Molière par les villages

Tandis que les comédiens et l’équipe technique de Molière et ses masques -spectacle créé au dernier festival du Moulin de l’Hydre (lire ici)-, prenaient la route pour installer le décor (très simple : un rideau qui s’ouvre par le milieu, tendu sur une estrade démontable), disposer un parterre de chaises dans la salle (communale ou des fêtes), et ainsi chaque jour durant une semaine. Simon Falguières, lui, restait avec les marcheurs. Chaque soir le spectacle se donnait vers 18h dans un village et chaque jour un joli groupe de marcheurs faisait le chemin à pied accompagnant l’aventure un ou deux jours voir toute la semaine.https://blogs.mediapart.fr/jean-pierre-thibaudat/blog/090924/au-moulin-de-l-hydre-une-utopie-theatrale-rurale-en-actes

Chaque matin, avant la marche, Simon Falguières ouvrait Par les villages de Peter Handke et lisait aux marcheurs un court extrait du monologue de Nora qui clôt la pièce et s’achève par ces mots : « Le tremblement de vos paupières, c’est le tremblement de la vérité. Laissez s’épanouir les couleurs. Suivez ce poème dramatique. Allez éternellement à la rencontre. Passez par les villages . »

Parti du Moulin de l’hydre, la première étape nous conduisait en haut du village de Saint Denis de Méré (760 habitants),Un village pourvu d’un imposante église, une école, aucun commerce hormis un salon de tatouages, une plaque honorant l’ancien maire, une maison revêche gardée par deux lions et deux anges. Plus haut, avant les pimpants lotissements, une imposante vierge datant de 1858 se dresse orgueilleusement juste avant la modeste salle communale (jouxtant le terrain de foot) où le food-truck rouge baptisée « C’est quoi ce cirque » s’était garé bien avant l’arrivée des marcheurs et de leurs trois gardes du corps : des ânes dont l’un, mon préféré, s’appelait Nikita.

La salle était comble. Elle fut comblée. Depuis sa création malmenée par la pluie au dernier festival du Moulin de l’Hydre en septembre dernier, le spectacle a gagné en force, en souplesse et en rythme. On suit les débuts du jeune Molière, ses problèmes avec son premier protecteur (le prince de Comti) gagné par la bigoterie, sa première pièce, l’Etourdi une comédie (la troupe jusqu’alors ne jouait que des tragédies écrites par d’autres), le couple qu’il forme avec Madeleine avant que cela se complique et bientôt sa mort. Alors, belle idée de Falguières, la troupe raconte au mort tous les chefs d’œuvre qu’il a écrit, jusqu’au  Le malade imaginaire , qui lui fut fatal. C’est effectivement plein de masques comme le titre l’indique, chaque acteur, chaque actrice de la compagnie le K (avec un cas comme Falguières),jouant plusieurs rôles, Molière est interprété par une actrice. Tous s’épaulent, font troupe , citons les : Antonin Chalon, Louis de Villers, Anne Duverneuil, Charly Fournier, Victoire Goupil, Manon Rey.

Le lendemain, les marcheurs ( une bonne cinquantaine) partis de Saint Denis de Méré, empruntèrent des sentiers souvent pentus avant rejoindre la plate coulée verte de l’Orne et d’arriver, dix huit kilomètres plus loin, à Saint-Remy sur Orne, un village un peu plus gros (près de mille habitants, son tabac-papeterie-presse, son boucher, son « Jardin d’Anaïs » avec ses fruits et légumes, etc.). Et l’histoire se répéta. Même affluence, même succès. Comme dans le village précédent certains venaient au théâtre pour la première fois de leur vie et, en plus, c’était gratuit. Tout comme l’atelier d’écriture avant le spectacle animé par Simon Falguières

Mercredi ce fut Feugerolles Billy, aujourd’hui c’est Louvigny, et demain, dernière marche et dernière représentation et restitution par Falguières de l’ensemble des ateliers d’écriture au Théâtre d’Hérouville Saint Clair, l’un des salles de la Comédie de Caen, partenaire de cette semaine de théâtre passée par six villages de la région.

Après les villages normands, le spectacle tournera du 3 au 8 juin dans des villages autour de Montpellier dans le cadre du Printemps des comédiens : Mardi 3 Juin | 19h00 Villeneuve-lès-Maguelone; Mercredi 4 Juin | 19h00 Clapiers ; Jeudi 5 Juin | 19h00 Lavérune ; Vendredi 6 Juin | 19h00 Grabels ; Samedi 7 Juin | 11h00 et 18h00 Domaine d'O ; Dimanche 8 Juin | 11h00 et 18h00 Domaine d'O.

Puis du 25 au 28 juin au Molière Fest de la Villette (Paris)  ; le 17 juillet au Festival des Échappées Belles-Alençon et, plus tard, les 19 et 20 déc, Franciscaines à Deauville