A LA DEMANDE DU DRAMATURGE :
DISCOURS ECRIT PAR L'ACADEMICIEN
SUR L'HISTOIRE, LA VERITE ET LE THEATRE.
TEXTE PREVU POUR ETRE LU AU PUBLIC
PAR LE METTEUR EN SCENE AVANT LE LEVER DE RIDEAU
(Théâtre de l'Odéon, Paris 6e, 10 mai 1940)
Reproduction in extenso du discours rédigé par l'académicien Edmond Faral - universitaire et médiéviste, alors membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres à l'Institut de France - à la demande de Denys Amiel, auteur de la pièce 1939.
Texte reproduit par Denys Amiel dans sa préface de 1939 publiée en 1951 par les éditions Albin Michel.
Ce discours était destiné à être lu par Paul Abram, metteur en scène créateur de cette pièce le 10 mai 1940 au Théâtre National de l'Odéon, dont il est alors le directeur depuis dix ans.
Il n'est finalement pas lu à l' occasion de cette forte soirée théâtrale, car l'homme de théâtre improvise alors son propre discours, ce dont il est coutumier tout au long de sa carrière. Une prise de parole qui n'a bien évidemment pas été écrite à l'avance, ni enregistrée lorsqu'elle fut prononcée. Mais le discours qui avait alors été rédigé par Edmond Faral nous est parvenu dès 1951 grâce au dramaturge Denys Amiel.
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EDMOND FARAL
"L'auteur de la pièce que nous allons avoir l'honneur de représenter devant vous, n'a pas pensé qu'elle pût prêter à aucune manifestation dans la salle. S'il s'était trompé ou si quelques uns d'entre vous étaient tentés, au cours du spectacle, d'exprimer leur approbation ou leur improbation à l'égard de tel personnage ou de telle idée, il en éprouverait un vif désappointement, parce qu'il lui semblerait que ses intentions auraient été méconnues et qu'on aurait prêté à son œuvre des tendances qu'elle na point. Il n'a pas voulu exciter les passions.
Il est persuadé, au fond de sa conscience, qu'aucun des procédés d'exposition dont il a usé ne saurait être considéré comme une faute contre le respect dû à l'Histoire et à la Vérité, ni comme une incursion dans le domaine de la politique. Son chagrin serait que des réactions bruyantes, qui ne seraient pas justifiées par son dessein, pussent impliquer interdiction au Théâtre de toucher, même avec le plus complet désintéressement et la plus haute sérénité, à des sujets que toutes les autres formes d'art ont le droit d'aborder de front."