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Billet de blog 6 juin 2015

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http://www.decitre.fr/livres/quand-les-pylones-auront-des-feuilles-9791093554150.html

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Je me souviens des Philodendrons

Il est un mot que je déteste mais qui est pourtant de plus en plus usité : « incontournable ». C’est pourtant celui qui me vient lorsque j’évoque cet hôte trônant invariablement dans son pot Riviera format XXXL. Incontournable. On ne pouvait pas y échapper. Où qu’on aille, il était planté là, à un angle du salon avec ses feuilles en forme de mains aux doigts quasi-palmés, montant à l’assaut des plafonds, suivant le long des voûtes arrondies très à la mode à cette époque pour démarquer le coin- salon du coin-salle à manger. Il était l’alibi-Nature. LA plante.

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Illustration 1
© DR

Il est un mot que je déteste mais qui est pourtant de plus en plus usité : « incontournable ». C’est pourtant celui qui me vient lorsque j’évoque cet hôte trônant invariablement dans son pot Riviera format XXXL. Incontournable. On ne pouvait pas y échapper. Où qu’on aille, il était planté là, à un angle du salon avec ses feuilles en forme de mains aux doigts quasi-palmés, montant à l’assaut des plafonds, suivant le long des voûtes arrondies très à la mode à cette époque pour démarquer le coin- salon du coin-salle à manger. Il était l’alibi-Nature. LA plante.Le poumon vert. Le témoin qu’on n’était pas seulement des intellectuels coincés dans les concepts mais qu’on savait aussi vivre, respirer, apprécier la campagne…

Philodendrons de mes souvenirs, combien avez-vous absorbé de fumées de fins de repas, à combien de disputes politiques ou de scènes de familles du type tragédie grecque avez-vous assisté sans rien dire, jamais, sans trahir, sans bouger… Je vous plains. Je vous plains mais je ne vous regrette pas. Votre mode a passé comme a passé celle des Loulous de Poméranie, des couples de serins, l’un jaune, l’autre orange, pour bien qu’on les reconnaisse, des faux puits dans le jardin ou des Machucombos en fond sonore…

Illustration 2
© DR

Quand  le Bartissol® ou le Pastis 51®, accompagnés des ApériCubes®, et autres Crackitos® étaient finis, on passait au coin salle-manger où la table, sur une superbe nappe made-in-India ou brodée en Roumanie, était dressée : assiettes en vrais grès du Berry, verres en Cristal d’Arques®, couverts inoxydables…. En entrée, le fin du fin, à l’époque, c’était le « tout-nouveau-qu’on-ne-trouvait-pas-encore-partout ». Alors sprats en veux-tu en voilà, cœurs de palmier (depuis combien de temps n’en avez vous plus mangé ?) canapés  grassement tartinés de foie de morue avec un capitaine nordique , casquetté et barbu, sur la boîte… Puis venait le plat de résistance. Le chou farci était très tendance en raison de ses accents paysans (« On a fait tout simple, hein, ne vous attendez pas à un repas de gala ! ») Idem pour le pot-au-feu, le bœuf à la ficelle… Salade aux croûtons. Plateau de fromages classiques (Camembert, Sainte-Maure, Gruyère, Brie, ou parfois un Morbier moins habituel venait pointer le bout de son nez bleuté. Plus, bien sûr les Vache-Qui-Rit® pour les enfants.

Après tout ça, salade de fruits, jolie, gentille…  Et Parfaits-café ® tout droit sortis du congélateur flambant neuf pour les amateurs.

Illustration 3
© DR

Enfin pouvait commencer le clou de la soirée. Ce pour quoi on avait été invités. Et, on le savait bien, à quoi on ne pourrait pas échapper. D’aucuns s’allongeaient sur les killims fraîchement rapportés de Turquie. D’autres s’avachissaient sur les Saccos® dont les billes de polystyrène bruissaient. Ouf, on était fin prêts.  On éteignait les lumières. La projection diapos des vacances de l’été dernier pouvait commencer….

« Oh, regarde, Tonton Georges,  avec sa casquette qui lui est tombée sur le nez pendant qu’il dormait ! La tête que ça lui fait…. »

« Et Juliette, avec son coup de soleil…. »

« Karine, fais attention, ta tête dépasse ! »

Illustration 4
© DR

Philodendrons, il paraît que vous appartenez à la gigantesque famille des Araceae (des sortes d’Atrides ?), qui comprend plus de 700 espèces. Mais il paraît aussi que votre vrai nom est Monstera deliciosa.  Ça, je ne voudrais surtout pas vous vexer,  surtout que je sais bien que vous n’y êtes absolument pour rien, mais vous l’avez bien mérité (enfin pas tellement l’adjectif)…. Enfin dans mon souvenir !

Mais les souvenirs….

Illustration 5
© DR

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