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Billet de blog 29 janvier 2024

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Et le Duende vint

Jesús Méndez et Pepe del Morao, au Grand Théâtre, Ismael de La Rosa et Yerai Cortés au musée de la Romanité ont montré avec brio que le Chant et la Guitare sont essentiels pour que vivent le flamenco.

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Et voilà l'ultime chronique de cette 34e édition du Festival de flamenco qui a maintenu une belle qualité tout au long de ces dix jours. Mais le meilleur était pour le dernier tiers de ce festival. Les récitals de Jesús Méndez, accompagné par Pepe del Morao, et celui de Ismael de La Rosa et Yerai Cortés.

Illustration 1
Jesús Méndez et Pepe del Morao © Sandy Korzekwa

Jesús Méndez et Pepe del Morao, duo cent pour cent Jerez et cent pour cent gitan, donnèrent un récital cent pour cent Jerez et cent pour cent gitan, proche de l'excellence. Jesús Méndez maîtrise parfaitement tous les styles. Pas de surprise quant aux palos exécutés. Le répertoire est là. Et c'est très beau ; mais trop professionnel. On a envie de lui crier : « Lâche-toi », même s'il semblait plus détendu et plus souriant que d'ordinaire. Neveu de La Paquera de Jerez, figure tutélaire du cante, il m'a longtemps semblé écrasé par son héritage. Pour la première fois, il semble avoir pris ses distances et tracé sa propre voie.

Quant à son compère, Pepe del Morao, neveu de Moraito, il ne semble pas accablé par le poids de sa dynastie. Il assume son héritage et accompagne respectueusement le cantaor. Un excellent moment.

Illustration 2
Ismael de La Rosa et Yerai Cortés au musée de La Romanité © Sandy Korzekwa

Et puis le ravissement vint lors du concert acoustique au musée de La Romanité. Deux jeunes artistes, Ismael de La Rosa et Yerai Cortés, pas encore trentenaires, ont offert aux privilégiés qui avaient pu avoir une place, ce qui, pour moi, est le grand moment de ce festival.

Il est difficile de résumer une heure vécue en apesanteur. Les Guajiras donnaient la chair de poule, les soleares mettaient les larmes aux yeux, l'hommage à Lole y Manuel serrait le cœur. Les siguiriyas et le solo de guitare qui a suivi feraient presque croire en dieu.

Ismael de La Rosa vient d'une haute lignée du cante, la casa Fernandez, de Triana, les plus illustres étant Curro ou Esperanza Fernandez. Mais il n'est pas une photocopie de ce style de chant. Ayant digéré plusieurs influences, il a su imprimer sa personnalité à sa musique. Tout en n'oubliant pas ses origines. Le prologue à la siguiriya est un hommage émouvant à sa famille.

Son complice, Yerai Cortés, vient d'Alicante. Son afición est née dans sa famille. Et il est devenu une encyclopédie du toque. Rocio Molina ne s'y est pas trompée, puisqu'il l'accompagnait pour ses deux derniers spectacles, conçus comme un duo guitare baile. Il accompagne avec une grâce, une profondeur et une élégance remarquables, ce qui n'empêche pas l'ironie, les chausse-trappes, les niches qui font que ce concert vit, existe, loin du formatage habituel. L'humanité était au centre et le Duende enfin là.

Ces deux concerts seront retransmis partiellement ou en totalité dans l'émission de France Culture, Couleurs du monde.

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