C'est un peu l'histoire du cordonnier mal chaussé, avec ma pomme dans le rôle du cordonnier...
En participant mardi 26 mai à l'enregistrement de l'émission La Ligne jaune du site Arrêt sur Images, j'ai appris que mon enquête de mars 2008 sur «les folles dépenses de Rachida Dati» avait été à l'origine de l'initiative du député socialiste René Dosière de passer au crible les dépenses d'une vingtaine de ministères, et dont les résultats, parfois ébouriffants, ont été publiés, début mai, au Journal officiel.
C'est René Dosière himself, chantre infatigable de la transparence budgétaire de l'Elysée et du gouvernement, qui a lâché l'information sur le plateau de La Ligne jaune (animée par Guy Birenbaum), où il était également invité. Les confrères d'@si ont gentiment fait le teaser de l'émission là-dessus:
Mathilde Mathieu, ma camarade de bureau qui suit la vie parlementaire pour Mediapart, avait, la première, rendu compte fin avril, sur son blog, des résultats de l'enquête inédite du député Dosière. On y apprenait notamment que la parc autombile affecté à la garde des sceaux comporte rien de moins que vingt voitures et dix-neuf chauffeurs. Que les frais de représentation de la ministre se sont élevés à 270.000 euros, comme nous l'avions révélé. Et que son budget communication a atteint les 3,2 millions d'euros, dont 213.000 euros pour «l'organisation d'évènements», 315.000 euros pour «l'achat d'outils de communication», ou encore 118.000 euros pour la réalisation de sondages.
Les indiscrétions du député de l'Aisne (photo), qui a dû attendre neuf mois avant d'avoir des réponses (forcément parcellaires) du gouvernement à ses questions, ont aussi permis de découvir que Rachida Dati avait dépensé plus de 415.000 euros en déplacements aériens et que le ministre de la défense dispose, pour lui seul, de cinq voitures, dont une blindée. Au total, la communication a représenté la bagatelle de 50 millions d'euros pour la vingtaine de ministères passés à la loupe.
A en croire René Dosière, c'est donc Mediapart qui est, en quelque sorte, à l'origine de ces découvertes. Alors ne boudons pas notre plaisir. Mais désespérons aussi. Désespérons de voir que ces révélations ont suscité, ici, en France, si peu d'indignation, avec une onde de choc politique aussi plate que l'eau qui dort. Un coup pour rien, ou presque, comme si l'opinion, une bonne partie de la presse et l'opposition était sous anesthésie générale.
De l'autre côté de la Manche, c'est pourtant tout le contraire qui vient de se passer sur un sujet d'ordre similaire, celui des notes de frais des parlementaires. L'affaire, dont le quotidien The Daily Telegraph est à l'origine grâce à une campagne de scoops qui va, je pense, entrer dans les annales du journalisme, a eu, là-bas, de vraies conséquences: le speaker de la Chambre des Communes, le travailliste Michael Martin, a dû démissionner - cela ne s'était pas vu depuis trois siècles! -, sous le poids de l'opinion publique.
C'est tout l'objet du débat de La Ligne jaune, que l'on peut voir en intégralité en cliquant ici.