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Billet de blog 15 février 2016

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                 INSUPPORTABILITÉ 

Au cours de la première moitié du XXième siècle, mon père a abandonné l'école talmudique, n'a plus remis les pieds à la synagogue et a depuis lors exprimé son aversion pour les rabbins.

                        LA RUPTURE 

En ce début du XXI ième siècle, je me sens à  mon tour dans l'obligation morale de rompre définitivement avec ce judéo-centrisme tribal.

Je suis pleinement conscient de n'avoir jamais véritablement été un juif laïc, sachant qu'un tel sujet imaginaire est dépourvu d'assise et d'horizon culturels et que son existence se fonde sur une vision creuse et ethnocentrique du monde.

                       PARCOURS 

Je me suis trompé à l'époque, lorsque je croyais que la culture yiddish dans laquelle j'ai grandi était l'incarnation de la culture juive,

En compagnie de Bernard Lazare, Mordechaï Anielwicz, Marcel Rayman et Marek Edelman, Je me suis longtemps identifié comme partie prenante d'une minorité opprimée et rejetée.

Je me suis obstiné à être juif avec Léon Blum, Julian Tuwin et bien d'autres qui avaient accepté d'endosser cette identité à cause des persécutions et des bourreaux, du crime et des assassinés.

              DÉMISSION DU CLUB

Supportant mal que les lois israéliennes m'imposent une appartenance à une ethnie fictive, supportant encore plus mal d'apparaître auprès du reste du monde comme membre d'un club d'élus, je souhaite démissionner et cesser de me considérer comme juif.

               QUESTION DE MENTION

Bien que l'État d'Israël ne soit pas disposé à transformer la mention de ma nationalité de "juif" en "Israélien", j'ose espérer qu'aussi bien des gentils philosémites que des  sionistes engagés et des antisionistes exaltés, souvent nourris de conceptions essentialistes, respecteront ma volonté et cesseront de me cataloguer comme juif.

En vérité, ce qu'ils pensent m'importe peu, et  pas davantage ce que pense le reliquat d'idiots antisémites.

À la lumière des histoires tragiques du XXième siècle, je suis déterminé à ne plus faire bande à part dans un club de prestige réservé auquel d'autres hommes n'ont ni possibilité ni vocation de se joindre.

Par mon refus d'être juif,  je me représente une espèce en voie de disparition.

En insistant sur le fait que seul mon passé historique était juif, que mon présent quotidien est israélien, pour le meilleur et pour le pire, et qu'enfin mon futur et celui de mes enfants, tel qu'en tout cas je le souhaite, doit être guidé par des principes universels, ouverts et généreux, Je sais que je vais à l'encontre des modes dominantes orientées vers l'ethocentrisme.

En tant qu'historien des temps modernes, j'émets l'hypothèse que la distance culturelle entre mon arrière-petits-fils et moi sera égale, voire supérieure, à celle qui me sépare de mon arrière-grand-père.

Tant mieux !

Je vis malheureusement parmi trop de gens qui croient que leurs descendants leur ressembleront en tous points parce que pour eux les peuples sont éternels, et a fortiori un peuple-race comme leur peuple juif.

J'ai conscience de vivre dans l'une des sociétés les plus racistes du monde occidental.

Le racisme est bien sûr omniprésent, mais         en Israël on le trouve dans l'esprit des lois,         on l'enseigne dans les écoles, il est diffusé       dans les médias.

Surtout, c'est là le plus terrible, les racistes ne savent pas qu'ils le sont et de ce ce fait ne se sentent nullement obligés de s'excuser.

En conséquence Israël est devenu une référence particulièrement prisée par une majorité de mouvements d'extrême droite dans le monde  dont jadis l'antisémitisme était bien connu.

Vivre dans une telle société m'est devenu insupportable mais, je l'avoue, il ne m'est pas moins difficile d'habiter ailleurs.

Je fais partie du produit culturel, linguistique    et même mental de l'entreprise sioniste, et je     ne peux m'en défaire.

Par la vie quotidienne et ma culture de base,      je suis un israélien.

Je n'en éprouve pas de fierté, pas plus qu'à être un homme aux yeux bruns et de taille moyenne.

J'ai même souvent honte d'Israël, notamment lorsque je vois la cruelle colonisation militaire dont sont victimes dans faibles sans défense, qui ne font pas partie du "peuple élu"

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Comment j'ai cessé d'être juif, Shlomo Sand, Flammarion 2013, 2015.

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