons : ces actes ne soignent pas.

Nous soignants, patients, familles, citoyens ne pouvons accepter que ces pratiques perdurent. Les patients qui les ont subies en témoignent régulièrement, elles produisent un traumatisme à jamais ancré dans leur chair et dans leur cœur. Dire non  aux sangles qui font mal, qui font hurler, qui effraient plus que tout, c’est dire oui :

- C’est dire oui à un minimum de fraternité.

- C’est remettre au travail une pensée affadie, devenue glacée.

- C’est poser un acte de régénérescence.

- C’est trouver et appliquer des solutions humaines à des comportements engendrés par d’énormes souffrances, mais qui peuvent paraître incompréhensibles ou non traitables autrement.

Or nous, nous savons que l’on peut faire autrement. Cela a été fait durant des décennies, cela se fait encore dans certains services. Mais ce savoir faire est en train de se perdre au profit de la banalisation grandissante de ces actes de contention.

Nous l’affirmons : accueillir et soigner les patients, quelle que soit leur pathologie, nécessite d’œuvrer à la construction de collectifs soignants suffisamment impliqués et  engagés dans le désir d’écouter les patients, de parler avec eux, de chercher avec eux les conditions d’un soin possible.

Un minimum de confiance, d’indépendance professionnelle et de sérénité est à la base de ce processus. Or le système hospitalier actuel malmène et déshumanise les soignants.

L’emprise gestionnaire et bureaucratique envahit le quotidien : principe de précaution, risque zéro, techniques sécuritaires, protocolisation permanente des actes, réduction du temps de transmission entre les soignants etc… Elle dissout petit à petit la disponibilité des acteurs de soins : comment alors prendre le temps de comprendre, de chercher du sens, de penser tout simplement que le patient, si inaccessible soit-il, attend des réponses et des solutions humaines à même de l’apaiser.

Ce contexte nuisible trouve dans la banalisation des actes de contention physique sa traduction « naturelle », expression du désarroi et/ou du renoncement. Repenser la formation, donner de toute urgence des moyens nécessaires à cette mission complexe et difficile est la moindre des choses et ouvrirait la voie à la réinvention de l’accueil et du soin.

Pensez-y. Qui d’entre nous supporterait de voir son enfant, ou son parent proche, ou un ami, en grande souffrance, attaché, ligoté, sanglé ? Qui accepterait de s’entendre dire que c’est pour le bien de cette personne chère ? Qui pourrait accepter un tel acte alors qu’il est possible d’agir autrement ? Car il est possible d’agir autrement !

Mesdames, messieurs les parlementaires, nous savons que parfois il vous faut beaucoup de courage pour élaborer des lois qui semblent aller à contre-courant des idées reçues ! La maladie mentale fait peur. Le traitement de différentes affaires tragiques, mais totalement minoritaires, par les médias alimente cette peur. Ne pas céder à cette peur nous revient, vous revient à vous les élus du peuple.

Il nous revient d’affirmer haut et fort qu’une vision sécuritaire de la psychiatrie va à l’encontre du besoin légitime de sécurité protectrice que soignants, patients et familles réclament.

Proscrire la contention physique permettra aux patients, aux familles, aux soignants de retrouver une dignité nécessaire et indispensable pour traverser les dures épreuves de cette souffrance psychique inhérente à l’humanité de l’homme.

Rien n’est hors de portée de l’intelligence humaine ! Mesdames, messieurs les parlementaires ne laissez pas les patients soumis à des traitements qui ne sont pas des soins ! 

Pour signer la pétition, cliquez (ici). 

Premiers signataires :

A

Christophe Aleveque, humoriste et chroniqueur ;

Janine Altounian, essayiste et traductrice de Freud ;

Nurith Aviv, cinéaste

B

Mireille Battut, présidente de l'association La main à l'oreille ;

Agnès Benedetti, psychanalyste ;   

Fethi Benslama, Professeur de psychopathologie clinique, Directeur de l'UFR d'Etudes Psychanalytiques, Directeur de l'Institut Humanités et Sciences de Paris, Université Paris-Diderot Paris 7 ;

Dominique Besnard, psychologue clinicien, formateur aux CEMEA ;

Philippe Bichon, psychiatre ;

Hervé Bokobza, psychiatre ;

Joëlle Bordet, psychosociologue, chercheur au CSTB ;

Philippe Borrel, réalisateur ;

Geneviève Brisac, écrivain ;

C

Benny Cassuto, médecin, acupuncteur, enseignant de Qi gong ;

Valérie Compan, professeur de neurobiologie ;

Jean-Claude Constant, professeur à la retraite ;

Marie José Corentin-Vigon, psychanalyste ;

Patrick Coupechoux, journaliste, écrivain ;

D

Dominique Damour, psychologue clinicienne ;

Pierre Dardot, philosophe et enseignant ;

Marie Darrieussecq, écrivain ;

Pierre Delion, médecin psychiatre, professeur à la faculté de médecine de l’université Lille-II ;

Alexandra de Seguin, psychiatre ;

Marie Didier, écrivaine ;

Françoise Dumont, Présidente de la Ligue des Droits de l’Homme ;

Bernard Durand, past-président de la FASM Croix-Marine ;

F

Eliane Flament, psychologue clinicienne, membre du CA du point de capiton ;

G

Jean Luc Gibelin 

Yves Gigou, infirmier, cadre de santé ;

Jean Louis Giovannoni, poète;

Esther Gonon, apicultrice, chargée de communication ;

François Gonon, neurobiologiste, directeur de recherche émérite CNRS ;

Roland Gori, psychanalyste,  professeur émérite de Psychopathologie clinique à l'université d'Aix-Marseille ;

Emmanuelle Guattari, écrivain ;

H

 Jacques Hochmann, professeur émérite de psychiatrie à l'Université Lyon I, médecin honoraire des hôpitaux de Lyon ;

J

Jean François Jung, cinéaste ;

K

Pierre Khalfa, coprésident de la Fondation Copernic ;

Serge Klopp, infirmier, cadre de santé ;

L

Paul Lacaze, psychiatre, psychanalyste ;

Patrick Landman, psychiatre, psychanalyste et juriste est Président d'Initiative pour une Clinique du Sujet Stop DSM ;

La Parisienne Libérée et Mimoso, artistes ;

Linda , écrivain ;

Louise L. Lambrichs, écrivain ;

Jean-Jacques Lottin, directeur d’études en santé publique ;

Marie-Helène Lottin, médecin psychiatre ;

M

Paul Machto, psychiatre et psychanalyste ;

Noël Mamère, député maire ;

Philippe Meirieu, un chercheur et écrivain français, spécialiste des sciences de l'éducation et de la pédagogie ;

Simone Molina, écrivain et psychanalyste ;

Marie José Mondzain, philosophe ;

François Morel, acteur ;

Edgar Morin, directeur de recherche émérite au CNRS ;

N

Thierry Najman, psychiatre, chef de pôle ;  

P

Hannah Perahia, pianiste, sculpteur ;

Serge Portelli, magistrat ;

Sabine Prokhoris, psychanalyste ; 

R

René Revol, maire de Grabels 34 ;

Elisabeth Roudinesco, historienne, directrice de recherches à l’Université de Paris VII, chargée d’un séminaire d’histoire de la psychanalyse à l’ENS ;

S

Antoine Spire, journaliste ;

Benjamin Stora, professeur à l'université Paris-XIII et inspecteur général de l'Éducation nationale ;

T

Frederique Thonnat, professeur d’anglais ; 

Alain Timar, metteur en scène, plasticien ;

W et Z

Elisabeth Weissman, essayiste ;

Martin Winckler/Marc Zaffran, médecin et écrivain…

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