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Billet de blog 18 septembre 2025

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Effrois, émois et haines de Rita

Debout, seule devant un micro sur pied, l’actrice Bwanga Pilipili dit avec force l'intense Portrait de Rita. La grande salle de Théâtre ouvert est comble, le public debout. Spectacle donné dans le cadre du Festival d’automne.

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Illustration 1
Scène de "Portrait de Rita" © Christophe Raynaud de Lage

« Rita elle a envie de hurler et de tomber parce que y’a un flic qui a le genou posé sur Mathis et qui l’étouffe et Mathis il bouge pas et elle voit pas sa tête parce que le flic le cache. » La scène se passe à la rentrée scolaire 2023 en Belgique. La directrice a téléphoné à la mère, son fils a fait « des bêtises » (une altercation avec un autre enfant sur fond de racisme). « Rita elle dit Je me souviens de moi quand j’étais jeune, j’étais fière , j’avais peur de rien. Tu te regardes maintenant et tu te dis hey… je suis plus très fière et j’ai peur de tout… Qu’est-ce qui s’est passé Rita, qu’est ce que t’as fait ? »

Alors Laurène Marx (lire ici) remet un peu d’ordre dans le cours chaotique de cette vie. Aussi chahutée que balafrée. L’enfance, plutôt heureuse, au Cameroun avec un père portant fièrement l’uniforme, le viol collectif dont elle est victime un soir de beuveries entre hommes. Et puis il y a l’homme blanc Christian rencontré sur les réseaux. Il finira par venir et la convaincre de le suivre en Belgique. La femme affairée qu’elle était au Cameroun est déstabilisée (elle deviendra femme de ménage) et instrumentalisée par celui qui l’appelle « Nounou » et qui la pénètre six fois par jour. Il y a la mère de Christian qui lui lance « Après les Allemands... ce que je hais le plus, c’est les nègres ». Et sa petite fille de surenchérir : « ça pue le singe ici ». Ou encore : « Rita elle dit, les copains au boulot ils se foutent de sa gueule à Christian quand il montre des photos de moi ».

Rita a un enfant de Christian, c’est Mathis. Elle voudrait retourner au Cameroun avec son fils mais c'est impossible sans l’accord du père et ce dernier ne veut pas vivre là-bas.

Rita regarde la directrice de l’école. « Rita elle voit la toute petite moue dégoûtée, elle la voit et elle la reconnaît parce qu’elle l'a déjà vu ce pincement de lèvres imperceptible, c’est un sourire de poussière. C’est le mépris ».

Debout, seule devant un micro sur pied, l’actrice Bwanga Pilipili dit avec force l'intense Portrait de Rita. La grande salle de Théâtre ouvert est comble, le public debout.

Spectacle donné dans le cadre du Festival d’automne, le spectacle est à l’affiche de Théâtre ouvert jusqu’au 20 sept, lun, mar, mer à 19h30, jeu et ven 20h30, sam 20h. Puis tournée en 26 : 8 et 9 janv aux Quinconces du Mans, du 20 au 30 janv au Théâtre National de Strasbourg, le 18 fév à l’université de Lille, du 3 au 21 mars au Théâtre national de Bruxelles.

Autre texte de Laurène Marx Jag et Johnny est à la fiche de Théâtre ouvert Les sam 13, 20 et 27 sept à 18h.

Le texte de Portrait de Rita est publié aux Editions Blast (Toulouse).

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