Billet de blog 18 avril 2012

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Le sida, la gauche et les sujets qui fâchent. Partie 1 : expertises

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Dans le cadre de son action autour des élections, “Sida : battre la campagne”[1], Act Up-Paris  a organisé le 12 avril une discussion publique avec les représentantEs des partis de gauche suivants : PS, EELV, Front de Gauche, NPA. Cette réunion a abordé les questions liées aux drogues, aux malades en prison, au travail du sexe et à l'impact de la politique migratoire sur la santé des personnes.

Sur chaque sujet les représentantEs des candidates ont été interpellées :

Les revendications et l'expertise sur laquelle elles se fondent

(Jérôme Martin, Act Up-Paris, Caroline Izambert, Act Up-Paris et ODSE, Laurent Jacqua, Act Up-Paris, Morgane Merteuil, STRASS)

-      Les sujets choisis montrent une opposition de la santé à la répression. Même sous des gouvernements de gauche, les choix politiques n'ont pas remis en cause la priorité à la répression, contre la santé.

-      Toutes les revendications s'appuient sur une expertise de terrain, une expertise scientifique, de la colère face à des contaminations qui ne devraient plus se produire et des drames évitables. Malgré notre expertise, malgré toutes les preuves, la gauche continue de disqualifier nos revendications comme étant de l'utopie, de l'irréalisable, du rêve ou de l'extrêmisme. Pourtant, nous sommes dans la réalité de l'épidémie, et ces discours de disqualification évitent avant tout à la gauche de se poser les bonnes questions. Nous ne voulons plus de ces pratiques de disqualification.

-      Concernant les drogues :

-      on doit rappeler que l'horizon de la répression, c'est la prison.  En 2009, il y a eu 15 500 peines d'emprisonnement pour ILS (Infraction à la législation de stupéfiant), dont 8 500 pour usage simple (détention ou consommation). Voir toute l'horreur sanitaire de la prison, ci-dessous, pour évaluer les premiers dégâts de ces choix répressifs. L'autre horizon est international. Par son soutien à la drogue, la France permet des situations intolérables comme celle de la Thaïlande où on a armé des milices pour tirer sur les usagErEs de drogues. En Thaïlande, 95 % des UD sont séropositifVEs au VHC, 50 % au VIH. Lorsqu'on nous dit qu'il est utopique de vouloir légaliser les drogues, il serait bon de se rappeler de cette réalité.

-      En France, toutes les mesures importantes de RDR (Réduction des Risques) ont été prises avec du retard, à cause de la répression : autorisation de vente de seringues, échange de seringues, institutionalisation de la RDR. Elles ont été prises par la droite. La gauche a donc des choses à prouver à cet égard, même si c'est elle qui a créé la MILDT et y a mis à ses débuts une figure importante de la RDR.

-      Aujourd'hui, de nouveaux outils de RDR sont nécessaires Mais le cadre répressif rend impossible toute innovation. Les salles de consommation à moindre risque et l'immense travail de lobby nécessaire pour convaincre de leur utilité, alors que les études scientifiques l'ont parfaitement démontrée, montrent que nous allons encore payer un prix en vies humaines immense la répression des drogues, de toutes les drogues.

-      Les partisans de la prohibition ne justifient pas leur entêtement. A quand une évaluation scientifique de la guerre à la drogue (elle existe déjà en partie) ? Voir l'exemple de la Déclaration de Vienne, initiée par des scientifiques, qui en appellent à une telle évaluation. De fait, toute l'expertise de terrain et les données existantes montrent que la prohibition a un coût sanitaire et social bien plus important. A  ce titre, nous demandons la légalisation, qui implique à la fois la dépénalisation, la reconnaissance légale des produits mais aussi la régulation de leur production, et de leur circulation.

-      Concernant l'impact des politiques migratoires sur la santé des personnes :

-      Tout le monde connaît les atteintes faites à la santé des étrangerEs et donc à la santé en général depuis plusieurs années. En 10 ans, 5 lois ont modifié le CESEDA, ces lois ont fabriqué des situations irrégulières. Des personnes régularisées pour soins ont de plus en plus de mal à faire reconnaître leurs droits. Ce sont les assos de LCS qui ont arraché en 1998 que ces personnes ne soient plus expulsables et en 1999 qu'elles soient régularisables.

-      L'an dernier, ce fût la fin du plein droit. Le texte voté l'an dernier est inacceptable, il faut revenir au texte de 1999, et à sa bonne application. Les médecins des ARS anciennement médecins des DDASS, sont parfois des contractuelLEs, et ce sont eux qui vont rendre des avis, sachant que les préfets font pression sur eux. Il faut s'attaquer aux textes mais aussi aux conditions de leur application. Toutes les études épidémiologiques le confirment, les personnes arrivent en meilleure santé que la population générale, mais les conséquences des lois qui les concernent en terme de séjour font le jeu de l'épidémie.

-      Autre point, l'AME, c'est un dispositif d'exception par rapport à la CMU, aujourd'hui l'AME est payante, le PS s'est engagé à abroger cette mesure, mais il faut aller plus loin, on doit penser à des régularisations massives, les étrangerEs peuvent être intégréEs à la CMU, ça doit être fait, dès juin prochain, et nous l'exigeons.

-      Concernant les prisons :

-      On ne parle pas de la prison dans cette présidentielle, or, c'est 70 000 personnes, xx VIH xx VHC. La peine moyenne est de 9 mois, 86% des entrantEs prennent moins d'un an. Il faut vider les prisons, utiliser les aménagements de peine. Dans les prisons il y a des étrangerEs, des des personnes soufftrant de problèmes psy (40 % de la population pénale a des problèmes psy), des travailleurSEs du sexe, des usagErEs de drogues, des primo-délinquantEs etc. C'est une population d'oubliéEs, il faut abolir les lois qui enferment et les lois type peines plancher, rétention de sûreté.  Et il faut arrêter de construire de nouvelles prisons :  3 milliards et demi consacrés à cela !

-      Rien n'est fait en matrière de santé. La loi de 94 prévoit l'égalité des soins et ce n'est pas du tout le cas. En matière de prévention du VIH et des hépatites virales, par exemple, il y a urgence à mettre en place des PES (programmes d'échange de seringues), de la RDR. Aujourd'hui, c'est 1 seringue pour 5 personnes. La suspension de peine, les malades meurent quelques mois après son application. La suspension de peine doit être accessible réellement aux détenuEs, il faut insister sur l'incompatibilité de la maladie et de la prison. Et les éluEs doivent entrer dans les prisons, dans la promenade et rencontrer les détenuEs et voir et savoir ce qu'il se passe à l'intérieur. Et que va t-on faire de Thierry Calvy ? Il est co-infecté VIH et VHC, il doit sortir en 2027, son coeur est bousillé à 40%, il a fait 3 TS, et ce n'est qu'un exemple, parmi de nombreux autres.

-      Concernant les travailleurSEs du sexe :

-      On assiste à une division sur cette thématique à l'intérieur de la gauche. L'abrogation du délit de racolage fait l'unanimité. Elle a eu des conséquences catastrophiques : isolement, éloignement, précarisation, vulnérabilité, exposition aux violences et à l'exploitation.

-      La gauche a compris cela et au lieu de pénaliser les putes, veut à présent pénaliser les clients alors que cela aura les mêmes conséquences que la pénalisation du racolage. Nous sommes toujours considérées comme des victimes qui ne savent pas ce qu'elles disent. Sur les drogues on a réussi à passer de l'idéologie au pragmatisme, mais sur le travail du sexe rien. Il y a quelque chose à faire au niveau des clientEs, de la prévention par exemple, c'est nous qui sommes en contact avec eux, il s'agit de vos maris, de vos frères et de vos petits amis.

-      Nous demandons aussi des droits puisqu'aujourd'hui, nous avons pour seuls droits de payer des impôts.

 1-   http://www.actupparis.org/spip.php?article4687

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