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Billet de blog 10 décembre 2025

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Dénoncez des décennies de violations des droits politiques et civils au Rwanda.

Les mauvais traitements dont Mme Victoire Ingabire est victime témoignent des restrictions imposées aux droits politiques, à la liberté d'expression et d'opinion, ainsi que du manque d'indépendance du système judiciaire au Rwanda. Son cas doit être évoqué lors du prochain Examen périodique universel (EPU) du Rwanda, qui est prévu en janvier 2026.

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Il est heureux de constater que l’Examen Périodique Universel (EPU) du Rwanda se tiendra bientôt en janvier 2026. L’EPU est un mécanisme unique en son genre du Conseil des droits de l’homme. Durant l’EPU, chaque État membre procède à une évaluation par les pairs de son bilan en matière de droits de l’homme. Chaque État membre des Nations unies doit également rendre compte des mesures qu’il a prises pour améliorer la situation des droits de l’homme à l’échelle nationale et pour surmonter les obstacles à leur exercice.

Dans le cas du Rwanda, force est de constater que la situation des droits de l’homme n’a cessé de se détériorer depuis la première session de l’EPU en 2011. Le rapport de Freedom House pour l’année 2025 donne au Rwanda un score de 21% sur le respect des droits politiques et civils, ayant été 23% pour l’année précédente.

A titre d’exemple lors de la session de janvier 2021, le gouvernement rwandais avait accepté d’acter sur les 160 recommandations parmi les 284 proposées par l‘EPU. L’EPU avait exprimé sa préoccupation surtout sur les restrictions aux droits civils et politiques, fermeture de l’espace politique, harcèlement des journalistes, restriction aux libertés d’expression et d’association, la répression continue des critiques du régime, absence d'enquêtes crédibles sur les allégations d'abus relatifs aux disparitions forces ainsi que le manque d'indépendance du pouvoir judiciaire.

Preuve concrète de la dégradation des droits de l’homme au Rwanda.

Mme Victoire Ingabire Umuhoza est une figure politique rwandaise emblématique, connue pour son engagement pacifique en faveur de la démocratie et des droits humains. Candidate déclarée aux élections présidentielles de 2010, elle a été arrêtée peu après son retour d'exil et condamnée à 15 ans de prison sur la base d'accusations largement considérées comme motivées politiquement. Elle a été libérée en 2018, puis arrêtée à nouveau en juin 2025. Son procès est en cours. Il fait maintenant 174 jours depuis que Mme Ingabire est détenue mais les autorités rwandaises ont refusé de lui autoriser à parler à sa famille, une situation qui viole le droit international des droits de l'homme et aux règles de Mandela  sur le traitement des prisonniers.

La situation de Mme Ingabire illustre parfaitement cette dégradation de la situation des droits humains au Rwanda. Les mauvais traitements continus dont elle fait l'objet sont la preuve concrète des restrictions imposées aux droits politiques, à la liberté d'expression et d'opinion, ainsi que du manque d'indépendance du système judiciaire et de la répression systématique au Rwanda. Son cas mérite d'être évoqué lors de l'EPU du Rwanda, prévu en janvier 2026.

Sheila Paylan, juriste internationale spécialisée dans les droits humains et experte en matière d'égalité des sexes, fait partie de l'équipe juridique internationale de Mme Ingabire. Mme Paylan a examiné le dossier de sa cliente et a constaté de graves violations des droits humains dont elle est victime depuis son retour au Rwanda en 2010.

La juriste rappelle que la Cour africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP) a jugé en 2017 que les droits de Mme Ingabire à la liberté d'expression et à un procès équitable avaient été violés par l'État rwandais.

Elle ajoute que depuis sa libération en 2018, sa cliente n’a jamais retrouvé l’intégralité de ses droits civiques et politiques. Mme Ingabire a été systématiquement empêchée de créer un parti politique ou de se présenter aux élections. Cette exclusion, explique Mme Paylan, constitue une violation persistante de droits de sa cliente à la participation politique et à la liberté d’association.

En outre, les mouvements de Mme Ingabire ont été fortement restreints. “Victoire a fait l’objet d’une interdiction de voyager de facto, ses demandes de sortie du territoire étant systématiquement refusées sans base légale transparente. Elle a subi également des violations du droit à la liberté d’expression, à la vie privée et à la sécurité personnelle, notamment par une surveillance constante, des convocations arbitraires et des menaces récurrentes visant à dissuader toute activité politique. Ces pratiques portent atteinte à plusieurs droits garantis par les instruments africains et internationaux relatifs aux droits humains.” souligne Mme Paylan.

En juin 2025, Mme Ingabire a de nouveau été arrêtée, cette fois pour « incitation à des troubles publics » et « formation d’une organisation criminelle », des chefs d’accusation vagues et dénoncés par de nombreuses ONG comme infondés et politiques. “Ce nouvel emprisonnement montre que la répression à son encontre reste active et ciblée” observe la juriste.

Plusieurs membres de son ancien parti, FDU-Inkingi, ont été victimes d’enlèvements, de disparitions forcées ou même de meurtres depuis 2017. Ces actes s’inscrivent dans un climat d’intimidation généralisée envers les voix dissidentes au Rwanda.

Mme Paylan fait remarquer que le système judiciaire rwandais est instrumentalisé à des fins politiques. Le cas de son client met en lumière les graves déficits d’indépendance de la justice rwandaise et la persistance de violations structurelles des droits humains, en particulier envers l’opposition. Cela réaffirme les risques auxquels les opposants politiques sont continuellement confrontés au Rwanda. Cela réaffirme les risques continus auxquels sont confrontés ceux qui osent critiquer les politiques du gouvernement rwandais. Mme Ingabire continue de faire l'objet d'une répression systématique pour avoir exercé son droit à la liberté d'expression et d'opinion.

Face à cette situation, la juriste trouve qu’il est essentiel que les États membres des Nations unies évoquent le cas de Mme Ingabire lors de l’EPU du Rwanda prévue en janvier 2026. Cela permettra de rappeler aux autorités rwandaises de leurs obligations internationales en matière de respect des droits civils et politiques.

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