La stratégie de dédiabolisation du parti d'extrême-droite a franchi un nouveau pas. A présent, il envahit TikTok et Instagram et s'adresse donc directement à la jeunesse, et avec son langage.
Et ça marche. À force, il faut bien le dire, de clips bien montés et d'indéniable aisance oratoire, la popularité de son candidat augmente chez une grande partie de la jeunesse française.
Est-ce à dire que ces jeunes cautionnent les idées de ce parti ?
Bon, d'abord, qu'est-ce que c'est la jeunesse ?
Formulons l'hypothèse que c'est l'énergie et le désir de changer le monde, une aspiration que je pense, chacun a pu ressentir à cet âge où l'on fait des choix, où l'on forme ses idées. Être jeune, c'est aussi être de son temps, c'est sentir ces changements, leur donner du souffle, balayer les normes en place.
Le fait que l'énergie de changement d'une partie de la jeunesse française soit dirigée vers un parti qui incarne la réaction doit nous interroger. Arte propose quelques pistes dans ce reportage.
La déconnexion entre l'image de ce parti et la réalité de son histoire a, chez cette jeunesse, fini d'opérer. Rien de bien méchant dans leurs aspirations, ce ne sont clairement pas des fascistes. Mais en votant pour ce parti, ils contribueront à la montée des inégalités, à la violence sociale et raciale. Ils ne sont pas fascistes, mais le résultat sera le même.
Car la réalité de ce parti, c'est ça :
Radio France - Les pieds sur terre - Le repenti
Et c'est également une vacuité abyssale sur les questions de fond. Ce candidat est mis en difficulté dès lors qu'on lui pose une question un peu sérieuse. Pour ceux qui le détestent, je vous laisse savourer :
Merci à Alice d'avoir posé une question au jeune et joli candidat
Hélas, cette incompétence et cette dangerosité ne dissuaderont pas les jeunes qui ont fait ce choix d'aller au bout de leur idée, en glissant "sans trembler" (en fait un petit peu quand même) leur bulletin dans l'urne. Car à leurs yeux, le candidat de ce parti réactionnaire incarne l'énergie du changement.
Pourquoi ?
Au-delà de leurs problèmes, bien réels, et des explications sociologiques que nous connaissons tous, il est possible qu'une confusion se soit installée dans l'esprit d'une partie de la jeunesse :
Désormais peut-être que c'est l'image de la nouveauté et du changement qui dominent et non plus le changement et la nouveauté eux-mêmes. Pour le dire autrement, le fascisme c'est la réaction, et donc par essence le contraire du changement, mais le fascisme d'aujourd'hui est jeune et joli, et c'est pour ça que ça marche.
À une époque dominée par les reels, les tutos et les réseaux sociaux, à une époque donc où il faut faire un grand effort - ou avoir le temps pour cela - pour ne pas rester en surface des messages, ce candidat est parfait. Il ne dit rien, il est souriant et plaisant. Il a l'énergie de la jeunesse, il donne l'impression d'être accessible, à portée de main sur un smartphone. Il est sympa, il est drôle, il ne parle pas trop longtemps. Il est de son temps.
Si la jeunesse c'est l'énergie du changement et aussi être de son temps, alors c'est peut-être là que réside le problème : les temps ne sont pas bons.
Cette énergie de changement orientée par l'air du temps vers ce parti contribuera à produire l'effet inverse : un recul général, une régression sociale dont tout le monde souffrira.
Alors peut-être que finalement être jeune aujourd'hui, si l'on veut une société qui change vraiment, c'est de n'être surtout pas de son temps.