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Billet de blog 29 juin 2025

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La vie quotidienne d'un prof - Semaine 37

Ce matin, je propose un quiz, et c’est les élèves qui écrivent les questions. Chaque classe en trouve une cinquantaine, ils ont bien joué le jeu. Et puis à la fin, le moment étrange, à la fois libérateur (pour eux) et triste : on se dit au revoir, et je sais que la plupart je ne les reverrai jamais. J’aime pas, ce moment.

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Lundi 23 juin – Musique d’entrée en classe : Noir Désir, L’Homme Pressé

     Aujourd’hui, il y a un lien entre la musique d’entrée en classe et le contenu du cours : les 3ème sont en révisions pour le brevet. Ce matin, exo d’analyse de documents. Je leur précise : il faut PAS faire l’homme pressé, mais y aller touuuuut doucement ! Bien lire les questions, chaque mot, les documents à fond, même les petites lignes. Mais autant faire pipi dans une cornemuse : la plupart des élèves ont une lecture aussi furtive qu’un gouvernement français.

Nouvelles questions-libres-et-anonymes des 4ème (voir l’article de la semaine dernière) :

  • Vous préférez mourir brûlé ou gelé ?
  • C’est quoi le pays le plus visité au monde ? (C’est la France, depuis longtemps)
  • Pourquoi les profs me croient pas même quand je dis la vérité ?
  • A quel âge vous avez fait votre première fois ?
  • Il y aura une 3ème guerre mondiale ?
  • Je peux demander à ne pas être dans la classe de quelqu’un l’an prochain ?
  • Si je suis en danger, comment je fais pour en parler ?
  • La France va entrer dans le conflit entre Israël et l’Iran ?
  • Vous vous entendez bien avec (nom de collègue)? Quel est le prof que vous aimez le moins ? (Là, j’explique que je peux pas répondre)
  • Que pensez-vous des gays ? Des personnes qui changent de sexe ?
  • Est-ce qu’une femme peut violer une fille de 13 ans ?
  • Est-ce que les moustiques ont une religion ?
  • Avez-vous un animal de compagnie ? (J’aime bien répondre : oui, un garçon de 6 ans)
  • Quel est le pays le plus riche du monde ?
  • Pourquoi on doit passer le brevet ?
  • Vous êtes payé combien ?

J’aime bien, quand les enfants libèrent leur parole et leur curiosité.

Mardi 24 juin – Musique d’entrée en classe : Scorpions, Holiday

     Encore une musique dans le contexte, puisque ce soir les élèves sont en vacances. Sauf les 3ème qui révisent encore. Ce matin, je propose un quizz, et c’est les élèves qui écrivent les questions. Chaque classe en trouve une cinquantaine, ils ont bien joué le jeu. Et puis à la fin, le moment étrange, à la fois libérateur (pour eux) et triste : on se dit au revoir, et je sais que la plupart je ne les reverrai jamais.

J’aime pas, ce moment.

Illustration 1

Plusieurs élèves me remercient pour l’année, voire les deux, passées ensemble. Chloé (1) (la même que la semaine dernière) et une de ses copines m’apportent : des fleurs, des cookies, des lettres d’au revoir, des bougies parfumées, et un lot de crayons « Spiderman » pour mon fils. Je suis touché. Celles-là, et quelques autres, je vais m’efforcer de ne pas les perdre de vue. Trop attachant(e)s. Trop attaché.

     L’après-midi, j’ai 8 élèves avec moi, en mode garderie organisée. On fait des jeux d’histoire géo, des filles de 4ème adorables dessinent au tableau, m’écrivent des mots gentils, je prends des photos souvenirs. On se dit au revoir. Ceux-là, je les reverrai l’an prochain. C’est moins pire.

Mercredi 25 juin

     Journée de tri, de rangement, de vide après le marathon, vieux documents, archives… des dizaines de pages à la poubelle (recyclée). Je mets de côté les photocopies non utilisées, pas « gâcher », peut-être réutiliser l’an prochain. Geste symbolique, dérisoire au milieu des tonnes de papier foutus en l’air.

     Je mets de côté les documents, rapports, cahiers d’activité, livres, auxquels je n’ai même pas jeté un œil cette année. Le livre sur la psycho de l’ado : pas ouvert depuis des mois. Je regarderai pendant les vacances…

Jeudi 26 juin

     C’est le brevet pour les 3ème. Aujourd’hui, je suis de surveillance. Dans ma salle on est 2 profs, 2 AESH, et… 2 candidats ! Il y a 2 autres inscrits mais ils ne viendront pas. Dans ma salle il y a juste ceux qui passent :

  • Le brevet « professionnel », plus simple que le « général »
  • Avec AESH (pour un candidat, pas l’autre)
  • Avec dictée aménagée (un texte à trous)
  • Avec un tiers de temps en plus

Dans les autres salles, il y a les brevet pro sans tiers temps, les tiers temps sans dictée aménagée, le brevet « général », avec ou sans AESH, avec ou sans tiers temps, avec ou sans olives, vous voulez des champignons, sauce tomate ou crème fraiche, pas d’allergie ?

     Les surveillants, on s’ennuie ferme ! Et l’épreuve de français, pause comprise, dure 4h15. Celle de maths, 2h30. On regarde les mails, on trie nos documents, je finis mon journal, je marche dans le couloir parce que mal au dos et aux fesses d’être assis… Et on est contents que les candidats finissent avant l’heure limite.

     Des élèves m’apportent d’autres cadeaux : un t-shirt de la couleur que je préfère, marqué au feutre, des origamis, un autre cadeau pour le petit…

     Je reste au collège jusqu’à 19h : on reçoit les copies d’autres collèges du coin, qui seront corrigés chez nous, pendant que les nôtres partent ailleurs. Mélange des copies pour anonymat des élèves. Un des collèges manque à l’appel. On a attendu leurs copies pendant 1h. Pas venus, pas prévenu. On a quand même rigolé, faute de mieux.

Vendredi 27 juin

     Le brevet continue aujourd’hui, mais je surveille pas. Je découvre chez moi le sujet d’histoire géo : mauvaise surprise ! Bon, sur les trois exos, il y en a toujours deux assez classiques, on tombe rarement de notre chaise : une étude de documents, un exo d’EMC, les élèves peuvent toujours dire quelque chose. Et puis il y a le « texte construit », exercice redouté car il faut, à partir d’un sujet en 1-2 phrases, imaginer une question un peu complexe, puis un plan en 2 parties différentes pour y répondre, en mettant des infos venant des leçons, parfois dans le désordre.

     Exemple simple. Sujet : « Expliquez les souffrances vécues par les soldats et les civils pendant la 1ère guerre mondiale. » A priori, fastoche ?

  • Une question de départ peut être, par exemple : « Pourquoi peut-on dire que la 1ère guerre mondiale a été d’une très grande violence ? » Et je vous assure que rien que trouver ça, une bonne moitié des gamins n’y arrive pas.
  • Ensuite, en partie 1 on parle de la « souffrance des soldats », et en partie 2 la « souffrance des civils ».

Vous suivez ?

     Mais cette année !! Voilà le sujet pondu : « Expliquez l’accès à l’indépendance d’une colonie de votre choix. Vous préciserez les principaux acteurs, les étapes et les conséquences. »

     Bien bien bien… Alors déjà, quelle colonie ? On en a vu plusieurs en classe, mais l’Algérie avec plus de détails. Et l’Inde, aussi. Merde. Laquelle choisir ? Ensuite : « les acteurs, les étapes, les conséquences ». Re-merde : ça fait 3 parties, ça, pas deux. Or, on les entraine jamais à faire 3 parties ! Je ne me souviens pas avoir lu un sujet qui appelle 3 parties (mais ça m’a peut-être échappé). Et peut-on vraiment faire 3 parties, là, et séparer les acteurs des événements ? Franchement, je dubitate.

     Oui, mais si on fait 2 parties, lesquelles ? Ça peut être « avant De Gaulle et après De Gaulle », mais faut que les gamins soient drôlement forts pour le trouver eux-mêmes. Et puis, la Guerre d’Algérie, elle fait même pas une demi page dans mes cours, vu tout ce qu’on doit leur balancer en un an. Bref : sujet piège, difficile pour la quasi-totalité des élèves, juste de quoi saper leur confiance, les stresser, les dévaloriser. Finir l’année comme ça…

     J’écris ce soir à mes deux classes pour les rassurer : oui, sujet difficile, et j’espère que nos consignes pour la correction seront plutôt souples. Ah oui, parce que les élèves, ce soir, ils sont tous en vacances ! Mais pas nous. On a encore une semaine de boulot. Au moins. Vous verrez ça.

(1) Prénom modifié

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