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L'islam et l'Occident

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Billet de blog 20 décembre 2017

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IBN KHALDOUN L'INVENTEUR DE LA SOCIOLOGIE

Ibn Khaldun, L'inventeur de la sociologie, note Pierre Lepape, Monde Diplomatique, janvier 2003, p.31. cf. Le Livre des exemples, tome 1: Autobiographie et Muqaddima, Paris, Pléiade, 2000, 1622 p. "Sache que l'examen d'un tel objet est une entreprise totalement neuve, se plaçant à un point de vue inaccoutumé et qu'il est, en plus, de grande utilité. (..) C'est une science qui vient de naître."

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Que l'œuvre d'un très grand historien soit apparue, tel un joyau au sein de la culture musulmane médiévale, où l'histoire tenait une place exceptionnellement grande dans la littérature comme dans la vie sociale, voilà qui nous est apparu relativement normal. (...)

La clairvoyance scientifique d'Inn Khaldun résulte d'une contradiction entre un rationalisme rigoureux et une forte réaction mystique. (...) 

Ibn Khaldun est la preuve que le rationalisme n'était pas encore étouffé au XIVe siècle. 

Ces deux tendances antagonistes, la rationaliste et ma mystique ont pris l'une et l'autre au Maghreb desgoes plus poussées qu'ailleurs;

Ibn Rochd (Averroès) qui a vécu de longues années au Maroc, où il est mort, est le dernier des grands philosophes arabes rationalistes 

et c'est aussi celui dont le rationalisme a été le plus loin. 

Son influence s'est fait longtemps sentir sur des penseurs marocains,

Abdelli, un des maîtres d'Ibn Khaldoun a été l'un de ses disciples. 

En revanche, la réaction religieuse fut particulièrement forte en Afrique du Nord où s'établit le malékisme,

l'une des formes les plus austères et le plus rigides de l'Islam. 

Ces caractères particuliers du Maghreb et de son histoire ont favorisé la formation de la pensée d'Ibn Khaldoun. 

Cependant, pour expliquer l'œuvre extraordinaire que sont les Prolégomènes il faut ajouter des causes tout à fait particulières qui sont venues s'ajouter à ces facteurs généraux qui apparaissent nécessaires mais non suffisants.

Elles tiennent sans doute à la personnalité d'Ibn Khaldoun. 

En effet, d'autres historiens ont, eux aussi, pris pour thème le passé de l'Afrique du Nord; ils en ont raconté les épisodes. 

Mais aucun d'eux, semble-t-il, ne s'est posé les problèmes essentiels qu'a envisagé Ibn Khaldoun;

auxun d'entre n'est parvenu à sa conception de l'Histoire. 

Non seulement l'auteur des Prolégomènes ne semble pas avoir eu de devancier,

mais, fait encore plus significatif,

malgré la notoriété de son œuvre il n'a guère de successeur.

Pour parvenir au XIV siècle à élaborer cette conception de l'Histoire,

il fallait un esprit tout à fait exceptionnel, tant par la valeur de son intelligence que par ses structures mentales.

Ibn Khaldoun est à la fois un croyant orthodoxe et mystique et un très grand penseur rationnaliste; il apparaît ainsi comme une sorte de miracle. 

À une époque où la réaction religieuse était triomphante depuis plus d'un siècle,

il a pu recueillir  l'héritage du mouvement rationaliste qui, refoulé en tant que philosophie,

restait encore suffisamment vivace pour servir de guide à l'observation empirique. 

Personnage exceptionnel en regard de son temps, Ibn Khaldoun l'est aussi en regard du nôtre, bien que sa conception de l'Histoire nous apparaisse fort moderne. (...)

Mais encore fallait-il, pour que la pensée scientifique d'Ibn Khaldoun puisse se développer, que la réaction mystique ne l'emporte pas sur une attitude fondamentalement rationaliste,

et que son désir de comprendre soit assez puissant pour ne être étouffé par un obscurantiste fataliste. 

La Naissance de la conception khaldounienne des l'Histoire correspond donc à un certain état de la contradiction entre le rationalisme et la religion

et à un moment précis de l'évolution intellectuelle d'ibn Khaldoun.

Bien que favorisée par l'ambiance historienne qui régnait au sein du monde musulman,

et bien que suscitée par les particularités de la situation du Maghreb médiéval,

l'apparition des Prolégomènes correspond à une conjoncture éphémère:

celle où un homme d'exceptionnelle valeur fut dans une disposition d'esprit telle que son érudition de savant et ses expériences d'homme d'État et d'homme de guerre puissent être généralisés,

sans préoccupation métaphysique,

afin d'aboutir à une compréhension proprement scientifique de son temps. 

La pensée historienne d'Ibn Khaldoun, le dernier des très grands penseurs de la civilisation arabe du Moyen Âge,

apparaît comme le fruit supérieur,  

exceptionnellement mûri, 

d'un arbre dont la plupart des branches étaient déjà mortes et dont la croissance allait s'interrompre pour plusieurs siècles.

Ibn Khaldoun Naissance de l'Histoire Passé du tiers monde, Yves Lacoste, La Découverte/Poche, 1998. 

Choix, découpage, notes en cours, E'M.C.?

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