In extrémis avant le premier tour de la présidentielle, le Conseil Constitutionnel vient de rendre une décision à la suite d'une Question Prioritaire de Constitutionnalité à propos de plusieurs articles de la loi du 5 juillet 2011.
Le gouvernement actuel avait réussi à imposer des conditions de soins sans consentement en psychiatrie malgré l'opposition et la mobilisation de la quasi totalité des professionnels en psychiatrie, de nombreuses associations de patients et de parents.
Cette majorité s'était appuyé sur une décision du Conseil Constitutionnel pour faire passer cette loi dans la précipitation, réduisant les débats pourtant complexes sur l'intervention du juge des libertés. Le résultat en est catastrophique dans la pratique : diversité de l'application de la loi et notamment de l'intervention du juge des libertés, ( il faut prendre conscience de la panique de nombreux patients hopsitalisés sous contrainte à qui on remet une lettre du tribunal, les convoquant pour une audition par le juge des libertés ) ; utilisation de l'internement pour réduire un écologiste contestataire dans l'Hérault ; bureaucratie galopante avec la multiplication de certificats, etc. etc.
Cette fois-ci le délai de révision de la loi imposé par cette QPC est beaucoup plus grand puisqu'il porte jusqu'en octobre 2013. Le Collectif des 39 espère qu'ainsi la nouvelle majorité se saisira de cette question pour qu'un plus vaste débat puisse s'engager après l'indispensable abrogation de cette loi indigne et anti-thérapeutique. Le Collectif sera particulièrement actif pour qu'un grand débat s'organise sur les pratiques en psychiatrie autour de l'hospitalité pour la folie.
Le Collectif des 39 contre la nuit sécuritaire a rendu public le 21 avril 2012 le communiqué suivant.
Paul Machto
Une nouvelle loi en psychiatrie pour la prochaine majorité
Le 21 avril 2012
Le Conseil Constitutionnel a rendu sa décision concernant une Question Prioritaire de Constitutionnalité (Q.P.C.) portée par le Cercle de Réflexion et de Proposition sur la Psychiatrie (C.R.P.A.), elle concernait plusieurs articles de la loi du 5 juillet 2011 réformant les soins psychiatriques sans consentement.
Un article de cette loi a été déclaré inconstitutionnel, il porte sur le sort réservé à la catégorie des patients supposés « dangereux » (article L3213.8) qui se trouvent enfermés sans garantie légale contre l’arbitraire de leur « traitement ».
De surcroît, nous considérons comme une grande victoire que les soins sans consentement en ambulatoire ne puissent être « contraints », même s’ils peuvent se révéler « obligatoires » (sic). Cela annule de facto leur possibilité d’application. Il s’agit d’une énorme avancée. Le collectif des 39 se félicitent de cet augure. Ces pseudo-soins de contrôle psychiatrique ne sont pas envisageables dans notre cadre constitutionnel. La prochaine majorité devra réécrire une loi : notre vigilance s’en trouve accrue. Il en est de la responsabilité des acteurs de la psychiatrie et des citoyens de ce pays de veiller à ce que la rédaction de la future loi soit guidée par l’éthique des soins.
Par ailleurs, le rapport du Comité Européen de Prévention de la Torture (CEPT) sur les conditions d’accueil et de soins dans les services de psychiatrie nous rappelle les dérives quotidiennes dans les pratiques, tant sécuritaires que gestionnaires et protocolaires, dérives qui ont conduit à l’internement de force d’un militant politique dans l’Héraut le mois dernier.
Faut-il rappeler que les soins psychiques s’appuient sur la confiance, non sur la défiance, nécessitent du temps afin que la relation soit au cœur du processus de soin ? Il sera donc urgent après les élections présidentielles et législatives de remettre les soins psychiques dans leur ensemble au cœur du débat public.
La loi devant être réformée avant le 1er octobre 2013, l’ensemble des citoyens (usagers, professionnels, familles, élus) mobilisés par l’hospitalité faite à la folie doit peser de tout son poids pour obtenir l’abrogation de la loi du 5 juillet 2011 et que soient établies des pratiques dignes d’une démocratie.
Nous appelons toutes celles et ceux qui se sont mobilisés à nos côtés à confirmer leur engagement pour soutenir et créer des pratiques accueillantes et émancipatrices.
Le collectif des 39 contre la nuit sécuritaire