Nids de crotales … B2
« Quand la mauvaise foi devient coutume ». Une explication vaudrait mieux… :
L’étymologie sème la zizanie dans les définitions. Aussi ne quittons pas des yeux les garde- fous naturels que sont l’Histoire et la Loi.
Dans un ouvrage consacré au processus de laïcisation, Georges Weil (2004 [1925] :398) situe l’arrière- fond culturel du « pacte laïque » : un « idéal » dont les adeptes provenaient d’un large spectre de la population allant des « libres- penseurs matérialistes à certains catholiques, en passant par des spiritualistes, des déistes, des juifs, des protestants, (…) qui croyaient « à l’existence d’une morale naturelle, accessible à tous les hommes puisqu’ils sont tous doués de raison . Cette morale enseigne le respect de la personne (…) le respect de la science, l’admiration pour ses conquêtes [et] l’espoir [en son devenir], [elle enseigne] enfin l’amour de l’Humanité, la confiance en ses progrès, le désir d’y contribuer (…) »
Tout comme la loi Ferry (qui laïcisa l’école publique), la loi du 09 décembre 1905, « dogme fondamental » de la laïcité, ne comporte pas le terme « laïcité ». «Significativement on trouve, cependant, ce vocable dans le chapitre du rapport d’Aristide Briand [1905 : 175,220] consacré aux législations étrangères ».
La chose apparaissait, à cette époque, plus importante que le mot.
Aujourd’hui, le contraire s’est imposé : pour la doxologie contemporaine (martelée par les médias) le mot laïcité, déconnecté de la loi qui le sous-tend, se suffit à lui-même.
Un examen de la situation, sous l’éclairage de la loi, de la constitution et de l’histoire, mène au constat amer selon lequel le mot laïcité est, aujourd’hui, l’otage de ses pires ennemis. En réalité, ces derniers en appellent à la « laïcité » à longueur de journée mais pour mieux la violer.
Par ailleurs. Selon les conclusions d’Aristide Briand la laïcité/ séparation des Églises et de l’État, n’est en rien une exception française, contrairement à ce qui nous est seriné depuis des dizaines d’années. En effet, l’homme qui l’avait accouchée dans la douleur, en slalomant entre les susceptibilités (un euphémisme…) écrit dans son rapport consacré « aux législations étrangères » : « en réalité, c’est là que tend la politique de toutes les nations civilisées » (…). Une perspective évolutionniste de marche en avant de l’humanité sous-tend une conception inclusive de la liberté de conscience » [1] Jean Baubérot et Dorra Mameri-Chaambi, La loi de 1905 n’aura pas lieu, tome III, ed. De la maison des sciences de l’homme. P. 336.
Dans ledit rapport Briand, consacré « aux législations étrangères », on trouve, en outre, sept occurrences du terme « laïcité » et quatorze d’autres mots de la même famille sémantique (« laïcisation », « laïque », « laïciser »). Pas moins.
Le quiproquo résultant se révèle, aujourd’hui, une aubaine pour les rhétoriciens inconséquents de toutes les obédiences (cultuelles, politiques ou philosophiques) .Il constitue un impedimenta nuisant désastreusement à la cohésion nationale.
Passons le tout aux filtres de la loi, de la Constitution et du bon sens, façon pères-de-famille responsables.
Un éclairage sur la scène du crime.
Le laïc est pour les religieux le servant qui n’appartient pas au clergé constitué.
Le mot laïc est également le « géniteur » des mots laïcité et laïcisme ; lesquels figurent les « Caïn et Abel » du républicanisme et n’ont en commun que la haine qui les sépare.
Laïcistes : c’était, initialement, ces « civils » qui aspiraient à régenter telle religion ou telle autre. Bien des trublions se sont illustrés dans cet exercice : d’aucuns entendaient court-circuiter l’action de la hiérarchie catholique, d’autres voulaient en imposer à l’Anglicanisme. La Réforme, non plus, n’échappa pas aux tracasseries des siens.
Aujourd’hui, le mot laïcisme (forgé sur le modèle islamisme, catholicisme, judaïsme, communisme, etc…), désigne également une manière de « religion profane », qui compte parmi ses adeptes bien des Savonarole fanatiques et intransigeants, à l’anticléricalisme militant, corrosif et vindicatif ; il est illustré par la mouvance Printemps Républicain .
Hier, le laïcisme/anticléricalisme était sous-tendu par une loi. Votée en 1791, elle fut abrogée, dès 1795, eu égard aux effarants massacres de masse qu’elle entraîna [2] Javogue et les autres.
Depuis, il s’impose régulièrement à la Nation, au gré des intérêts de tel lobby ou tel autre - en toute illégalité.
Le laïcisme/cléricalisme, « prurigineux », ressortit, au détour de nombreuses crises que la France a essuyées. Il fut vaincu par la République en 1795, en 1848, en 1905 et en 1955. Il revint, après 1979, « en tête de gondole du supermarché » audiovisuel français, dans le sillage de la révolution khomeyniste d’Iran, son alibi. La propagande-fleuve « brodée » autour du foulard des adolescentes du collège de Creil, en 1989, le porta au zénith. Depuis, il plane sur nos vies comme un oiseau funeste.
Aujourd’hui - prouesse insigne - en ne s’attaquant qu’à l’islamisme, une aberration politique parasitant la religion musulmane, l’associationnisme du Printemps Républicain (fer de lance du laïcisme/anticléricalisme contemporain) parvient à compromettre « La » Religion (au sens générique du terme) et, dans le même geste, son ennemi principal : le Catholicisme, majoritaire, qui lui barre la route et qu’il a renoncé à attaquer de front.
Nota : Rappelons aux égarés qui ont aliéné leur sens critique (et à ceux qui ont oublié leur adolescence) que la loi du 09 déc.1905 (avant d’être instrumentalisée, depuis 1989, dans les safaris scolaires contre des pucelles en proie à la puberté) avait servi (mission autrement plus adulte et citoyenne) à séparer l’État de l’entité Église Catholique [3]. L’idée était de libérer l’État de l’étreinte de l’Église Catholique (et de son Clergé) et de lui barrer, sinon définitivement, du moins durablement, le chemin de retour vers le statut de religion d’État - position qu’elle avait occupée durant l’Ancien Régime et ce depuis Clovis.
Ce chef-d’œuvre de télescopage sémantique de nos contemporains a néanmoins un coût exorbitant : notre citoyenneté, notre École publique, notre laïcité, notre Constitution sont souillées, bafouées, saccagées …Nous reviendrons sur chacun de ces points, preuves à l’appui.
Les lobbies des intérêts particularistes, qui agitent le laïcisme/anticléricalisme, ont pris l’ascendant sur notre démocratie. Par le biais de campagnes surmédiatisées perlées, ils sont à même de faire et de défaire les carrières de ceux (hommes et femmes) qui aspirent aux succès médiatique, culturel ou politique ou, du moins, de le faire accroire ex-cathedra .Leur chantage marche, pour le moment …
Le mot Laïcité, lui non plus, n’est pas épargné.
Le mot Laïcité désigne pourtant un principe républicain (sous-tendu par la loi du 09 déc. 1905) mis sous la protection directe de la Constitution ; il y est inscrit dans le Préambule et, de ce fait, hissé au rang des valeurs cardinales de la République Française.
« Sauf à devenir chèvres », ou plutôt « moutons de panurge », comment pourrions-nous nous persuader qu’une loi, (telle que la « malheureuse » loi du 09 déc. 1905 ) qui a filtré au travers des percolateurs constitutionnels et que le code de procédure affirme d’interprétation stricte ( à l’instar , du reste, de toutes les lois françaises :changer un mot revient à frelater la loi) , comment donc une telle loi peut-elle demeurer- aussi longtemps et aussi impunément - en butte à un salmigondis d’interprétations qui permettent à tel effronté ou tel autre de venir nous soutenir crânement une chose et son contraire, au gré des besoins de la propagande du moment du lobby dominant ?
Quand une loi est inscrite au préambule de notre Constitution (comme c’est le cas de la loi du 09 décembre 1905), elle est pour ainsi dire « sanctuarisée »: on « n’y touche plus » que très difficilement et seulement après que les gardiens du temple républicain ont bien voulu faire leur travail qui est de saisir le Conseil Constitutionnel.
Pourtant…Voilà 36 ans qu’on la dilate, qu’on l’étire, qu’on la biaise.
Comment en sommes-nous arrivés à une telle dérision ?
La République s’était pourtant pourvue de tous les garde-fous à même de lui permettre d’être maîtresse dans « ses communs », dans « sa cuisine », dans « son boudoir ».
- Elle ne se reconnaît pas de religion d’État. De par le principe de laïcité, elle a imposé la séparation des Églises et de l’État. Elle a, en outre, institué, sans équivoque, la primauté du pouvoir temporel sur le pouvoir spirituel.
- Elle a proclamé l’égalité des citoyens en Droits et en Devoirs : la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres [4] de la liberté
- Elle s’est, constitutionnellement, située à égale distance entre les credo de ses citoyens, quelles qu’en soient les obédiences religieuses, philosophiques ou politiques.
Or, que constatons-nous, aujourd’hui ? Lovés çà et là, au creux des méandres de notre démocratie, oublieux de leur déontologie, des médias et des politiciens, mercenaires du verbe et de la plume, foulent l’égalité citoyenne aux pieds et désignent à la colère de l’opinion( qu’ils ont préalablement chauffé à blanc) , encore et toujours, le même bouc émissaire : la minorité nationale musulmane, piégée à son corps défendant entre Charybde et Scylla, l’islamisme/ laïcisme d’un côté et de l’autre, les remugles d’une histoire franco-algérienne particulièrement viciée.
Honte à vous qui ulcérez de vos banderilles de haine le cœur de ces petits Français assignés à résidence dans les ghettos de votre inconséquence. Honte à la France qui les abandonne à votre sadisme : ils sont français même s’ils sont d’extraction musulmane et que leurs prénoms musulmans, à eux seuls, suffisent à ulcérer profondément le fondement de certains tristes oublieux. N’est-ce pas, M. Zemmour Éric [5] sur les prénoms.
L’islamisme, le sionisme et le laïcisme, (les quatre « mousquetaires » du malheur français contemporain, en n’oubliant pas son « d’Artagnan » : l’immodestie) sont les politiques qui parasitent et instrumentalisent, respectivement, l’Islam, la religion juive, et le principe de laïcité.
La laïcité a, en outre, l’insigne privilège d’attirer sur ses arrières les spécimens les plus excités de ces trois fléaux.
Sauf à donner dans l’iniquité et à violer la Constitution dans les valeurs cardinales qu’elle proclame, on combat la politique avec les armes de la politique. Laissons les religions à leurs adeptes : la liberté de conscience, inscrite dans le marbre constitutionnel, l’exige.
Sur le sol français, ces trois politiques, expansées à outrance par notre appareil médiatique, attisent la haine des uns et des autres, au bénéfice de lobbies d’intérêts particularistes faiseurs d’opinions. Pour qui roulent-ils ? D’évidence, pas pour la France.
[1] Jean Baubérot et Dorra Mameri-Chaambi, La loi de 1905 n’aura pas lieu, tome III, ed. De la maison des sciences de l’homme. P. 336.
[2] Javogue et les autres
[3] séparer l’État de l’entité Église Catholique
[4] de la liberté
[5] Zemmour Éric sur les prénoms