RÉCIT PALESTINIEN
L'une des principales réactions directes des Arabes contre les desseins des sionistes et des occupants britanniques en Palestine à l'époque fut le soulèvement qui eut lieu dans la zone de Jérusalem en 1920, à l'issue d'une célébration religieuse.
En effet, suite à des provocations des sionistes, les premiers heurts sanglants eurent lieu à Jérusalem entre le 4 et le 8 avril, alors que la communauté musulmane fêtait la saison d'al-Nabi Moussa.
Les célébrations tournèrent en manifestations violentes qui opposèrent la rue arabe aux Juifs et à la police britannique.
Il y eut plusieurs morts et blessés aussi bien du côté Juif que du côté arabe.
Cela entraîna d'autres manifestations à travers la Palestine et aggrava encore les tensions.
L'administration militaire britannique créa alors une commission d'investigation militaire; le rapport rendu par celle-ci imputa les troubles
"au désespoir des Arabes après les promesses d'indépendance qui leur avaient formulées; à leur rejet de la déclaration Balfour qu'ils jugent en totale violation de leurs droits; à leur crainte que l'implantation du foyer national juif ne pousse les Juifs à les exclure."
Au vu des injustices à l'encontre des populations autochtones, les Britanniques et leurs complices sionistes préférèrent garder secrètes ces conclusions.
LA RÉVOLTE D'AL-BOURAQ
Les soulèvements et les troubles de 1929 sont communément surnommés "la révolte d'al-Bouraq", car leur cause directe résulte dans la dispute déclenchée par les Juifs autour du mur d'al-Bouraq*.
Les infractions et provocations que ceux-ci y menaient conduisirent, côté arabe, à la colère et aux protestations.
Le 15 août 1929, une grande manifestation juive partit de Tel-Aviv pour atteindre Jérusalem.
Estimant que les Juifs n'étaient venus que pour provoquer un affrontemen, les musulmans organisèrent une manifestation encore plus importante, le lendemain.
Après la prière d'al-Mawlid al-Nabawi, en ce jour de la naissance du Prophète, les manifestants se dirigèrent vers le Mur et détruisirent les symboles confessionnels laissés par les Juifs.
Ces manifestations donnèrent lieu à d'autres rassemblements et altercations partout en Palestine.
Côté arabe, ce n'était que la conséquence de leur insatisfaction, de leur déception politique et des craintes quant à leur avenir économique, comme le dévoilait le rapport remis par la commission britannique Shaw.
Les évènements de 1929 firent beaucoup de victimes des deux côtés.
Des groupes juifs envahirent le domicile du cheikh 'Abdelghani 'Awn à Jaffa, le poignardèrent et exécutèrent sauvagement son épouse, leur fille et son neveu.
À Jérusalem, un autre groupe prit d'assaut le tombeau de 'Okacha, le profana, ainsi que ceux d'autres hommes vénérables, et détruisit les lieux.
La situation en ce dimanche 25 août 1929 - telle que rapportée dans Le journal officiel du gouvernement de Palestine et dans le quotidien du gouvernement de Palestine - était la suivante :
Région de Jérusalem :
La situation est calme dans la Vieille Ville et dans le nouveau centre [à l'extérieur de la muraille].
Certaines localités isolées ont été menacées par un petit nombre d'assaillants arabes.
Aucune perte en vies humaines et aucun dommage matériel dans la banlieue ne sont à déplorer, à l'exception de la localité de Talpiot, totalement évacuée sans pour autant qu'il y ait de victimes.
L'infanterie et les véhicules blindés de l'Air Force patrouillent dans la ville, en banlieue Et dans les colonies juives isolées.
Ils y resteront positionnés jusqu'à nouvel ordre.
(...)
HÉBRON ( AL KHALIL )
Une attaque violente, qui a fait de nombreux morts, a été lancée tôt hier matin sur le quartier Juif.
Selon les informations recueillies, un affrontement aurait fait plus de 45 morts côté juif et 8 côté musulman.
Il y aurait par ailleurs plus de 59 blessés juifs et 10 musulmans.
D'importantes unités de l'Air Force ont été envoyées de Jérusalem et ont tenté de ramener l'ordre.
Les troupes resteront positionnées dans Hébron jusqu'à nouvel ordre.
La population juive a évacué le quartier et s'est abritée dans les commissariats de police.
NAPLOUSE
Un groupe arabe a tenté en vain d'envahir un local de la police.
BEISSAN
Un affrontement a eu lieu hier matin entre habitants arabes et juifs de Beissan, à l'issue duquel 2 Juifs ont été grièvement blessés et 8 autres plus légèrement.
Les Forces frontalières de Transjordanie sont dorénavant positionnées à Jisr al Majami', Beissan et Safad.
SAFAD
La tension entre Arabes et Juifs s'est accrue hier soir et ce matin.
Les Forces frontalières de Transjordanie stationnées à Safad ont été rejointes par des policiers britanniques venus de Haïfa afin de calmer la situation.
HAIFA :
Un petit nombre d'Arabes a pénétré dans la localité de Hadar HaKarmel mais a été vite délogé par la police.
La situation est calme.
LE TRIBUNAL MILITAIRE
Suite aux évènements survenus entre Arabes et Juifs, les Anglais mirent sur pied un tribune militaire pour juger les responsables des troubles.
La cour condamna à mort trois militants arabes : Fouad Hijazi,Muhammad Jamjoum et 'Ata Zir.
Différentes peines de prison furent requises contre 800 autres arabes.
PEINE DE MORT COMMUÉE
La peine de mort fut prononcée à l'encontre d'un policier juif qui avait massacré une famille arabe entière à Jaffa, mais les Anglais réduisirent sa peine à dix ans, puis le relâchèrent avant que celui-ci ne la purge totalement.
EXÉCUTIONS FERMES
Les trois militants furent exécutés le 17 juin 1930.
DANS LE QUOTIDIEN PALESTINE
Annonçant leur mort, le quotidien Palestine titra:
L'exécution de Fouad Hijazi, de 'Ata al-Zir et de Muhammad Jamboum est une nouvelle conséquence de la déclaration Balfour.
Que le sang de ces martyrs, glorieux enfants de la Palestine, puisse arroser l'arbre de l'indépendance arabe !
Célébrez cette journée tous les ans.
Les poètes de la Palestine chantèrent longuement ces martyrs dans leurs œuvres.
Citons par exemple la chanson populaire qui commençait ainsi :
De la prison de 'Akka, un cortège funèbre est parti:
Muhammad Jamjoum Et Fouâd Hijazi.
Ô compatriotes ! Puissiez-vous punir
Le haut-commissaire et tout son clan.
Citons également le poème, Mardi rouge, d'Ibrahim Touqan qui se terminait ainsi :
Les trois héros
Leurs corps reposent dans la terre de leur pays
Leurs âmes au Paradis céleste
Où nul écho de la tyrannie n'existe
Où règnent la tolérance et le pardon.
N'espérez nulle indulgence, si ce n'est celle de Dieu,
Il est Dieu
Il tient le monde entre Ses mains
Plus puissant que ceux qui gouvernent les terres et les mers.
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In, Histoire de l'autre, Liana Levy, 2004.
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Note : Toute la toponymie arabe originelle a été hébraïsée par l'occupation sioniste de la Palestine.
Choix, découpage, intertitres, note(s), E'M.C.