Notre déclaration d'intention de départ n'a pas pris une ride : « Nous ne sommes pas les seuls à dénoncer la dérive d’enfermement dans notre pays et en Europe, et la dramatique inéquité dans le traitement des personnes. Fini de rire ! N’attendons plus pour changer notre regard sur les migrants qui vivent parmi nous, et nous verrons plus clair sur le sort des autochtones ».
Sa lecture provoque aujourd'hui un rictus. En effet, les conditions d'accueil que nous considérions alors inacceptables se sont horriblement dégradées, comme nous l'avons chroniqué au fil du temps.
Le relais de la dénonciation de la politique de non-accueil des exilés est largement assuré1. Nous remercions nos quelques centaines d'abonnés pour l'intérêt qu'ils ont pu manifester pour nos billets. Notre audience est restée modeste, mais la dénonciation reste.
En outre, la prédiction de contamination de la surveillance et des mauvais traitements administratifs des personnes étrangères vers la population générale est amplement vérifiée. Nous avions d'ailleurs choisi le titre du blog en référence à une apostrophe de Maurice Clavel dans son film Le soulèvement de la vie, où il évoque une réduction drastique des salaires dans l'industrie naissante du 19ème siècle, enchaînant les ouvriers à des horaires de travail inhumains.
Pour les lecteurs curieux d'en savoir plus
sur le parcours de vie de Jean-Claude Vernier (1943-2023),
une série de cinq podcasts sera diffusée
sur le site L'oeil de l'info à partir du 12 janvier 2024.
Dernier clin d'oeil, tentons un parallèle : au delà des différences de contextes politique et technologique,
quels échos entre le Libération des débuts (1971-1974), tel que le voulait Jean-Claude Vernier, et Mediapart 2?
Genèse d'un quotidien
Libération : Premier numéro : 18 juin 1973.
Créé dans dans la mouvance maoïste. Première équipe issue de divers militantismes, avec trois journalistes professionnels. Âge des acteurs : 25-30 ans.
Mediapart : Premier numéro : 16 mars 2008.
Site d'information créé par des journalistes expérimentés et des spécialistes en informatique et marketing. Âge des acteurs : 40-55 ans.
Objectifs affichés
Libération : Ce qui importe dans l’information c’est de donner de quoi réfléchir. Ce n’est pas de recevoir des idéaux ou des points de vue ; c’est d’avoir des éléments pour nourrir une réflexion.
Quelques slogans :
- Tout dire à ceux qui veulent tout savoir
- Un journal transparent
- Un journal qui appartient à ses lecteurs Peuple, prends la parole et garde-la.
Mediapart : Plusieurs des cofondateurs viennent de la direction du Monde, où ils dénoncent la mise en place fin 2005 du concept de journalisme de validation plutôt que celui d'investigation.
Principes fondamentaux : l’actualité quotidienne, les enquêtes et le temps long, la mémoire de nos archives, le participatif et les nouveaux genres éditoriaux.
Une information de qualité, hiérarchisée et documentée, au service de l’intérêt public.
Un journal indépendant et participatif se situant à gauche.
La participation des lecteurs (Libération)/ des abonnés (Mediapart)
Libération : Fin 1973, arrêt de la participation des comités locaux.
Développement du Courrier des lecteurs, évolution vers ce que seront plus tard les sites de rencontre.
Mediapart : cohabitent, dans deux espaces distincts et clairement identifiés, les articles de la rédaction du journal et les contributions des lecteurs (dans les éditions participatives, dans les blogs personnels), la modération se faisant selon un principe de responsabilité individuelle et collective.
Les moyens techniques
Libération : Collecte : téléphone, poste, fax
Fabrication : l’offset, une technique de reproduction apparue en 1970
Diffusion par la poste et les NMPP.
Mediapart : Plateforme en ligne accessible par internet. Application mobile.
Présent sur les réseaux sociaux Facebook, Twitter et Instagram.
Le financement
Libération : 1973. Le quotidien se veut sans publicité ni actionnaires financiers. Contributions ponctuelles de certains militants par ailleurs héritiers. Une collecte auprès des lecteurs rapporte l'équivalent à 0,5 million d'euros 2021.
(Par la suite, introduction de la publicité. En 1994 puis 2005, prise du contrôle financier du journal par divers groupes de capitaux. En 2022, le journal est sis dans un fonds de dotation détenu par un milliardaire français.)
Mediapart : Le capital de départ est constitué d'apports personnels des fondateurs pour un montant total équivalant à 1,5 millions d'euros en 2021. Ce capital est ensuite ouvert à des investisseurs partenaires et une Société des amis de Mediapart (87 donateurs).
Depuis 2019, la totalité des parts du média est détenue par un fonds à but non lucratif. Une manière de se préserver des aléas du capital et donc d'assurer l'indépendance du journal
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1Mentionnons en particulier le blog de Daniel Gros, Mayotte, c'est loin. J'y habite. Ancien CPE du Lycée de Mamoudzou, il chronique sans se lasser la barbarie administrative envers les migrants. Une expérimentation dans ce département lointain de pratiques futures dans l'hexagone ?
2 Sources : Une nouvelle formule de Mediapart et Wikipedia (pages Libération, Mediapart).
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