Le guêpier1
Pas de noisettes pour les pigeons
(L’antimirage des chaumières)
Épopée2 à suspense
née de l’imagination de
Jean-Pierre Lamargot
1 « Endroit dangereux, situation complexe et délicate dont on arrive difficilement à sortir sans dommage. Synonymes : pétrin (familier), piège, souricière, traquenard. Donner, tomber dans un guêpier. »
« Ce n'est pas la peine de nous donner tant de mal pour tirer Albert du guêpier où il s'est fourré » (François de Curel, La nouvelle idole, 1899, I, 1, p. 163), selon Le Trésor de la Langue Française informatisé (cf. http://atilf.atilf.fr/)
2 Long poème ou récit « de style élevé » où la légende se mêle à l'histoire pour « célébrer un héros ou un grand fait ». On pourrait sans doute à bon droit aussi bien parler de prétérition (« figure par laquelle on attire l'attention sur une chose en déclarant n'en pas parler »)
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La bombe à neutrons de Constance Jurisprudette
Elle explosait le 7 octobre 2x14, en prenant la forme d’une lettre circulaire du Procureur, datée du 29 août 2x14 ( !...), adressée aux plaignants CLASsistes.
Cette lettre entendait débouter l’ensemble des victimes au motif qu’il aurait résulté « d'une jurisprudence constante de la chambre criminelle de la Cour de Cassation qu'à la suite d'une opération de fusion-absorption, la société absorbante (BECP en l'espèce) ne peut être tenue pour pénalement responsable d'une infraction commise antérieurement par la société absorbée (Squirrel en l'espèce) », affirmation qui appelait plusieurs commentaires :
- on se demandait d’abord comment le Parquet avait pu attendre si longtemps pour exciper de sa propre turpitude en fondant son argumentation sur un fait connu depuis 5 ans : la fusion de Squirrel et des Banques Communes était en effet officielle et effective depuis le 31 juillet 2xx9,
- on relevait que le Procureur reconnaissait « l’existence d’une pratique commerciale trompeuse pouvant être reprochée à l’organe central » en se référant aux conclusions du procès-verbal de la Répression des Fraudes daté du 10 mars 2x10,
- mais on restait stupéfait, sur le plan du Droit et de la Justice, par l’énormité de la dialectique invoquée pour faire croire aux épargnants qu’ils se mobilisaient en pure perte : « la société absorbante ne peut être tenue pour pénalement responsable d'une infraction commise antérieurement par la société absorbée »,
- autrement dit, si l’on approfondissait la portée de ce qui était donné en postulat, on y voyait la recette du procédé miracle qui permettrait aux escrocs et filous de tout poil de s’enrichir sur le dos de leurs victimes, à coup sûr et sans risquer le moindre déboire.
Une recette simplissime : 1) fondez une société, 2) commettez en son nom les pires infractions, malversations, mensonges, abus de confiance pour dépouiller vos clients… puis, 3) avant que le pot-aux-roses1 ne soit découvert, faites-vous absorber par une société complice.
Si l’on s’en tenait au raisonnement exposé par le Procureur, toute poursuite à votre encontre serait alors impossible et vous deviendriez instantanément inattaquable au regard de la Justice, pur comme neige et lavé de tout soupçon et le cas échéant de toutes vos fautes ! Pourquoi ne pas en profiter ?
Ce raisonnement, hélas, était d’autant plus spécieux et révoltant qu’il était en contradiction flagrante avec les articles 3 et 4 de la loi n° 2xx9-715 du 18 juin 2xx9 relative à la fusion des deux banques, loi aux termes de laquelle l’organe central de BECP se substituait de plein droit aux ex-organes centraux de Squirrel et des Banques Communes.
Selon cette loi, les droits et obligations des deux banques, découlant des contrats relatifs aux instruments financiers, étaient transférés au nouvel organe central, ce qui impliquait, par voie de conséquence, qu’il supportait pareillement les contentieux pouvant résulter de l’exécution de ces contrats.
Si l’une des deux anciennes banques était fautive pénalement d’infractions ou d’irrégularités commises avant la fusion, le nouvel organe central devait forcément hériter de la responsabilité pénale ; de la même façon que ce dernier n’accepterait pas de se dessaisir des droits dont bénéficiait l’ancienne banque du fait de l’application des mêmes contrats.
Le client serait-il fondé, de son côté, à ne pas respecter ses obligations vis-à-vis du nouvel organisme, au prétexte qu’il avait signé le contrat non pas avec celui-ci, mais avec un autre organe central qui, lui, avait disparu ?
Le Procureur étayait certes son argumentation en se référant à « une jurisprudence constante de la chambre criminelle de la Cour de Cassation ». Mais il ne citait cependant rigoureusement aucun exemple de cette supposée « constante » jurisprudence !...
Le nouvel organe central, en absorbant les deux banques, s’engageait à assurer la même qualité de services et à se substituer aux sociétés absorbées pour supporter à leur place les conséquences des fautes qu’elles auraient pu commettre, fautes désormais bien établies par les récents jugements en Cour d’Appel.
Le nouvel organe central était tenu d’assumer cette responsabilité. Il était en effet légitime que l’opération de fusion, réalisée à la seule initiative des sociétés impliquées et à laquelle le client était totalement étranger, soit d’une transparence absolue pour ce dernier.
En aucun cas elle ne devait se traduire par une discontinuité de la protection du client, défavorable à celui-ci.
Le CLAS allait donc poursuivre son action, toujours avec le même objectif : obtenir que la vérité soit établie et reconnue, et que les dommages subis par les souscripteurs soient indemnisés.
Prochain épisode : Chapitre 34 – Courant alternatif-phase 4
1 Par contraste avec celui de Perrette, ce poteau là n’était ni laid, ni noir