- 22/10/2018 11:23
- PAR BERNARD MOLEUR
Bonjour Monsieur Cassia.
Certes il serait bon de passer systématiquement par des magistrats du siège pour esquisser un fonctionnement "impartial" de la justice dans ce type d'investigation. Mais il convient toutefois de ne pas être totalement naïf au regard de ce que constitue la "Justice" entendue comme une administration. Comme telle et comme toute administration celle ci cultive particulièrement dans son fonctionnement le conformisme. Vous connaissez nécessairement le manuel de Legendre sur l'histoire de l'administration. Pour revenir à la justice et pour prendre un exemple parlant, vous savez bien qu'il ne s'est trouvé qu'un seul magistrat pour ne pas avoir prêter le serment au maréchal Pétain. Tous ceux qui jugérent Pétain (je parle des magistrats) à commencer par le président Mongibault lui avaient prêté serment! Les magistrats d'aujourd'hui sont ils meilleurs de ce point de vue? On peut se le demander car chacun aujourd'hui comme hier entend plus ou moins faire carriére, et pour faire carrière ou même rester plus ou moins tranquille dans son coin, mieux vaut ne pas faire de vague... Un juge d'instruction est certes indépendant et inamovible...mais hormis le fait de passer presque à l'ancienneté au premier grade (doù un salaire plus confortable) il peut trouver sur sa route quelques obstacles pour un rapprochement de conjoint, pour un changement d'affectation et de responsabilité... Je crois me souvenir que Monsieur Van Ruynbeck n'a pas eu beaucoup de satisfaction en demandant un poste de président ou de vice président.... Bref, tout comme dans votre propre corporation les esprits"forts" c'est à dire simplement "incontrôlables par nature" ne font pas de merveilleuses carrières. Ce qui vaut pour les juges d'instruction vaut encore plus pour les JLD qui sont nommés à cette fonction par leur chef de juridiction, qui peut donc les renvoyer à des tâches moins sensibles si jamais il était mis des bâtons dans les roues de nos "chers confrères" du Parquet. Je ne parle même pas des appréciations portées par le chef de juridiction pour l'avancement, sachant que le même chef de juridiction fait lui même carrière.. En ce qui concerne les membres du Parquet est il utile d'enfoncer le clou? Faut il rappeler la carrière assez laborieuse de Monsieur de Montgolfier qui s'était fait connaître comme un esprit assez indépendant? Peut-on souligner les paris sur lesquels se font les carrières prestigieuses comme celle de Monsieur Mollins qui passe aujourd'hui pour un modèle vertu (poursuite anti terroriste aidant sur fond de médiatisation) pour avoir informé sur Monsieur Cahuzac alors qu'il était sur un siège éjectable...ce qui devait au contraire garantir son maintien en poste par le pouvoir socialiste pris au piège! Monsieur Cimamonti s'y est essayé à Lyon en informant sur les collusions entre les instances locales lyonnaises et LREM. Mal lui en a pris car le poste de Paris lui est passé sous le nez. La configuration n'était pas la même car il ne s'agissait pas de conserver son poste mais d'en obtenir un autre plus prestigieux encore qui souvent ouvre la voie à la consécration suprême, et là ne fallait pas seulement tordre le bras de l'autorité présidentielle, il fallait obtenir son agrément. Il y a gagné une compensation à Versailles, ce qui n'est pas rien et était peut être un but intermédiaire en attendant peut être que son auréole de victime de sa probité lui serve un peu plus tard... Le destin du procureur Truche autorise tous les espoirs.
Bien entendu je ne vous apprends rien, mais tout ceci servira peut être des lecteurs qui pourraient se faire de la justice une représentation un peu trop idyllique, les juristes (mes anciens confrères) n'étant souvent pas les derniers dans l'auto exaltation.
Ceci dit je n'ai pas de solution au problème sinon par l'éducation que je me suis efforcé d'inculquer à ceux de mes étudiants qui sont aujourd'hui magistrats (peut être pour leur malheur professionnel), car je ne suis ni nihiliste ni populiste...
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- 22/10/2018 11:53
- PAR TROPMAL EN RÉPONSE AU COMMENTAIRE DE BERNARD MOLEUR LE 22/10/2018 11:23
Merci pour cet "article" à la fois rassurant car "vous savez de quoi, de qui vous parlez et ...terriblement inquiétant...Pour des raisons diverses je "savais" les aléas des "carriéristes...et,de m'en souvenir... d'une certaine façon... me désole et je plains beaucoup les "non carriéristes" profondément honnêtes, consciencieux, qui ne lâchent rien ou tentent de ne "rein lâcher" mais les deux cas de figures ne m'apportent que désespoir...Et...l'arrivée d'un Macron pas politique, pas économiste mais "ivre de lui même" (Philippe Besson son ami)(?) est particulièrement inquiétante... et en face : "rien" ...ou "pareil" à peu de choses prêt....
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22/10/2018 12:47
- PAR PAUL CASSIA EN RÉPONSE AU COMMENTAIRE DE TROPMAL LE 22/10/2018 11:53
Je joins mes remerciements à ceux de Tropmal pour cet éclairage concret sur ce qui, en définitive, n'est qu'une manifestation des faiblesses humaines appliquée à une profession, et dont on trouve partout des déclinaisons.