Agrandissement : Illustration 1
Le monde s’est agité contre Abbas
comme jamais il ne l’a fait
pour aucune provocation israélienne
- le chœur de l’Union européenne,
l’envoyé des Nations Unis
et bien sûr l’ambassadeur des colons,
David Friedman,
qui ne dénonce jamais Israël
mais seulement les Palestiniens.
•
Même le New York Times
a adopté un ton étonnamment vif:
«Que les mots vils d’Abbas soient les derniers qu’il prononce en tant que dirigeant palestinien.» (1)
•
Il est difficile d’imaginer que ce journal que la droite juive a désigné comme
haïsseur d’Israël
-à tort, bien sûr-
utiliserait un langage similaire
à propos d’un premier ministre israélien:
par exemple celui qui est responsable
du massacre de manifestants non armés.
•
Il y a aussi un double standard en Israël,
qui n’attaquera jamais la droite antisémite
en Europe
avec autant de hargne que Abbas
qui est certainement
beaucoup moins antisémite,
voire pas du tout,
que le vice-chancelier autrichien,
Heinz-Christian Strache
ou que le Premier ministre hongrois
Viktor Orban.
•
Abbas a dit quelque chose qui n’aurait pas dû être dit.
Le lendemain,
il s’est excusé,
il a regretté
et rétracté ce qu’il a dit,
a condamné l’holocauste et l’antisémitisme
et a réaffirmé son attachement
à la «solution à deux États».
•
Il s’en est fallu de peu
qu’il s’agenouille
devant les bottes cloutées d’Israël
et demande pardon
pour avoir l’audace de vivre sous elles.
•
Mais Israël ne laissera aucune excuse
arrêter sa malsaine jubilation.
Le ministre de La Défense,
Avigdor Lieberman,
a vite fait de condamner l’autre camp,
comme d’habitude:
«Les excuses d’un méprisable négationniste ne sont pas acceptées.»
•
Abbas est beaucoup moins un négationniste
de l’holocauste,
voire pas du tout,
qu’Israël n’est négationniste
à propos de la Nakba. (2)
•
Mais nier la Nakba est autorisé,
en fait c’est un must en Israël, (3)
et nier l’holocauste est interdit
(et à juste titre).
•
Le fait que l’holocauste
était beaucoup plus terrible que la Nakba
ne justifie pas
le déni
de la catastrophe de l’autre,
qui est sans fin.
•
Antisémitisme ou non,
la situation de chaque Juif dans le monde
est meilleure
et plus sûre aujourd’hui
que la situation d’un Palestinien
dans les territoires occupés
ou d’un Arabe en Israël,
•
Il n’y a aujourd’hui guère de Juifs
privés de droits
comme les Palestiniens
en Cisjordanie et à Gaza,
mais des Juifs sont discriminés
comme les Arabes en Israël.
•
Et quand un Juif en France
est poignardé,
le président de la république
vient lui rendre visite.
Et quand un Arabe est poignardé
en Israël,
le Premier ministre continue ses provocations.
Et quand il provoque,
il ne s’excuse pas.
•
Israël ne s’est jamais excusé
pour la Nakba,
ni pour le nettoyage éthnique,
ni pour la destruction de centaines de villages
et l’exil de centaines de milliers de personnes
chassées de leurs terres.
•
Israël ne s’est pas non plus excusé
pour les crimes de l’occupation
depuis 1967,
pour le vol de terre
et la construction [illégale] des colonies,
ou pour les arrestations,
les massacres
et la destruction de la vie d’une nation.
•
Aucun homme d’État israélien
n’a aujourd’hui
l’intention
de faire cela
comme une étape nécessaire
vers un avenir différent.
•
Mais Abbas doit s’excuser,
sinon Lieberman
et le New York Times
vont exiger sa tête.
•
En fait,
ils l’exigeront,
même après
qu’il ait présenté ses excuses.
•
Gideon Levy, Haaretz 6 mai 2018
Notes NDLR:
(1) «Nous sommes les négationnistes des génocides des autres»
a écrit Avraham Burg, (ancien Président du parlement israélien)
dans son livre : • Vaincre Hitler.
(2) Depuis 2009, l’usage du terme Nakba (Catastrophe)
est interdit dans les manuels scolaires
utilisés dans l’enseignement en langue arabe en Israël.
•
Choix, découpage, notes, et différées, E’M.C.