E'M.C. (avatar)

E'M.C.

Abonné·e de Mediapart

Billet publié dans

Édition

Palestine

Suivi par 187 abonnés

Billet de blog 22 décembre 2015

E'M.C. (avatar)

E'M.C.

Pr.-Apprenant permane, assigné à résilience.

Abonné·e de Mediapart

" AVEC UN PEU D'AIDE EXTÉRIEURE "

" Il est facile de s'exempter de notre responsabilité morale en assimiilant, comme d'habitude, la critique à l'antisémitisme." Gideon Levy

E'M.C. (avatar)

E'M.C.

Pr.-Apprenant permane, assigné à résilience.

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Ironie du sort : Israël, qui mène une large campagne internationale en faveur du boycott, mène simultanément et avec non moins de détermination, une campagne parallèle contre le boycott.

Le pays trouve légitime le boycott qui affecte gravement des millions de gens parce qu'il vise ceux qu'ils définit comme des ennemis, alors qu'il dénie toute légitimité au boycott de sa tour d'ivoire universitaire pour la seule raison que c'est lui qui est visé.

il y a là deux poids, deux mesures.

Pourquoi le boycott de l'Autorité Palestinienne - y compris le gel d'une aide économoque vitale et l'ostracisme envers les dirigeants élus dans des élections démocratiques et légales - serait-il une mesure permise aux yeux d'Israël, et le boycott  de ses universités, interdit ?

Israël ne peut pas prétendre que le boycott est légitime.

Lui-même ne se prive pas d'employer largement cette arme, soumettant les populations concernées à de graves pénuries, de Rafah à Jénine.

Il fut un temps où Israël invitait le monde à boycotter Yasser Arafat; aujourd'hui, c'est le gouvernement du Hamas et à travers lui, tous les Palestiniens des territoires occupés, qu'il invite à boycotter, et il ne voit là aucun problème moral.

Des milliers de personnes n'ont pas reçu leurs salaires depuis quatre mois à cause du boycott, mais quand il s'agit des universités israéliennes, ce moyen de pression devient soudain une arme illégitime.

Ceux qui appellent au boycott d'Israël usent Ausdi de deux poids, deux mesures.

Les universitaires britanniques et le syndic des fonctionnaires canadiens de l'Ontario, qui, tous deux, ont décidé de boycotter Israël, n'en n'ont pas fait autant pour protester contre les crimes de guerre et l'occupation quand ils étaient le fait de leur propre pays : l'armée britannique en Irak et l'armée canadienne en Afghanistan.

Néanmoins, en Israël, la poignée de défenseurs des droits de l'homme et les opposants à l'occupation devraient savoir gré de leur initiative à ces deux organisation, en dépit de leur attitude morale imparfaite.

Il eût mieux fallu que les opposants israéliens n'aient pas besoin de l'intervention de groupes extérieurs pour combattre l'occupation.

Il n'est pas facile d'inviter le monde à boycotter son propre pays.

Il eût été préférable de se passer de Rachel Corrie, James Miller et Tom Hurndall, des gens courageux qui n'écoutaient que leur conscience et qui ont payé de leur vie d'avoir tenu tête aux bulldozers venus détruire les maisons de Rafah.

Ces jeunes étrangers ont accompli une tâche vitale et dangereuse que les Israéliens auraient dû entreprendre eux-mêmes.

Il en va de même pour les quelques pacifistes qui parviennent à circuler dans les territoires pour protester et offrir de l'aide aux victimes de l'occupation, comme les membres du Mouvement de Solidarité Internationale (ISM) qu'Israël combat en les empêchant de franchir ses frontières.

Il serait préférable que ce soit des Israéliens qui se mobilisent.

Mais à l'exception de quelques groupes modestes, il n'y a en Israël ni protestation, ni véritable mobilisation.

Il ne reste donc qu'à espérer l'aide des autres pays.

Ils ne peuvent aider Israël à se sauver de lui-même qu'avec des moyens limités.

Dans un monde où les gouvernements occidentaux soutiennent ee fait la poursuite de l'occupation, même quand ils déclarent s'y opposer, ce rôle revient aux organisations civiles.

Quand des groupes d'avocats américains, y compris des Juifs, appellent à boycotter la société Caterpillar dont les bulldozers ont rasé des quartiers entiers de Khan Younès et de Rafah, il faut leur en savoir gré.

Idem pour le boycott des universités : quand des universitaires britanniques boycottent leurs collègues israéliens qui ont peur de déclarer en public qu'ils sont opposés à l'occupation, il faut apprécier leur geste.

Chacun peut agir dans son domaine, et peut-être cela inclura-t-il un jour des professionnels du tourisme, des hommes d'affaires, des artistes et des sportifs.

Si tous ces gens boycottaient Israël, les israéliens commenceraient peut-être à comprendre, à la manière forte, que l'occupation à Et que Cnest à eux de le payer : de leur poche et de leur statut.

L'occupation n'est pas seulement le domaine du gouvernement, de l'armée et des services de sécurité.

Tout le monde est concerné : les magistrats, les avocats, les médecins qui ne réagissent pas quand l'accès aux soins médicaux est entravé dans les territoires, les professeurs qui ne protestent pas contre la fermeture des établissements scolaires et l'atteinte à la libre circulation de leurs pairs, les journalistes qui n'informent pas, les écrivains et les artistes qui ne disent rien, les architectes et les ingénieurs qui prêtent main aux artisans de l'occupation en construisant les colonies et le mur, les barrages et les routes de contournement; et aussi les universitaires qui ne font rien pour leurs collègues emprisonnés dans les territoires mais dirigent des programmes d'étude spéciaux pour les forces de sécurité.

Si tous ces gens boycottaient l'occupatio, on n'aurait pas besoin de boycott international.

Le monde voit une situation inique perdurer.

Doit-il se taire ?

Bien entendu, ce n'est pas la seule injustice au monde, ni la pire.

Mais ça ne diminue en rien la nécessité de la combattre.

Il est facile de d'exempter de notre responsabilité morale en assimilan, comme d'habitud, la critique à l'antisémitisme.

Il se peut même que certains appels au boycott soient entachés d'antisémitisme.

Mais il y a aussi  des groupes et des individus, et parmi eux plus d'un Juif, à qui Israël est cher.

Ils veulent un Israël juste.

En voyant Israël occuper les territoires et agir de façon manifestement injuste, ils pensent qu'ils doivent faire quelque chose.

Nous devons les en remercier du fond du coeur.

                                  •

GAZA, articles pour Haaretz, 2006-2009, Gideon Levy, La Fabrique, 2009.

                                   •

Rachel Corrie, militante américaine du Mouvement de Solidarité Internationale (ISM), morte le 16 mars 2003, à Rafah, écrasée par un bulldozer D9 de Tsahal.

James Miller, documentariste britannique indépendant, tué intentionnellement par arme à feu le 2 mai 2003, à Rafah, lors du tournage d'un documentaire.

Tom Hurndall, militant britannique du (ISM); le 13 avril 2003, dans le secteur de Rafah, il reçoit une balle dans la tête, tirée par un tireur d'élite; il meurt de ses blessures 9 mois plus tard.

ISM, né en 1988, lors de la première Intifada, sous le nom de Centre palestinien pour le rapprochement entre les peuples, devient en octobre 2000, peu après l'Intifada Al-Aqsa, le Mouvement de Solidarité Internationale. Objectif: mettre fin à l'occupation israélienne par des moyens non-violents. 

                                  •

Choix et découpage, étais,  E'M.C.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.