jean-marc gavanon (avatar)

jean-marc gavanon

Abonné·e de Mediapart

Billet publié dans

Édition

Sarkopédia

Suivi par 9 abonnés

Billet de blog 22 janvier 2011

jean-marc gavanon (avatar)

jean-marc gavanon

Dissident

Abonné·e de Mediapart

Les salaires de la peur des profs

"L'objectif républicain, c'est celui d'attirer tout le monde vers le haut, ce n'est pas d'abaisser le niveau pour que chacun puisse avoir la moyenne." Voilà le type de négation de la réalité à laquelle s'est adonnée la président de la République lors de ses voeux, improvisés, au monde de la connaissance et de la culture.

jean-marc gavanon (avatar)

jean-marc gavanon

Dissident

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

"L'objectif républicain, c'est celui d'attirer tout le monde vers le haut, ce n'est pas d'abaisser le niveau pour que chacun puisse avoir la moyenne." Voilà le type de négation de la réalité à laquelle s'est adonnée la président de la République lors de ses voeux, improvisés, au monde de la connaissance et de la culture.

Que demande-t-on chaque année aux examinateurs du baccalauréat et du brevet des collèges? Pourquoi met-on en place des commissions de rattrapage systématiques qui gonflent le nombre de reçus à ces examens. Tous les enseignants qui notent de manière trop sévère, sont sommés de se raviser car ils nuisent à leurs élèves par rapport au "contrôle continu", ils s'écartent de la "moyenne académique ou départementale".

Sur la rémunération des profs et leur place dans le société, c'est tout aussi déroutant. "La question de la place des enseignants dans notre société, de leur formation, cher Luc CHATEL, et de leur rémunération, est centrale. Pas pour ce gouvernement, pas pour la droite, pas pour la gauche, pas pour la majorité ou l'opposition, elle est centrale." Et on annonce le gel des salaires pour les trois prochaines années. Le pouvoir d'achat est en berne depuis bientôt dix ans.

Sur leur place dans la société et la considération qu'il leur porte, c'est la même hypocrisie : " Comment voulez-vous que nous ayons un système satisfaisant quand si peu d'enfants dans une classe se disent, en regardant leur maître : « j'aimerais un jour être à sa place ». Pardon de poser la question avec une telle franchise, mais elle se pose quand même ! Le maître d'école d'autrefois, --n'ayons pas une nostalgie qui serait déplacée, et sans doute trop facile --, mais dans l'autorité « naturelle » qui était la sienne, il y avait quand même le fait que tant d'enfants dans sa classe se disaient : « la réussite, un jour, cela sera de faire comme lui, d'être moi aussi sur l'estrade et de dispenser un savoir »." On regrette l'ancien temps et les projets de loi à l'Assemblée démantèlent le statut des fonctionnaires (article ici). Ce double-discours qui entretient les contre-vérités et la confusion dans l'esprit public non averti est insupportable. Il explique le boycott des voeux présidentiels par la plupart des organisations syndicales.

Il explique aussi la reprise au mot de l'aveu de la défaillance de la formation initiale instaurée cette année et qui est une non-formation. Les échos remontent des classes : ce sont les parents qui grognent, plus seulement les profs. Les démissions se multiplient, les candidatures aux concours de recrutement se tarissent, mettant en péril cette fameuse "excellence" dont le président veut parer le système éducatif. L'ampleur de la déflagration promet des retombées électorales sévères : trop d'élèves sont touchés par le brouillon de réforme mal ficelé (article de Mediapart ici).

L'échec des réformes de Darcos, Pécresse et Chatel, tous les trois présents pour soutenir leur président, est patent. Le monde de l'éducation souffre de voir le niveau baisser, les inégalités entre les établissements se creuser. Le fossé entre le collège et le lycée devient un gouffre, les postes supprimés sabrent dans les options et les possibilités de soutien aux élèves les plus en difficulté. La montée des faits de violence ne reçoit aucune réponse crédible, juste des lubies sécuritaires qui s'avèrent toujours être des échecs. 16 000 postes supprimés en 2011 (la rédaction de Mediapart relaie le message des manifestations ce samedi 22 janvier contre ces suppressions de postes, ici). Comment peut-on espérer améliorer, réformer l'éducation nationale avec de telles saignées?

Alors le président peut mettre sa main dans la poche, affirmer tenir un discours franc et non préparé... Il ne met pas la main à la poche pour essayer de sauver l'éducation nationale. La langue de bois d'un Jack Lang avait au moins le mérite de noyer les problèmes dans les arcanes de la rhétorique. Ici, le discours du président Sarkozy est une négation de la réalité. Une provocation?

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.