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Ce vendredi 1er février, le Rapport Pour une Commission Vérité et Réconciliation sur les "Homes" indiens de Guyane, dénommé en hommage posthume, Rapport Alexis TIOUKA, est rendu publique à l'Assemblée Nationale et accessible à tou(te)s dans sa version intégrale téléchargeable en ligne, ici*, ainsi que l'Appel à la pétition à signer et à relayer largement. Une exposition de photographies des martyrs Kalin'a T+ Leuyu exposés-déshumanisés à Paris en 1882 et 1892 empruntées au Musée du Quai Branly (collection d'Edouard Bonaparte) est également présentée par l'Association Moliko (1) Alet+Po qui souhaite résolument mettre un terme au calvaire de leur mémoire en se battant pour le retour de leurs ossuaires à Iñonoli koté yé lonbri planté.
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Le Programme :
- Ouverture par Jean-Victor Castor, député de la 1ère circonscription de Guyane
- Présentation de l’Association Moliko Alet+Po par Corinne Toka Devilliers
- Les Hommes Indiens de Guyane, présentation par Hélène Ferrarini, autrice d’Allons Enfants de la Guyane" (Anarchasis, 2022)
- Récit du projet, par Magalie Besse, directrice de l’IFJD
- Principales conclusions du Rapport, par Jean Pierre Massias, président de l'IFJD
- + L'intégralité de l'événement en vidéo YouTube ci-dessous :
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Un auditoire de plus 250 personnes répond à l'invitation du groupe parlementaire Gauche Démocrate et Républicaine (GDR) de Monsieur le député Jean-Victor Castor et de Monsieur Jean-Pierre Massias président de l’Institut Francophone pour la Justice et la Démocratie (IFJD)
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"Sur le chemin d'une décolonisation, si au fil du temps les amérindiens de Guyane ont mis en place un mouvement important de travail et de proposition, tel le Pacte fondateur, le droit rond et communs, une suggestion émerge dans le sens d'une réparation de la mémoire collective ou la mise en place d'une Commission "Vérité et Réconciliation", comme c'est le cas au Canada, qui a pour but la reconnaissance des violences coloniales et postcoloniales tout autant". Tusi Alexis TIOUKA In Les séparatismes : Source de la colonisation française II. 18.02.2023
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OUVERTURE par le député Jean -Victor CASTOR :
" Bonsoir tout le monde, je suis vraiment désolé pour le retard, vous avez bien compris qu'on a une contingence qu'on avait pas prévue par rapport aux manifestations, il y a des check points, il a fallu en faire le tour, et voilà j'ai du faire la tournée des popotes pour essayer de régler le problème...
tout d'abord, merci d'être venus aussi nombreux, nous avions 220 personnes inscrites en dehors des parlementaires (présence du sénateur de la Kanaky-Nouvelle Calédonie M Robert WIENIE XOWIE) et des collaborateurs. C'est donc avec une grande satisfaction qu'on se retrouve sur un sujet très important concernant la Guyane, mais plus généralement les questions autochtones. Mesdames, messieurs les représentants des nations autochtone de Guyane, merci d'être présents. M Éric LOUIS, M Alexandre SOMMER, Mme Clarisse DA SILVA, Mme Corinne DEVILLIERS présidente de l'association Moliko, Mayapoli merci aussi d'être présente. M Jonas MISSAYE, Mesdames Messieurs de l'Institut Louis Joinet (2), M le professeur Jean-pierre MASSIAS, Mme Magalie BESSE, Mme Leslie CLAUDE, Mme Catherine SAVARD, Mme Julia BASTARD, M Romain LIGNIERES, Mmes, Mss, collègues députés, sénateur, collaborateurs, chers invités en vos grades et qualités...
Il y a des combats qui, en plus d'être justes et légitimes, sont des préalables à tous les autres. Le combat de la reconnaissance des nations autochtones de Guyane est de ceux-là. Il s'agit pour moi d'une conviction de très longue date, portée par mon parti politique le Mouvement de Décolonisation et d'Émancipation Sociale, le MDES, de la Guyane.
Car de toutes les victimes du fait colonial, les populations dites amérindiennes, mais le terme autochtones est le plus adéquat, ont été les premières victimes de la colonisation. Premières victimes de ce processus d'acculturation visant à détruire la langue, la culture, la spiritualité de l'autre, une démarche visant à nier les droits et coutume de l'autre, à bafouer son organisation sociale et à voler sa terre.
Processus mené par l'état aidé comme ce fut le cas pour les Homes en Guyane par l'église, mais aussi ailleurs. La volonté coloniale de minoriser les peuples autochtones est une injustice indéniable qui à titre personnel m'a très tôt conduit à écouter les autochtones, à me former sur cette question, à chercher à comprendre. La volonté de mettre les méfaits de la colonisation n'est pas nouvelle, c'est désormais un mouvement international. Néanmoins, en France, le sujet est encore tabou, et crispe. Mon rôle de parlementaire est aussi d'aider à aborder la question sur tous ses aspects car les aspects sont multiples, que l'on soit au Canada en Australie ou en France, qu'il s'agisse des enfants réunionnais de la Creuse, des exhibés dans les zoos humais entre 1882 et 1892, ou des Homes indiens la logique est la même : couper l'autre de toutes ses racines pour le "civiliser".
Et contrairement à ce que l'on veut trop souvent laisser penser, cette histoire, ces histoires ne remontent pas si loin et l'on doit aux victimes la vérité. car c'est là un autre aspect du processus colonial ; par honte, par crainte, les histoires sont tues. Les anciens pensionnaires des Homes doivent pouvoir parler, et l'on doit pouvoir les écouter. Les descendants de Moliko ont le droit de connaitre l'histoire de leurs aïeux, les descendants des exhibés ont le droit de récupérer le corps de leur proche. C'est tout le combat de Corinne DEVILLIERS et son association, et je vous invite à la fin de notre colloque à découvrir l'exposition-photo : "De l'anonymat à je suis". En recueillant quelques témoignages jusqu'ici oraux d'anciens pensionnaires des Homes indiens, Hélène FERRARINI accompagnée d'Alexis TIOUKA ont posé les premiers jalons. Le travail exploratoire réalisé par l'Institut Louis JOINET qui nous sera présenté ce soir est un premier pas. un pas vers la vérité. Une vérité qui, par les autochtones, s'élargit à toute la la population Guyane, je soutien donc la démarche, et veillerai à ce les premiers acteurs de ce processus soient les communautés et nations autochtones impactées. La démarche est initiée, elle sera peut-être longue, mais elle aboutira ; vers la vérité, la réconciliation et peut-être vers une certaine forme de réparation.
Association MOL IKO ALET+. Mme Corinne TOKA DEVILLIERS :
- "Bonsoir à vous tous, excusez moi pour la voix : la pollution parisienne...
Je ne serai pas très longue, je vais juste vous conter une histoire, une histoire douloureuse de 47 Kalina T+Leuyuqui furent exhibés en date : en 1882 et 1892 comme des animaux dans un jardin d'acclimatation qui est aujourd'hui un parc d'attraction où sont des cadavres d'enfants, un ancien cimetière. cet endroit, est un endroit, pour nous les Kalina, l'endroit du cauchemar où ont été exhibés nos aïeux. Ma grand-mère qui s'appelle Pipimolko fait partie de ces personnes. La première fois que nous avons fait cette démarche de retracer cette histoire grâce au documentaire "Sauvages au cœur des os humains", comme quoi tous les documentaires ne sont pas, ...nuls... on va dire...
Eh bien la première chose que nous avons fait, c'était faire une convention avec le musée du Quai Branly, et voir les fonds précieux des photographies. Mon premier choc... Pas de noms.... Mais qui sont ces personnes ?...
Mais... elle ressemble à ma grand-mère..., Mais il ressemble à mon neveu... Mais qui sont ces gens ?... Ils n'ont pas de nom...
Avec la collaboration de Carine Peltier CAROFF que je remercie, qui est d'ailleurs dans la salle, nous avons fait un travail de huit mois acharnés, avec les documents que nous avions, et que je remercie humblement mon ami Gérard COLLOMB ici présent, de tous les documents qu'il m'a restitués, de ce fabuleux travail qu'il avait fait il y a une trentaine d'années avec Félix TIOUKA, les renseignements que nous avions du musée Quai Branly, et surtout, surtout l'acharnement sur le terrain en Guyane. Que ce soit sur le fleuve Maroni, coté français, ou coté Suriname, nous avons cherché des descendants des ALET+PO pour nous trouver des témoignages, pour nous trouver des noms. Nous avions une liste, l'unique, malheureusement qui nous disait ces personnes s'appellent... c'était européanisé... nous avons pu, sur les 33 noms, trouver quelques noms Kalina.
Quand nous avons commencé à faire ce travail, ça a été un travail intense avec plein de signes, et aujourd'hui, en huit mois d'acharnement nous avons pu trouver ces personnes, c'étaient des sauvages, c'étaient des simples objets je dirai même parmi les animaux, on a voulu les évincés, et aujourd'hui ils sont à l'assemblée nationale, un bâtiment de l'état... Et aujourd'hui, ils sont, je suis, j'existe.
Aujourd'hui, c'est JE SUIS TAKOUMI !... JE SUIS MOLKO !... Ces personnes qu'on a voulu évincer, vivent, ont retrouvé leur dignité, ont retrouvé leur nom, et pour compléter ce travail, au mois d'août cet été en Guyane, ce sera une première, nous allons faire un mémorial en hommage de ces 47 exhibés, avec deux stèles représentant deux femmes fortes de l'Histoire des Os humains : Une PIPI de 1882, et mon aïeule MOLIKO de 1892. Aujourd'hui nous marquons cette Histoire, nous les descendants, nous ne lâcherons rien, nous avons retrouvé récemment nos morts, ils sont au musée de l'Homme, nous ferons ce qu'il faut pour que nos morts reviennent au pays. Ce sont des individus, ce sont des personnes, je ne comprends pas, et nous ne comprenons pas qu'on puisse les garder depuis 131 ans dans un musée, oubliés de tous !...
Nous le peuple Kalina T+LEUYU, nous réclamons nos morts, et nous ferons ce qu'il faut !... Merci" .
Hommage à Tusi Alexis TIOUKA :
JVC : "Vous avez compris, donc l'émotion, alors désolé, mais il y aura un deuxième moment d'émotion, car on va passer au moment de l'hommage à Tusi Alexis TIOUKA (Awala 1959- Montpellier 04.12.2023. Ndlr) qui était un personnage, autochtone guyanais, avec une personnalité forte, déterminé à faire reconnaitre les droits des peuples autochtones, déterminé à ce qu'il y ait un destin commun aussi en Guyane avec toutes les autres populations, il a écrit, il a travaillé sur les questions juridiques autant qu'il a pu travaillé sur les questions politiques. Il a laissé une trace qui est indélébile, il est parti mais sa pensée reste... Alors, avant de poursuivre je vais demander à sa fille Mayapoli et à Clarisse de venir ici, s'il vous plait.
Mayapoli : "Je pense que ce qu'on a envie de vous dire aujourd'hui, c'est que cette Commission Vérité elle est vraiment importante, parce qu'elle met en lumière un pan de l'histoire française, un pan de l'histoire des amérindiens de Guyane et elle est importante parce qu'elle va permettre, j'espère, de mesurer les impactes de ce pan de l'Histoire, en fait, sur nos peuples. On est des générations entières, certaines devant vous, ici dans la salle, qui se sont senties, et qui se sentent encore perdues, parfois entre deux mondes, perdues entre des injonctions, des valeurs, des traditions qui s'opposent souvent. Perdues dans un sentiment d'appartenance ou pas à cette république, et cela a joué sur notre confiance et notre fierté en tant que peuple. Chaque enfant amérindien et bushinengué porte en lui de manière plus ou moins consciente cette Histoire. Cela peut parfois entrainer une grande confusion de l'âme et aboutir à des drames humains de toutes sortes. Mais ça peut aussi créer de grande histoires de vie qui viennent apporter de la lumière et de l'espoir pour la suite...
Mon père a fait partie de ses enfants, et il s'est battu toute sa vie pour que nos peuples puissent se dresser fièrement. Il a transcendé le chemin tout tracé qui aurait pu être le sien, celui d'un jeune amérindien Kalina coincé entre deux cultures dont l'une avait pour but de faire disparaitre l'autre dans le moule de la République. Et pourtant, malgré la violence de cet arrachement à sa terre, à sa famille, à ses racines culturelles, il n'a pas gardé de rancune, et il a choisi de faire le lien, il a choisi de raconter son histoire et celle de notre peuple, de parcourir le monde pour la raconter, de parcourir le monde pour essayer de changer les choses. Et puis il a choisi le droit, et de toutes les casquettes que je lui ai connues, c'est une de celles qui l'a fait vibrer le plus fort. Elle lui a donné le sentiment que les choses pouvaient changer et que des actions concrètes pouvaient être menées. Ce fut un des combat de sa vie cette lutte pour nos droits, et ce fut un privilège de le voir faire, de le voir grandir en tant qu'homme en le menant. Cette Commission, c'était l'un de ses dernier combat, il serait heureux de savoir qu'elle va enfin voir le jour."
Clarisse DA SILVA : Présidente de la Jeunesse Autoctone de Guyane (JAG)
"[Tusi Alexis TIOUKA Ndlr]... Il nous dirait également à nous jeunes, et moins jeunes autochtones de Guyane de continuer à être attentifs, vigilants, de ne pas s'endormir sur une victoire car la reconnaissance des droits des peuples autochtones, et la reconstruction d'une fierté d'appartenance à nos peuples est un combat constant. Au delà de nos droits en tant que peuples, c'est aussi une philosophie de vie que nous devons revaloriser et dont nous pouvons être fiers. Nous espérons que cette Commission Vérité aboutira pleinement, en permettant à la parole de se libérer, à la vérité de se faire entendre, en développant une meilleur compréhension mutuelle de nos différents peuples au sein de la République et en favorisant une réconciliation qui permettra de guerrir du passé pour mieux construire le présent".
Une minute de silence et de recueillement est observée en hommage à Tusi Alexis TIOUKA.
Après quoi, le projet de la CVR, et les conclusions du Rapport sont longuement présentés par Mme Magali BESSE docteure en droit, et M Jean-Pierre MASSIAS professeur de droit à l'Université de Pau. + l’exposé de l’historique des Homes indiens par Mme Hélène FERRARINI, à visionner dans le détail via les 3 liens vers YouTube ci-dessous.
Monsieur Steeve CHAILLOUX député de la 2ème circonscription de la Polynésie Française :
"Bonsoir tout le monde !... Mesdames et Messieurs, chers collègues députés, sénateurs, chers amis, chers invités... Ia O Rana Itutatu... Comme on dit dans ma langue, le tahitien (reo tahiti Ndlr), avant tout, salutations à mon collègue Jean-Victor pour cette initiative qui rend hommage au peuples de la Guyane, aux peuples autochtones de la Guyane, je suis assez ému de prendre la parole ce soir, je ne pensais m'exprimer ce soir, mais je pense que c'est important quand même parce qu'effectivement en m'adressant ce soir à vou , je n'ai pas de questions, pas de réactions, et je voudrai parler en tant que député autochtone moi-même.
Ce que vous avez partagé avec nous ce soir, un petit bout de votre Histoire, fait écho également à l'Histoire que nous autochtones de MĀ'OHI NUI, ce que nous appelons aujourd'hui Polynésie Française, avons également subi. Il y a énormément de similitudes. Alors certes, nous n'avons pas eu chez nous en Polynésie les Homes, mais nous aussi nous avons été amputé de notre Histoire, j'ai envie même de dire de nos Histoires, parce que la Polynésie dite française regroupe cinq archipels avec cinq peuples différents. Nous aussi en tant que polynésiens nus avons été amputés, en tous cas il y a eu des tentatives, de nous amputer de nos langues, et aujourd'hui les générations nouvelles, nos jeunes ,ont des identités clivées. Pertes de repères, perte identitaire, ils ne savent plus où s'asseoir, tout simplement. Et on sait tres bien que lorsqu'on ampute un peuple de son histoire on en fait une coquille vide, une coquille vide qu'on remplir par autre chose, notamment par le biais de l'acculturation. c'est ce qui s'est passé pour vous, c'est ce qui s'est passé pour nous, et sans doute c'est ce qui s'est passé pour tout les autres peuples autochtones.
Mon autochtonie, je la porte quotidiennement dans ma langue, parce que pour moi parler tahitien est extraordinairement important. Mon autochtonie, je la porte sur ma peau, fièrement parce que c'est ce que nous sommes. et je pense qu'une des tragédies de la colonisation, puisqu'il s'agit de ça, c'est en quelque sorte, nous denier le droit d'exister, d'exister en tant que tel, d'exister en tant qu'être humain issu d'une terre, issu d'une ancestralité, issu d'une Histoire, issu et porteur de langue. et nous, contrairement à vous, nous avons également subis des traumatismes inouïs, vous le savez sans doute, nous avons eu cent quatre vingt treize tirs nucléaires en Polynésie, et aujourd'hui encore mon peuple porte dans sa chair l'héritage du nucléaire. Quand l'état à demi-mot n'ose pas reconnaitre ce qu'il a fait, dans notre Fenua, dans notre pays...
Le combat que vous menez, c'est notre combat à tous, en tant qu'autochtone, et avec ma collègue députée autochtone de la Polynésie, il manque notre collègue Tematai qui est en Polynésie, soyez assurés de notre soutien infaillible, parce que nous n'avons pas une compréhension intellectuelle de votre souffrance, mais la souffrance que vous avez eu et que vous avez encore, nous la partageons, nous la partageons avec nos enfants lorsque nous voyons que nos enfants ne veulent pas, ne veulent plus parler leur langue. Lorsque nos enfants qui sont ignorants de notre Histoire et qui sont eux-mêmes victimes de la colonisation.
Et c'est la raison pour laquelle, tu parlais, collègue de ton parti...c'est la raison pour laquelle mon parti en Polynésie, le parti duquel je suis issus, nous militons activement pour conduire la Polynésie Française vers un processus de décolonisation. Non pas dans un esprit revanchard parce que je pense que ce n'est pas très positif, mais c'est parce que nous tout simplement foi en nous, quand pendant des décennies et des siècles on nous a dit, on nous a enseigné, on nous a inculqués, on a distillé le désamour de nous-même, le désamour de notre autochtonie pour mieux nous assimiler à ce que nous n'étions pas, à ce que nous ne sommes pas. Eh bien nous voulons conduire, nous députés de la Polynésie, avec d'autre élus, notre pays vers sa pleine souveraineté parce que nous considérons, et surtout, nous avons foi, une foi inébranlable en notre Terre évidemment, mais surtout en la plus grande richesse de notre pays qui est son peuple, et c'est peut-être la petite différence, la grande différence, c'est que aujourd'hui encore nous avons la "chance" en Polynésie, en tant que peuple autochtone, d'être encore le peuple majoritaire de mon pays. Et nous avons espoir que nous pourrons réveiller les consciences, parce que c'est ce qui est difficile...
Ce qui est difficile pour nous, ce n'est pas de se bagarrer contre l'état ou contre... Non. Ce qui est difficile pour nous au quotidien, c'est de réveiller les consciences de notre peuple autochtone vis a vis de son Histoire, vis a vis de son potentiel, vis a vis de ses capacités à pouvoir se prendre en main, et à se tenir droit, debout, fier, enraciné dans sa terre, mais avec le regard porté vers l'avant, ouvert sur le monde, parce que encore une fois nous croyons que nous sommes capables de nous assumer nous-mêmes, et nous le ferons, et nous serons également avec vous, et nous vous soutiendrons également, par solidarité parce que nous avons le même combat, nous avons les mêmes blessures et nous devons guérir ensemble. Mauruuru Maitai ! "
Le YOPOTO, Chef coutumier, Éric LOUIS (Village Kuwano. Balata. ) :
"Bonsoir à tous ! Tout d'abord, j'aimerai féliciter l'ensemble de l'équipe qui est là : Monsieur MASSIAS, Madame BESSE, Madame FERRARINI, Monsieur le député, de m'avoir invité. Il est tout a fait essentiel que cette Commission voit le jour effectivement. On y tient... On y tient beaucoup. Tout ça pour pour vous dire que effectivement ces traumatismes, ils sont encore là, d'accord... La preuve, je porte une bague ici, vous voyez, parce que ma mère est catholique, moi même je suis catholique, mais moi je la porte pour d'autres raisons, pour me rappeler d'où je viens et d'où l'on vient, et qui on est. J'aimerai dire aussi à mes compatriotes : "Yasagalgon tchumamila"... Je viens de dire à mes frères et sœurs que tant qu'on sera là sur cette terre on continuera le combat, parce qu'il nous appartient de le porter. Au nom, justement de..., Vous avez bien entendu tout à l'heure tous ceux qui sont allés aux Homes, ma mère est allé au Home... Tous les Anciens, sont entrain de "partir"...
En fait, il faut absolument que cette Commission voit le jour. Il est question aussi de..., Je veux dire... En fait, chacun de nous a un devoir de Réparation, de réparation pour que le monde se porte mieux, pour que on se sente bien dans cette société, pour que le vivre ensemble soit réel, soit dans cette société. On voit bien qu'il y a un déclin, hein... pas seulement en France, nous on le ressent depuis bien longtemps, depuis cette colonisation qui est arrivée chez nous,... D'accord... Et nous en sommes le fruit. Et pourtant, on est pas dans la négativité, on est toujours resté dans le dialogue, dans la diplomatie. Voilà..., et encore une fois Merci.
CONCLUSION :
Jean-Victor CASTOR : "Merci !... Tu peux rester... Et bien, on est satisfait de l'affluence, il y avait du monde, même si encore une fois, je me répète, j'ai du faire la tournée des popotes-là... Parce que, je vous le dis franchement, je me suis pris la tête avec un chef de brigade, un Brave... Voilà, ça s'est bien passé avec tous, toutes les autres brigades, mais je suis tombé sur un Brave... Voilà..., et donc ça a chauffé un peu... Je ne sais pas si j'ai eu le dernier mot, mais enfin dans tous les cas, eh-ben, voilà... donc on a des personnes qui n'ont pas pu arriver jusqu'ici parce qu'on les a repoussées, mais fort heureusement vous êtes assez nombreux... Nous avions 220 personnes d'inscrites..., et puis il y a eu cet événement avec le mouvement des agriculteurs qui est venu nous pénaliser un peu.
Ce que je peux vous dire, c'est que je pense qu'il n'y a pas de doute sur notre détermination à tous, on est arrivé au bout, comme je l'ai dit tout à l'heure, c'est un processus, il y en a tellement, les questions étaient très intéressantes, ce qu'il faut savoir c'est que, en Guyane cette question là, je le répète est une question, qui..,. la question autochtone dans son ensemble, est une question qui n'est pas facile à traiter, parce qu'on nous a tellement opposés, tellement divisés, que, il y a aussi un travail à faire sur l'ensemble de la population guyanaise pour qu'elle, déjà, comprenne, l'enjeu, le défi qu'il y a à se rapprocher les uns des autres, et en tous les cas, moi je..., dès le départ, avec mon parti politique nous sommes pour faire ce pas vers les peuples autochtones, parce que c'est un combat qui est juste, qui est légitime, il faut simplement prendre le temps d'analyser tout l'aspect historique mais surtout le terme de justice, tout simplement, voilà, je suis profondément contre les discriminations, profondément contre les injustices et je dis toujours que la meilleur façon de comprendre c'est de se dire, mais si moi même j'étais autochtone, si j'étais autochtone,
Et vous savez, plus on vous minorise, plus à un moment donné, par la prise de conscience comme tu le disais Steeve, on nous pousse à être radical. Parce que quand on est minorisé, et quand vous avez connu le génocide, eh bien, les derniers qui restent là, eh bien, il faut qu'ils se radicalisent, sinon ils ne sont pas entendus. parce que par définition ils sont minorisés, que donc ils utilisent les mots les plus forts, les revendications les plus puissantes, pour qu'ils soient entendus, et les méthodes aussi, des fois, et il faut comprendre ça. Après, et c'est peut-être l'une des raisons pour laquelle j'étais peut-être encore plus proche d'Alexis..., c'est qu' Alexis était quelqu'un de très ouvert, qui a écrit d'ailleurs, une approche, une méthode de réconciliation. Je me rappelle qu'il me disait tout le temps : "Jean-Victor, il faut qu'on fasse une sorte de pèlerinage", que, avec les trois communautés dites de base de Guyane, qu'on s'attache à des symboles... Enfin, il avait plein d'idées pour faire en sorte que cette réconciliation, à l'échelle de la Guyane, puisse se faire.
Dans tous les cas, moi je suis partisan qu'on ne laisse pas l'Autre, celui de Paris, celui d'ici, celui des assemblées, celui du ministère des colonies etc. venir s'ingérer dans les affaires guyanaises, et continuer à nous diviser les uns les autres. Voilà ce que j'avais à dire, merci de votre présence, et puis merci surtout, j'espère, de votre participation à ce processus par votre contribution, voilà, en vous inscrivant, en mettant donc, du votre dans ce processus qui je pense est une partie, qui peut-être semble symbolique pour l'instant, mais qui est une partie très importante quand on met côte à côte tous les autres process qui sont en cours aujourd'hui pour la reconnaissance des peuples autochtones, pour le combat qu'ils mènent pour leur droit. Voilà ce que j'avais à dire."
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(1) L'association Moliko Alet+Po qui signifie les descendants de Moliko, s'inspire du nom de l'arrière grand-mère de Corinne Toka-Devilliers. Elle a notamment pour objet de revendiquer deux dates cruciales : 1882 et 1892, durant lesquelles 47 Kalina ont été amenés au jardin d'acclamation à Paris. Venus libres, ils ont en réalité été contraints à s'exhiber, dans des expositions plus connues aujourd'hui sous le nom de "zoo" humains". Grâce à un long travail, l'association Moliko Alet+Po est parvenu a identifier la plupart des personnes exhibées. Elles sont ainsi le cœur de l'exposition. Si certaines sont rentrées en Guyane, d'autres sont décédées sur place, notamment à cause du froid. L'association Moliko Alet+Po soutien aujourd'hui le retour et l'inhumation de leurs dépouille s en Guyane. La question des restitutions est aujourd'hui débattue au sein même du parlement. Une loi est même en cours d'adoption. Elle autorise, sous conditions, la restitution à des états étrangers de restes humains appartenant aux collections publiques. Elle ne règle donc pas la question des restitutions aux territoires ultramarins. Pour ces derniers, la loi donne néanmoins un délai d'un an au gouvernement pour remettre un rapport pour la création d'une procédure applicable aux outremers. L'association Moliko Alet+Po milite enfin pour obtenir des excuses officielles de l'état. Un Mémorial en mémoire des 47 Kalina exposés à Paris doit être édifie en Guyane à l'été 2024.
(2) Créé en 2013, l’IFJD - Institut Louis Joinet est un think tank, dont l’objet est de soutenir et de renforcer les processus de vérité, justice, mémoire et réconciliation.

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