Il y avait ce père de famille palestinien qui essayait de sauver sa fille des mains de la police,
les jeunes kahanistes qui hurlaient «Mort aux Arabes» dans les rues,
la peur que j’ai eue quand on m’a demandé si j’étais de gauche.
J’écris pour me rappeler tout cela.
Depuis le début du Ramadan ce mois-ci la police de Jérusalem a interdit aux Palestiniens de s’asseoir sur les marches à l’entrée de la porte de Damas,
la place principale de la vieille ville,
et de tenir des rassemblements en soirée en honneur au saint mois.
Cette décision arbitraire, pour laquelle aucune explication possible n’a été donnée, a enflammé une vaste protestation de la part des Palestiniens.
La police, comme si elle attendait juste l’occasion parfaite, a transformé la place en champ de bataille nocturne,
En toile de fond de cette violence,
des activistes du groupe suprématiste juif Lehava* ont appelé leurs supporters à venir en foule «pour restaurer la dignité juive» après que plusieurs vidéos TilTok soient apparues montrant des Palestiniens harcelant des Juifs ultra-orthodoxes dana la ville.
Appuyés par leurs représentants qui siègent désormais à la Knesset, des centaines de supporters de l’organisation kahaniste ont répondu à l’appel et sont arrivés dans ce quartier dans le but déclaré d’attaquer des Arabes (ou à défaut des militants de gauche).
J’écris maintenant, non pas que la description de la zone de guerre que j’ai vue cette semaine dans les rues de Jérusalem ou les détails sur les jeunes juifs qui criaient
«Mort aux Arabes» au cœur de la ville, ne puissent changer quoi que de soit.
La suprématie juive défile dans le centre-ville de Jérusalem
http://www.Youtube-com/embête/tXB_nyp50jc? feature=oembed
J’écris parce qu’il est nécessaire de briser cette folie au niveau de ces éléments les plus basiques - pour que peut-être je puisse la comprendre mieux.
J’écris pour livrer mon témoignage, parce qu’il a rien d’autre que je puisse faire.
J’écris pour le rappeler.
Pour le rappeler qu’au milieu des nuages de gaz lacrymogène et le son assourdissant des grenades à effet de souffle,
j’ai vu un père tenir la main de sa fille, essayant de fuir avec elle.
Me rappeler le regard terrifié de l’adolescent traîne par des officiers de police après qu’ils ont chargé contre un groupe de jeunes palestiniens.
Me rappeler les marches vides devant la Porte de Damas,
dont les Palestiniens ont été chassés
depuis le début du Ramadan.
Me rappeler que lorsque la puanteur du Skunk (mouffette)- un véhicule qui projette un liquide à l’odeur nauséabonde- m’a presque fait vomir et que les excréments des chevaux de la police étaient laissés à terre,
je me suis demandé si la municipalité nettoierait la saleté le lendemain,
et à quel point doit être insupportable de rompre le jeûne les soirs du Ramadan après avoir été aspergé par les eaux usées putrides qui jaillissent du Skunk.
Ce sont les nuit supposées être les plus festives de l’année.
Me rappeler le bruit des grenades qui se propageait longtemps après que j’aie quittée les lieux.
Me rappeler que je n’ai pas eu peur quand j’ai vu un’ paquet de kahanistes assoiffés de sang qui approchaient.
J’ai plutôt été surprise de leur nombre de leur jeunesse.
Me rappeler comment j’ai eu peur plus tard dans la nuit quand quelques jeunes juifs nous ont demandé:
«Vous êtes de gauche?»
Me rappeler les juifs orthodoxes qui se tenaient de l’autre côté du tram de Jérusalem,
près de la partie juive de Musrara et qui regardaient l’explosion des grenades à effet de souffle lancées depuis la Porte de Damas,
les éclairs d’excitation dans les yeux.
Me rappeler le jeune homme avec sa yarmulka se disputant avec un Palestinien qui était de l’antre côté d’une barricade de police avant de lui dire:
«On va vous assassiner tous, tu sais qu’on va vous tuer un par un.»
Me rappeler les feux d’artifice qui ont éclairé le ciel tandis que les kahanistes scandaient:
« N’aie pas peur Israël, n’aie pas peur.»
Me rappeler les militants de gauche qui se déployaient en très petits groupes, parfois par deux.
Me rappeler qu’à mon départ de la maison ma fille m’a demandé:
«Si tu les vois en train de frapper quelqu’un, qu’est-ce que tu pourras faire?»
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Un version de cet article a d’abord été publiée en hébreu dans Local Call.
Orly NOY est rédactrice à Local Call, militante politique et traductrice de poésie et de prose farsi (persane).
Elle est membre du Bureau exécutif B’Tselem et milité dans le parti Balad. Ses écrits traient des lignes qui se croisent et définissent di identité misrahi; c’est une femme de gauche migrante temporaire dans une immigrance perpétuelle et dans le dialogue entre les deux
Traduction SF pour l’Agence média Palestine Source + 972 magazine
24 04 2021
Repris sur le site de L’UJFP le 26 04 2012
Choix - découpage - intervention - étais éventuels - chapô E’M.C.