
Le dernier rapport de l'observatoire du Défenseur des Droits [DdD] oublié ce jour mentionne que 22 % des réclamations reçues en 2019 concerne les discriminations liées au handicap (page 36), ce qui avec l'état de santé (10%) en fait le premier critère de discrimination. 20% de ces cas concerne l’Éducation Nationale proclamée inclusive. Mais les collectivités territoriales assurent leur place au palmarès pour l'ensemble des discriminations avec 12% des cas (p.43).
Dans une décision assez récente (4 décembre 2019), il prend position sur un refus d'une commune d’accueillir un enfant en périscolaire (cantine et temps d'activités périscolaires) sans que l’Éducation Nationale fasse ce qui est à sa charge, ce qui à l'avantage d'associer deux acteurs actifs dans la discrimination :


- Rappelle à la mairie de A sa responsabilité en matière d’accueil des enfants handicapés sur l’ensemble des temps péri et extrascolaires.
- Recommande à titre général aux mairies, lorsqu’elles ne disposent pas des ressources humaines nécessaires, d’envisager de solliciter la mise à disposition d’un personnel accompagnant formé au handicap auprès des services de l’éducation nationale lorsqu’une décision dela CDAPH en confirme le besoin pour l’enfant ;
- Recommande à l’association des maires de France (AMF) de rappeler aux communes leur responsabilité en matière d’accueil des enfants handicapés sur les temps péri et extrascolaires qu’elles organisent;
- En l’état actuel du droit, recommande aux services de l’Éducation nationale de B d’évaluer au cas par cas les demandes relatives à l’accompagnement d’un enfant en situation de handicap sur le temps méridien, lorsqu’une décision de la commission des droits, de l’autonomie des personnes handicapées le préconise, et de prendre toutes les mesures utiles dès lors qu’il existe un risque de rupture dans l’accompagnement de l’enfant sur ce temps ;
- Recommande à l’État de mettre en œuvre toute mesure de nature à clarifier le cadre légal de l’accueil des enfants en situation de handicap pendant les différents temps d’activités périscolaires afin d’harmoniser les pratiques et mettre fin aux nombreuses disparités territoriales.
- Recommande à la maire de A :
- De mettre en place une procédure de sanction respectueuse des droits de l’enfant, garantissant une motivation des décisions et l’information des familles. Cette procédure devra prendre en compte les spécificités de chaque enfant, et notamment, le cas échéant, sa situation de handicap.
- De mettre en place, pour chaque candidature aux activités péri et extrascolaires d’enfant présentant un handicap, une procédure d’évaluation des besoins et, le cas échéant, des mesures appropriées à mettre en place pour y répondre ;
- De modifier les règlements intérieurs et le projet pédagogique de l’accueil de loisirs sans hébergement 3-12 ans, afin de faire apparaître explicitement la possibilité, pour les enfants en situation de handicap, de bénéficier d’un aménagement des conditions d’accueil et des activités.
Le Défenseur des Droits demandait aux différents destinataires de sa délibération de rendre compte dans les 3 mois de ses recommandations. Le Ministre de l’Éducation Nationale a-t-il enfin clarifié "le cadre légal de l'accueil des enfants en situation de handicap pendant les différents temps d'activités péri-scolaires" ?
Une personne à l'esprit mal tourné - ce qu'à Dieu ne plaise, n'existe pas dans le lectorat de Mediapart - dirait qu'il s'y emploie activement, en faisant appel des décisions de la Cour d'Appel Administrative de Nantes concernant des élèves du Finistère et d'Ille-et-Vilaine et de celle de Bordeaux (citées dans la décision du DdD).
Le DdD fonde sa décision concernant la cantine sur le caractère particulier de la pause méridienne, dont l’organisation dans les écoles primaires dépend de la commune, mais qui est un droit pour tous les élèves scolarisés dans celles-ci, suivant l’article L.131-13 du code de l'éducation.
Il s'appuie aussi sur l'article 2 de la Convention Internationale pour les Droits des Personnes handicapées, qui considère comme discrimination tout refus d'aménagement raisonnable : « On entend par « aménagement raisonnable » les modifications et ajustements nécessaires et appropriés n’imposant pas de charge disproportionnée ou indue apportés, en fonction des besoins dans une situation donnée, pour assurer aux personnes handicapées la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales».
L'enfant avait été exclu à durée indéterminée de la cantine à cause de ses troubles du comportement. La mairie avait réitéré ce refus alors que le handicap de l'enfant avait été diagnostiqué (TDAH / Trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité) et que la CDAPH avait accordé des heures d'AVS individuelle pour le temps scolaire et périscolaire. Elle estimait n'avoir pas les moyens d'assurer l'accompagnement de l'enfant, sans prendre même la peine de demander à l'inspection d'académie de mettre à disposition l'AVS.
Je noterai la particulière malice des services de l’Éducation Nationale de ce département (Ille-et-Vilaine), qui ont déjà été condamnés pour un élève de Bruz (35) à prendre en charge l'AVS pour la cantine et les activités extra-scolaires, dans un jugement du Tribunal Administratif de Rennes, suivi par la Cour Administrative d'Appel de Nantes.
Dans le même rectorat (Rennes), il est courant pourtant que l'AVS individuelle pour la cantine soit pris en charge par l’Éducation Nationale, suite à la succession de jugements depuis 2011 concernant la commune de Plabennec (Finistère).
Périscolaire : c'est à l'Etat de prendre en charge l'AVS
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