De la maternelle, j’ai gardé quatre images. Celle d’un garçon, debout, nu dans un lavabo. Une réunion éducative avec toutes les maîtresses et nous, tous les mômes de l’école. Il avait de la merde jusqu’aux reins qu’une femme lui étala jusqu’en haut du dos. Une autre le lava au jet. Et la directrice nous dit que c’était ce qui arriverait à chacun d’entre nous si par malheur, on se chiait dessus.
La seconde est celle du père Noël de l’école. Un grand et gros type en rouge au fond d’une salle et les gosses qui lorgnaient tous les cadeaux étalés à ses pieds. Sans joli papier autour. On pouvait choisir. Enfin, je le croyais. Je voulais un tambour. Ma mère, elle, s’était arrêtée sur un chien jaunâtre, truffe noire et taches rouges, plus silencieux. Le père Noël lui donna raison et me glissa dans la main une mandarine et deux papillotes.
La troisième est la main de ma mère. Vengeresse. Me tirant par le bras, moi courant et trébuchant sur le chemin en petits cailloux grisâtres qui séparait notre quatrième étage, aile B, appartement 21, de ma déroute académique. Elle hurlant que j’étais une voleuse et moi, pleine de borborygmes larmoyants tenant roulé en boule dans ma main un collier. Des perles comme des agrafes, rouges, bleus et vertes. Elles s’accrochaient les unes aux autres. Le collier était très long. Il était pour elle. Ma mère. Je l’aimais encore.
La quatrième est une odeur. Celle du lait tiède que l’on nous obligeait à boire en fin d’après-midi. J’en détestais l’odeur douceâtre qui me donnait envie de vomir. Quatre heures était l’heure où je me planquais derrière les placards pour fuir ce devoir laiteux. Nous étions deux. Un petit garçon pour qui peut-être le lait tiède était aussi une abomination olfactive. (à suivre peut-être....)