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Billet de blog 13 octobre 2013

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L'hebdo du Club (8): des femmes

On ne naît pas féministe, on le devient… L’hebdo du Club célèbre à sa façon la parution du Guide de survie en milieu sexiste de La p’tite Blan, et donne cette semaine la parole aux femmes.

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On ne naît pas féministe, on le devient… L’hebdo du Club célèbre à sa façon la parution du Guide de survie en milieu sexiste de La p’tite Blan, et donne cette semaine la parole aux femmes. Je vois venir l’argument selon lequel il faudrait maintenir un équilibre chaque semaine, et même chaque jour, dans nos choix de Une. Force est de constater que Mediapart en est loin. Sachez qu’on y pense.

Mais revenons à La p’tite Blan, duo formé par Galou & Blan. L’un dessine, l’autre pense. Joke. « On peut le prendre avec humour en sachant très bien de quoi on parle, où on cherche à aller, et ce qu’on doit continuer à considérer comme anormal, brutal ou insupportable », écrit Virginie Despentes dans une préface percutante. Énervée, on le savait, et inquiète : « On se sent beaucoup moins à l’aise en ville qu’on ne l’était il y a dix ans, pas que les mecs soient devenus plus dragueurs, pas du tout, ils sont devenus plus agressifs, ce qui est très différent. »

Pour savoir si l’on est sexiste – « majoritairement les hommes. Mais les femmes aussi. Certaines du moins » –, on peut faire le test dans le livre ou sur le site sexistesanonymes.fr. Et puisque l’on parle tant de politique sur Mediapart, retenons cette définition de La p’tite Blan : « La phallocratie n’est pas un gros mot mais un gros problème. (…) Nous vivons dans des démocraties, des autocraties, des théocraties ou des ploutocraties qui ont toutes un point commun : elles sont phallocratiques ! »

« Le voisin du dessous voulait partir à Lyon et n’avait pas le temps d’attendre les papiers d’assurance. “Je vous donne mes clés”, me dit-il, “vous m’avez l’air honnête…” “Je ne sais pas même votre nom ???” “Chéreau”, me décocha-t-il. “Comme Patrice ?” demandai-je au très premier degré. “Oui, c’est cela, comme Patrice”, me répondit-il, pensant sans doute que j’avais beaucoup d’humour… » C’est Nightingale qui salue l’artiste disparu, « larmes et souvenirs en vrac ». Mes voisins du dessous s’appellent Cartier-Bresson, mais non… Joke.  Delacroix, rien à voir non plus. 

La Dame du bois-joli est allée à la manif, une bien belle manif. « On les renifle les belles manifs. D’abord faut du monde. On compte les gens à pied, les gens en voiture, le bus, on se dit qu’on est à peu près mille et soudain on se dit que ça va être une belle manif car mille personnes pour un petit bled comme le nôtre ben c’est encourageant. Environ mille manifestants pour combattre le projet crétin de la ferme-usine des mille vaches, un manifestant par vache, c’est bien. » 

Dans la classe de Claire Rafin, on saisit la place faite dans l’actualité à Malala, cette « jeune Pakistanaise de 16 ans, proposée pour le prix Nobel de la paix et lauréate du prix Sakharov pour la liberté de l'esprit du Parlement européen » pour « parler de la situation des filles dans certains pays : au Pakistan, on fête la naissance d'un garçon, pas celle d'une fille ». Claire Rafin poursuit : « Comme (les élèves) sont choqués de découvrir le sort réservé aux filles dans le pays de Malala, il faut bien leur expliquer que c'est une forte tendance que de vouloir ôter aux femmes leurs droits. Même en France, cette semaine, à l'Assemblée nationale, un député a trouvé drôle d' imiter le cri de la poule alors qu'une femme, ministre, présentait le projet de loi sur les retraites. » 

Annick V publie lundi 7 octobre une lettre ouverte au président de la région Pays-de-la-Loire, Jacques Auxiette, (il n’y a que deux femmes présidentes de conseil régional) signée de nombreuses réalisatrices et réalisateurs, monteurs, producteurs… En avril, dit cette lettre, le « comité technique » régional a « décidé à l’unanimité d’attribuer une aide au développement de 4 000 euros pour le film de Vincent Lapize, Dernier continent », qui traite « de la question de l’engagement collectif, en retraçant la lutte des militants opposés au projet d’aéroport de Notre Dame des Landes ». Une décision qui aurait dû être soumise au vote des élus. Mais il y a eu un hic : « Considérant que le sujet du film allait à l’encontre du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes soutenu par l’exécutif régional, le dossier a été retiré de l’ordre du jour. » Le rappel du précédent refus du même ordre est cruel : « Il n’y a eu qu’un précédent où l’exécutif régional s’est opposé au versement d’une aide défendue par le comité technique, et votée en commission permanente : c’était en 1998. La région était alors dirigée par François Fillon, et un projet de court métrage de Sébastien Lifshitz traitant d’homosexualité avait été censuré a posteriori, malgré le vote positif du comité d’experts et de la commission permanente. “Une affaire extrêmement grave !” “Un acte de censure.” “L’assemblée régionale ne doit pas intervenir sur le contenu des œuvres”, aviez-vous déclaré dans la presse à l’époque, comparant cette affaire “ à ce qui se passe dans les municipalités gouvernées par le FN et les Régions sous sa tutelle ” (Ouest-France du jeudi 15 octobre 1998). »

Le jour de sa visite de la maison d’arrêt de Villepinte, en Seine-Saint-Denis, explique la députée de Paris (PS) Fanélie Carrey-Conte, «pas moins de 952 détenus et condamnés (…) étaient recensés dans cet établissement pénitentiaire qui ne compte que 587 places ». La «surpopulation carcérale», dit-elle, c’est «une réalité brutale et oppressante. Dans la prison, c’est ce qui saute aux yeux, ce qui structure le quotidien, ce qui est au cœur de toutes les conversations et de tous les problèmes. »

Pour RESF, Armelle Gardien raconte l’histoire de Marjorie, Haïtienne, qui après son mariage avec Laurent, agent de la RATP, aura eu tant de difficultés à faire venir auprès d’eux, en France, ses enfants « d’avant ». Plus de six ans pour obtenir un regroupement familial. « Naïvement, nous voudrions croire que les souffrances qui leur ont été injustement infligées ainsi qu’à leur famille, auront épuisé l’ardeur de ceux qui en sont à l’origine. (...) Nous aimerions penser que ces choses peuvent changer. Pas seulement parce que les gouvernants deviendraient plus “ humains ”, mais parce que les citoyens désavoueraient systématiquement et le leur diraient haut et clair, cette politique contre les pauvres qu'ils soient d'ailleurs ou d'ici. »

En Italie, s’étrangle Marie Morisset, « Enrico Letta, le chef du gouvernement actuel, ose l'infâmie de donner la nationalité italienne aux hommes, aux femmes et aux enfants qui sont morts à Lampedusa la semaine dernière sans la donner aux survivants du naufrage qui, eux, sont menacés d’amendes et d’expulsions ». On apprendra en lisant son billet que l’amendement voté sur proposition des « sénateurs du Mouvement 5 Étoiles de Beppe Grillo (…) pour que la clandestinité ne soit plus un délit » n’est pas le « grand progrès » espéré mais bien plutôt le comble du cynisme. 

Au Brésil, il y aura 50 ans, l’an prochain, que les militaires ont pris le pouvoir, et installé la dictature (qui durera jusqu’en 1985). Encore aujourd’hui, constate Marilza de Melo Foucher, « une bonne partie des forces armées crient au scandale dès que l’on parle de la dictature. Ils comptent toujours avec l’appui des secteurs conservateurs, de segments de la droite et de la grande presse qui fêtent le 31 mars 1964 comme la date la “ glorieuse révolution“ ». Malgré l’installation d’une Commission nationale de la vérité en 2012, « cette partie de notre histoire politique reste un tabou » et se trouve mal enseignée aux jeunes générations. « Ils font tout pour essayer d’effacer ce passé et faire oublier cette période sombre de l’histoire politique brésilienne au nom, selon eux, de l’harmonie nationale. Effacer la mémoire des crimes commis par la dictature, c’est effacer la mémoire des luttes menées contre elle. »

Contre l’oubli, la littérature. L'écrivaine biélorusse Svetlana Alexievitch était citée cette semaine pour le Prix Nobel. Installez-vous confortablement et lisez Le cerf merveilleux de la chasse éternelle, un chapitre inédit d’un livre en cours d’écriture sur l’amour en Russie (mis en ligne par Christian Salmon). Les femmes, les hommes, l'amour, les camps.