La Coordination nationale des quartiers populaires "Pas sans nous" a déjà publié dans le Club Médiapart plusieurs billets de jeunes, qui veulent s'imposer comme citoyens et acteurs de leur cadre de vie. La réponse intolérable, est une répression sournoise, multiforme. Au moment des Municipales 2020, cette voix doit être propagée. Les luttes sociales actuelles ont tout à gagner à s'ouvrir à ces forces nouvelles contre les dictats et les répressions. A la file de ce billet, je reproduis aussi celui de Tribune de Grenoble du 14 mars 2019. Michel-Lyon.
Nous, Coordination nationale Pas sans Nous, syndicat des quartiers populaires,
appelons à lutter contre la stigmatisation croissante des habitant.e.s des quartiers populaires et de leurs engagements militants et bénévoles, hier à Sarcelles et Roubaix, aujourd’hui à Angers avec les attaques qu’a subies notre camarade Djamel Blanchard, tête de liste aux municipales dans cette ville. Nous exprimons notre colère face aux formes de répressions à bas bruit.
Nous nous indignons contre toutes les formes de répressions, répétées et croissantes, que les habitant.e.s subissent quotidiennement : allant des violences policières aux stratégies de disqualification et de diabolisation des militant.e.s, de leurs discours, de leurs actions, de leurs engagements associatifs et politiques et de leurs méthodes de mobilisations citoyennes.
Les quartiers populaires ne sont pas des déserts politiques, ils sont des foyers d’actions et d’engagement qui encouragent l’auto-organisation et l’expression citoyenne.
Notre engagement politique est légitime, en tant que citoyen. Dès lors qu’il entend défendre des valeurs de justice, de solidarité, de lutte contre les discriminations ; qu’il vise à améliorer durablement les conditions de vie, qu’il s’agisse de rénovation urbaine, de maintien ou de réinstallation d’infrastructures et de services publics de santé, d’emploi ou d’écoles.
Depuis de nombreuses années, la Coordination nationale Pas sans Nous, au travers des Tables de quartier ou des Universités des quartiers populaires, a montré sa capacité à :
- analyser les problèmes structurels auxquels les habitant.e.s doivent faire face,
- prendre en charge les colères des habitant.e.s, pour mieux s’organiser, se mobiliser, et agir pour des actions collectives et concrètes,
- fédérer des acteurs.trices locaux, associations ou collectifs, ainsi que des personnalités publiques ou des chercheurs.ses afin d’appuyer les légitimes revendications des habitant.e.s des quartiers populaires.
Nous nous indignons de voir comment, dans la sphère politique et médiatique, les habitant.e.s sont stigmatisé.e.s, diffamé.e.s, décrit.e.s soit comme énervé.e.s, soit comme résigné.e.s, pire ; comme émeutier.ère.s, comme communautaristes, comme islamistes voire terroristes. En clair, les habitant.e.s ne sont jamais comme il faut, ils et elles sont diabolisé.e.s et criminalisé.e.s
Nous nous indignons des méthodes employées pour faire taire : attaques personnelles, rumeurs, diabolisation de figures locales, refus de salle ou retrait de locaux, baisse voire suppression des subventions, refus de rendez-vous, rétentions d’informations, remise en cause des savoirs des habitants.
Tout ceci affaiblit l’énergie et la légitimité à agir, ainsi que la difficulté à transférer et partager les savoir-faire militants. Pourtant nous nous refusons à la résignation et nous avons décidé d’agir pour lutter contre cette systématique confiscation de la parole des habitant.e.s.La répression dans les quartiers populaires n’est pas une sensation ou une rumeur, elle est bel et bien réelle.
En nous engageant et en continuant à faire un travail de plaidoyer et de négociation avec les pouvoirs publics, les institutions, les élus, nous assumons nos responsabilités. Qu’ils assument les leurs.
N’est-ce pas cela, au fond, la démocratie ? "
"Marqués par les révoltes sociales de 2005, nous sommes prêts, aujourd’hui plus que jamais, à assumer nos responsabilités. Encore faut-il que les jeunes des quartiers soient respectés et considérés comme l’avenir de notre République. Coordination nationale Pas sans Nous"
https://passansnous.org/qui-sommes-nous/
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Tribune d'Associations de Grenoble
Non, nos enfants et nos jeunes ne sont pas des « présumés délinquants » et ne sont pas des « indésirables ».
Nous, acteurs de la société civile, soutenons dans leur peine les familles des victimes, Adam Soli et Fatih Karakuss, ainsi que tous les jeunes et habitants du quartier de Mistral, et de tous les autres quartiers dits « populaires » et « prioritaires », suite au drame qui a eu lieu samedi 2 mars 2019.
Ce drame n’est pas le premier. Mais nous ferons en sorte que l’inadmissible ne se reproduise pas.
Nous rappelons à l’ensemble des institutions, préfecture et police nationale notamment, que nos enfants ne sont pas des « présumés délinquants », que les délits ne sont pas des crimes et doivent être traités comme tel.
Nous rappelons que nos enfants ont le droit d’être sur l’espace public en sûreté. L’État et la Direction Départementale de la Sécurité Publique doivent garantir ce droit sur l’ensemble des territoires. Personne ne devrait être jugé indésirable dans l’espace public.
Nous rappelons que ce qui est présenté comme des émeutes « urbaines », le saccages des biens et des services suivent toujours le décès de jeunes de ces quartiers, et sont le fruit d’une colère non canalisée face à l’inimaginable. Les contrôles abusifs et leurs suites souvent dramatiques ont des impacts réels sur la vie des habitants : atteinte à l’intégrité physique et psychologique des habitants ainsi que des dommages sur les biens publics. Nous y voyons les conséquences dramatiques au plan symbolique et financier de l’impact des contrôles abusifs, qui sont de la responsabilité de l’Etat et de la Direction de la sécurité publique.
Nous rappelons que cinq des sept conseils citoyens indépendants de la ville de Grenoble, instances de démocratie locale créés sous cette forme en 2015 suite à la loi Vaillant du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité pour travailler sur les problématiques des habitants et faire remonter auprès de tous les pouvoirs publics les préoccupations et les difficultés des citoyens, alertent le préfet, les Présidents des différentes collectivités locales (Métro et Conseil départemental) et le Maire de Grenoble sur les contrôles d’identité discriminants – violences récurrentes - sur le territoire de l’agglomération grenobloise depuis 2016.
Nous rappelons que, suite à la condamnation pour faute lourde de l’Etat en 2015 pour des contrôles abusifs et discriminants, la Commission nationale des droits de l’Homme a soumis des recommandations en 20161. Il est urgent que l’État s’y conforme et les mette en œuvre au niveau local et national.
Nous rappelons que l’ensemble des collectivités locales ont des responsabilités quant à la sécurité des mineurs et l’accès aux droits des habitants.
Nous souhaitons apporter tout notre soutien aux familles endeuillées et continuer à œuvrer afin de faire cesser les violences et les discriminations à l’encontre des habitants :
Nous rappelons qu’un numéro national a été mis en place afin d’apporter des renseignements sur les démarches à tenir en cas de contrôle, fouille et palpation qui leur semblerait abusif (06.83.60.58.27), et que ces contrôles abusifs sont bien souvent suivis de violences plus graves.
Nous rappelons que des associations sur le territoire, les conseils citoyens indépendants, le Défenseur des droits, des avocats, et des institutions locales peuvent être des relais pour faire valoir les droits des habitants et modifier les pratiques discriminatoires et violentes.
Nous invitons les institutions et administrations à faire cesser toutes les discriminations liées à l’apparence, à l’origine, aux types de résidence et d’habitat au sein de leurs structures, et à développer l’accès au droit des habitants.
Nous appelons les autorités à renforcer toutes les démarches améliorant la reprise du dialogue qui est interrompu depuis longtemps entre la police et les habitants ; les politiques des pouvoirs publics ont toutes leurs responsabilités dans le fossé que nous voyons de plus en plus se creuser entre nos services de police et les citoyens et qui ont des conséquences dramatiques.
Nous invitons enfin le Défenseur des droits à renforcer les moyens financiers et humains sur notre territoire sur les thématiques de la déontologie des professionnels de la sécurité afin de garantir à tous un égal accès au droit, et de lutter efficacement contre les discriminations.
Nous nous attacherons à suivre avec attention l'enquête indépendante dont nous attendons les conclusions afin que soient établis les circonstances et, la Vérité.
Nous réitérons nos sincères condoléances pour les familles endeuillées.
Le 6 mars 2019 à Grenoble
• Collectif C Nous
• L’union de quartier de Mistral (Cohamis)
• La délégation régionale Rhône-Alpes de la ligue des droits de l’homme La ligue des droits de l’homme – section Grenoble
• Le Forum social des quartiers populaires
• Le Conseil consultatif des Résident étrangers de Grenoble
• Les Fleurs d’Aurore
• Horizons Femmes
• Pas sans Nous
Contacts : groupeagglo.controleaufacies@gmail.com - 06.69.11.95.72
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1 Avis sur la prévention des pratiques discriminatoires et/ou abusives (2016) https://www.cncdh.fr/sites/default/files/161108_avis_pratiques_des_controles_didentite_format_a5.pdf