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Billet de blog 31 août 2025

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De l'été à la rentrée

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Lundi 25 août

On s’est quittés, vous et moi, le 11 juillet. Je n’ai donc pas eu « deux mois de vacances » comme le dit la légende, mais six semaines. C’est déjà bien, hein ! Sortez pas les flingues ! Je me plains pas. Cela dit, c’était pas non plus six semaines de déconnexion totale.

J’ai lu. Pour terminer le livre sur la Psychologie de l’Adolescent (1) commencé il y a un an. Livre très complet, je comprends mieux comment sont mes collégiens, là-dedans. En bref : un joli bordel. Ça n’excuse pas tout, mais ça explique beaucoup.

J’ai lu. Un numéro spécial du Monde sur « La fabrique de l’Opinion » : propagande, réseaux sociaux, mensonges illimités, fake news et IA. C’est moins joyeux que des Sudokus sur la plage, quand même.

J’ai lu. Le Courrier International, comme chaque semaine, mais je ne me réabonnerai pas : c’est 2 à 3 heures de lecture par semaine, et j’ai besoin de temps ; triste choix.

J’ai lu. Commencé un Atlas des Migrations (2), pour être à jour sur les migrations à l’échelle planétaire, et mieux en parler aux élèves, notamment aux 4ème qui ont un chapitre sur ce sujet… sensible.

J’ai lu. Le 23 juillet, les nouveaux programmes d’histoire-géo prévus pour la rentrée 2026. Je vérifie, après 2 heures de lecture, si la réforme est toujours valable : coïncidence ! La réforme serait annulée, et la nouvelle tombe pile aujourd’hui ! Les dieux de l’éducation (3) sont avec moi. Bon, l’info n’est pas confirmée du tout, mais je mets le sujet en stand-by. J’ai pas le temps de lire pour rien.

En août, j’étais en famille pendant deux semaines. J’ai travaillé un peu, une heure ou deux par-ci par-là. Surtout par-là, d’ailleurs : par-ci c’était plutôt canicule, baignade et rosé frais. Encore des lectures, des mises à jour, des nouveaux documents pour la rentrée, une remise à neuf du 1er chapitre de géo de 5ème, encore très imparfait, etc.

Et ce lundi 25 août, je rallume le PC, je retrouve mon fauteuil, mes dossiers. C’est vraiment la fin des vacances. Je dois préparer les premiers cours, jeter les bases de cette nouvelle année pendant laquelle je vais changer pas mal de choses, après 4 ans d’essais et d’expériences. Le plus important : je donnerai désormais, à tous les élèves, toutes les leçons déjà imprimées. Je n’y vois que des avantages :

  • Gain de temps : si vous saviez comme ça écrit lentement, un enfant !
  • Equité : les élèves qui ont du mal à écrire (certains sont même incapables de se relire) ont quand même la leçon complète et lisible
  • Efficacité : on passe plus de temps sur des trucs vraiment utiles

Ce changement m’oblige à repenser tous les chapitres. J’en profite pour reprendre les exos, j’en ajoute, j’en enlève, je les précise, je les complète. Vous allez dire que je suis jamais content, et vous aurez raison.

Je m’occupe d’une classe par jour : lundi les 3ème, mardi les 4ème, mercredi les 5ème. J’ai un 1er chapitre de prêt pour chaque classe. Je suis content, rien que pour vous donner tort.

Mercredi 27 août

Y’a des détails qui trompent pas, y’a une rentrée qu’habite chez moi (copyright Benabar).

Ces détails s’appellent des emails.

  • Sans nouvelles de l’organisme qui assure les transcriptions en braille pour ma future élève non voyante, je les relance. Réponse : la dame qui gère son cas est en congé maladie. J’avais envoyé un 1er document à transcrire début juillet, pour qu’elle ait le temps. Rien n’a été fait, et j’ai besoin du doc dans une semaine. Il parait que ledit organisme croule lui-même sous la tâche.
  • Mail du rectorat, qui nous envoie les nouveaux programmes d’histoire-géo (que j’ai déjà, donc) en précisant que les anciens restent en vigueur pour cette rentrée. C’est réconfortant, à trois jours de ladite.
  • Mail de la direction du collège, qui nous donne le programme de vendredi, jour de pré-rentrée. Il y aura au moins du café et l’apéro. Je sors le short et le dossard : starting-blocks !

Jeudi 28 août

On reçoit nos emplois du temps. C’est une autre joyeuseté du métier : on découvre en tout début d’année comme sera organisée notre année, et ça change chaque année. Les profs attendent leur emploi du temps comme LA seule nouvelle importante. Un planning mal foutu, et tu en baves comme une brassée d’escargots en balade sur un tapis de vinaigre.

Pour moi, pas de mauvaise surprise : la cheffe a pris en compte mes demandes, j’aurai des journées pas trop chargées, plusieurs moments libres pour bosser, et je garde la même salle toute la semaine (la même que l’an dernier). Il reste quelques détails, mais je suis plutôt content, rien que pour vous redonner tort !

Vendredi 29 août

C’est officiellement la rentrée. Le prof fait son autotest : dans quel état je me réveille ? J’ai un sac à parachute sous les yeux ? Besoin de huit cafés ? Mal au bide, envie de partir loin, genre île Amsterdam ? Sourire et joie youkaïdi youkaïda ? Chez moi c’est plutôt neutre : je ne saute ni au plafond ni dans les flammes immolatrices. Je prends ça comme une bonne nouvelle, vu l’état général des profs.

Alors ce matin, je remets la clé du collège sur le porte-clés, je prends la voiture, la route, je me gare, j’ouvre le portail, je traverse la cour, je me suis arrangé pour arriver pile à 9h et éviter un maximum de « salut-ça-va-alors-les-vacances ». La salle de réunion est blindée, trop petite pour ce collège tout neuf et déjà mal pensé. Je reste au fond, près des croissants et des pains au chocolat.

La journée est une suite de prises de paroles plutôt techniques sur l’organisation de la rentrée, les projets et actions qui redémarrent, l’accueil des nouveaux, les résultats du brevet et ce que deviennent les 3ème… Et puis les joyeusetés :

  • Un prof de SVT manque à l’appel ; le rectorat en a trouvé un, mais le type n’est plus prof depuis 3 ans.
  • On accueille une nouvelle collègue en histoire-géo, pour 6h de cours. Elle est emmerdée : elle est censée faire aussi un temps plein dans un autre collège. Pendant qu’on en parle, elle reçoit un coup de fil du rectorat. Finalement elle fait juste son temps plein et rien chez nous. On se dit bonjour et adieu en moins d’un quart d’heure. Elle repart. On ne sait pas qui sera là à sa place.
  • L’ancienne prof de la classe Ulis (élèves avec handicaps) est partie, on n’a pas de remplaçant(e). C’est déjà arrivé, et les élèves Ulis suivaient toute la semaine les cours en classe « normale ». Un enfer, surtout pour eux, la cheffe parle même de maltraitance. Elle a donc décidé que, tant qu’ils n’ont pas de prof dédié, les Ulis viendront un peu en classe « normale » et passeront le reste du temps chez eux. Pour leur propre bien-être.

On reçoit la liste des élèves par classes. J’en retrouve plein que j’aime beaucoup, ça fait plaisir, même si d’autres vont bien me manquer.

On se réunit entre collègues d’histoire-géo pour relancer le travail d’équipe. Et j’imprime mes deux premiers kilos de photocopies. Je sors du collège, je referme le portail, je rentre à la maison. Prochain rendez-vous : lundi matin, accueil des 6ème. Il me reste deux jours avant la tempête.

(1) Pierre Goslin, Ed. Armand Colin, 2006

(2) Catherine Wihtol de Wenden, Ed. Autrement, 2025

(3) Si, ils existent. Ce sont les petits cousins des dieux de l’hôpital, et les petits-enfants des dieux du service militaire

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