La dernière polémique suscitée par Nicolas Sarkozy, intimant à tous les Français d’oublier leurs histoires pour ne se reconnaître que des ancêtres Gaulois, a provoqué une série de billets dans le Club, dont un qu’il ne fallait pas louper : celui de l’historien de l’éducation Claude Lelièvre, intitulé « Nos ancêtres les Gaulois ! Le contresens » où il rappelle entre autres que « Les Gaulois sont moins nos ancêtres à suivre que la figure des ''barbares'' que nous ne sommes plus, que nous ne devons plus être ».
Un billet très lu, mais peu commenté, les abonnés de Mediapart semblant s'être donné le mot pour ne pas tomber dans le piège médiatique tendu par le candidat à la primaire des Républicains.
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Il est pas frais mon poisson ?!
Mais comme annoncé au début du billet, cet hebdo du Club se penchera surtout sur LE grand débat des contributeurs de Mediapart : l’islamophobie et le racisme anti-arabes.
Trois billets ont cristallisé cette attention depuis une semaine.
- Le 15 septembre, l’essayiste et ancien avocat Guillaume Weill Raynal, titrait un billet : « Oui, l’islamophobie actuelle ressemble à l’antisémitisme des années 30 ». Il y explique que « le discours islamophobe qui gagne chaque jour un peu plus de terrain ressemble en tous points aux théories antisémites qui fleurissaient en France dans les années 30 : il repose sur une base largement fantasmatique (l’islam se caractérisant avant tout par sa diversité) à laquelle une construction savante donne les apparences de la vérité et de l’évidence (en ne s’appuyant que sur des miettes de réalités) ». Dans sa démonstration, Weill Raynal fait référence à l’ouvrage d’Adrien Candiard dont le titre est on ne plus parlant Comprendre l’Islam… ou pourquoi, on n’y comprend rien. « On y apprend que le Coran ne propose en réalité aucune explication du monde ni aucun modèle de société. C'est un livre « incompréhensible » pour la rationalité occidentale, que les musulmans du monde entier « lisent comme de la poésie » et qui n’a pour seule fonction que de « rendre Dieu présent » sans qu’il soit forcément nécessaire de comprendre sa parole. La violence extrême qui déchire aujourd'hui une partie du monde musulman ne trouve pas son origine dans ce livre, mais dans un contexte géopolitique vieux de cent ans, dans lequel les Occidentaux portent d’ailleurs leur part de responsabilité. »
Ce billet a été intensément lu depuis sept jours, recommandé et surtout discuté, avec près de 500 commentaires ! Comme c’est souvent le cas dans les fils polémiques, il y a eu de nombreuses déviations par rapport au thème du billet. En l’occurrence, ici, ce sont les prises de position du journaliste algérien Kamel Daoud sur les viols du nouvel an à Cologne qui ont été les plus discutés. Daoud à part, le fond de la discussion a porté sur la légitimité de la comparaison avec l’antisémitisme des années 30 et sur la figure honnie du wahhabite, la plus facile à détester...
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- Le deuxième billet autour de ce thème, date du 20 septembre : « Retour sur l’enquête de l’Institut Montaigne : l’islam de France est possible ». BLAZ y commente certains résultats de l'enquête et surtout interroge le bien-fondé de sa méthodologie. « L’Institut Montaigne use d’un échantillon représentatif d’à peu près 15.000 individus duquel elle extrait une grappe de 1.029 individus, parmi lesquels 874 se définissent comme musulmans. ». Les 155 autres, non musulmanes, ayant au moins un parent d’ascendance musulmane… Les questions soulevées par la méthodologie a inspiré, à juste titre, de nombreux commentaires, glissants sans phare ni balise des musulmans, vers les immigrés, les sans-papiers, les Arabes de France et d’ailleurs. Sans que personne puisse avoir le dernier mot. Mais quand les mots sont aussi gazeux (derrière le terme musulman il y a un paquet d'inconnus !), est-ce vraiment un objectif raisonnable ? A moins que la polémique ne soit le véritable objet du débat...
- Le troisième billet, signé BEN, un ancien abonné de retour au Club, composé principalement d’une vidéo d’Oumma.com « Paroles de femmes musulmanes » a suscité une telle joute que l’auteur a fini par fermer son fil de commentaires. Que voulait montrer Ben en diffusant cette vidéo ? « Que l’on porte le foulard ou non, que l’on soit pratiquante ou non, que l’on soit lycéenne ou ménagère personne n’est épargné, comme le montre ce reportage réalisé par Chris Den Hond, Nadia Rabhi et Alain Gresh, avec le soutien d’Amnesty International. » Mais le message a eu du mal à passer, la visibilité jugée outrancière de certains(e)s musulman(e)s continue de masquer tout autre considération, pire encore, toute empathie pour les victimes de « la musulmanie ».
Alors il est pas frais mon poisson ?!
En attendant, comme l’a fort bien détaillé Yves Faucoup, dans son billet, fort apprécié du Club, du 16 juillet, « La guerre anti-pauvres aura bien lieu ». « Alors que la pauvreté s'accroît dans notre pays, que de plus en plus de citoyens retardent leurs soins ou y renoncent faute d'argent, des leaders politiques, à la proximité des échéances électorales, surfent non seulement sur la xénophobie et le racisme tout court, mais aussi sur le racisme social. En bégayant sans cesse leur aversion à l'encontre des "assistés". »
Antonio, à l’aide !
Pour ne pas finir sur une note si désespérée, paraphrasons Antonio Gramsci, et soyons pessimiste avec l’intelligence, mais optimiste par la volonté. Le Club est foisonnant d’idées et de projets (encore merci à vous !) et je vous invite à retenir deux rendez-vous :
- Nous avons lancé lundi dernier dans le Club, une nouvelle édition baptisée Les controverses sur « Un Village français». Cette initiative s'inscrit dans le projet scientifique ANR Epistémè qui a débuté en 2014 sous la direction de l'IRI (Institut de Recherche et d'Innovation) avec l'Université Paris 1 (Centre d'histoire sociale du XXe siècle) et dont Mediapart est partenaire. L'un des volets de ce projet est l'analyse à partir d'extraits choisis de la série télévisée « Un village français », chronique d’une sous-préfecture imaginaire sous l’Occupation, diffusée sur France 3 depuis 2009, qui entame cet automne sa septième et ultime saison. Après la présentation du projet avec l’historien Denis Peschanski et le philosophe Bernard Stiegler, la première controverse sur la mémoire de la Seconde Guerre mondiale sera lancée ce mercredi 28 septembre et vous proposera un entretien croisé entre Henry Rousso et Pierre Laborie, dirigé par Sébastien Ledoux.
- Pour faire un break avec les polémiques et controverses, notez dans vos agendas, la Game Jam des 7, 8 et 9 octobre. Des journalistes de Mediapart (j’en fais partie !), des développeurs, des graphistes, des créateurs de jeux vidéo, des étudiants vont se réunir dans les locaux du journal pour créer en direct des jeux vidéo politiques « engagés et citoyens pour ouvrir de nouvelles pistes et briser les codes ». Il y aura des restitutions en direct. Le journaliste Laurent Checola qui coordonne cette belle aventure, a promis cinq billets (2 d'entre eux sont déjà en ligne) pour nous faire entrer progressivement dans le monde des jeux vidéo intelligents.