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Billet de blog 10 avril 2020

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"S'entraider par le récit pour agir dans un monde en transition"

Cette perspective du récit déclinée en trois temps me paraît nouvelle, j’ai envie de l’explorer : Le temps du vécu, où le récit est à peine ébauché ; Le temps du récit, où nous donnons forme et sens à notre expérience vive ; Le temps de l’écoutant, un récit ne devient, en effet, moteur de changement que s’il est adressé, non devant quelqu’un mais à quelqu’un qui l’écoute avec bienveillance.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

« J’ai peur. Oui, j’ai peur… »

C’est ainsi que commence le dernier livre de Cécile de Ryckel, livre sorti en 2019 aux éditions Couleur livres asbl en Belgique.

Mais ce livre, contrairement à ce que l’on pourrait penser invite à sortir de nos peurs pour agir. Mais pas n’importe comment. A l’heure où certains se demandent « Comment allons-nous bien pouvoir nous en sortir ? », voici un livre qui pourrait bien nous accompagner vers « ce jour d’après ! » qui semble si redouté.

S’entraider par le récit,

Pour agir dans un monde en transition 

Une méthode, une pratique, par l’échange. Nous pouvons lire la 4e de couverture.

Je ne me permettrais pas de conseiller cette pratique si je ne la connaissais pas. Mais il s’avère qu’elle m’a beaucoup aidée lorsque j’ai eu à affronter un conflit avec un représentant de l’autorité. Mon éducation m’avait suffisamment (dé)formée pour me mettre en grande difficulté lorsque ce conflit est arrivé dans ma vie, j’avais pourtant un certain âge déjà.

Toutefois, j’ai eu la chance quelques années auparavant de commencer une formation en dynamique de groupe et j’ai pu expérimenter « à vif », si je puis dire, la force que cette pratique m’a donnée pour faire face.

D’autres ouvertures ont permis la résolution de ce conflit et ma libération de l’oppression que je ressentais :

  • Un travail de recherche en Sciences de l’éducation sur nos relations à l’Autorité ou, plutôt, à l’autoritarisme,
  • Un travail réalisé en immersion dans le Mouvement des Réseaux d’échanges réciproques de savoirs.

Mais j’ai conscience que ces deux « voyages » n’auraient pas pu arriver à leur terme, ni même probablement commencer, si je n’avais pas d’abord apprivoisé mes émotions et mes sentiments, et c’est à-travers « le récit » de mes déboires que j’ai pu traverser ce désert qui s’ouvrait devant moi.

A l’époque, mes « voyages » se faisaient sous l’égide d’une formation créée par Daniel Le Bon et portait le nom d’Eleuthéropédie

Cécile de Ryckel donne à cette pratique une dimension amplifiée car elle l’a enrichie d’une manière que, pour l’instant, je ne fais que présupposer à ce stade, je n’ai pas encore lu le livre dans sa totalité, mais ce que j’ai entraperçu me laisse penser que son apport personnel enrichit encore ce que je croyais connaître.

Si ce travail se fait sur soi, dans sa relation à l’autre et dans sa relation au monde, tels qu’elle les énonce ici :

  • Harmonisation de la personnalité
  • Le récit dans une perspective interpersonnelle
  • Le récit dans une perspective de transformation collective

C’est une perspective du récit déclinée en trois temps qui me paraît nouvelle et que j’ai envie d’explorer :

  • Le temps du vécu, où le récit est à peine ébauché,
  • Le temps du récit, où nous donnons forme et sens à notre expérience vive,
  • Le temps de l’écoutant : un récit ne devient, en effet, moteur de changement que s’il est adressé, non devant quelqu’un mais à quelqu’un qui l’écoute avec bienveillance.

En effet, les deuxième et troisième parties du livre permettent de découvrir comment « le récit » va mettre en lumière nos besoins fondamentaux tels que je les ai travaillés dans ma propre recherche. Besoins fondamentaux qu’il m’a fallu reconnaître avant d’affronter toutes les peurs qui se sont réveillées face au conflit violent que j’ai vécu. C’est dans ces documents que j’ai réussi à les nommer, les regrouper, et les travailler pour éclairer le chemin parcouru :

Comme j’ai pu écrire un billet « Ne pas craindre le conflit, il est porteur de Vie », je pourrais dire de même, « Ne pas craindre ‘le récit‘, il est porteur de Vie ». Si le conflit se vit face à face, le récit est en différé, un retour à soi qui de l’expérience vécue nous amène à l’acquisition de savoirs nouveaux dans une démarche réflexive.

Pour aller plus loin par rapport au contenu du livre, j’aimerais ajouter ce point particulièrement important : l’impact que peut avoir le récit pratiqué dans la réciprocité sur les narrateurs et les auditeurs dans le groupe, tout en tenant compte que le formateur participe aussi aux activités en situation de réciprocité ?! Position qui ne permet pas, en règle générale, de favoriser l’égalité de tous dans le groupe ; c’est d’ailleurs un peu le même problème qui se pose dans un groupe où le « niveau » que s’accordent les participants est bien souvent en lien avec l’estime qu’ils se portent !

Là où l’on découvre des chemins vers l’altérité (celle de l’autre et la mienne), et comment on les parcourt afin de pouvoir dire :

  • Nos récits nous amènent à vivre des moments de déportation de soi, condition nécessaire à une véritable rencontre avec autrui dans le face à face d’un dialogue où un Je s’adresse à un Tu.
  • Alors que j’ai la mission d’accompagner le groupe en tant que formateur, à quoi va-t-il me falloir être vigilant(e) pour, d’une part m’autoriser à rencontrer les participants, en situation de réciprocité dans les exercices proposés ; et d’autre part comment vais-je pouvoir favoriser la maturité du groupe pour me rencontrer en tant que formateur, dans mes fragilités et mes limites sans se sentir déstabilisé, ni l’un ni l’autre ?!

C’est à cette découverte de soi et de qualité de présence à soi que le livre nous invite.

Tous les commentaires postés avant une intrusion déplacée !

Une autre lecture de "La Pyramide du Je" sous forme de schéma, peut-être plus facile au premier abord., sur ce document à la page 7.

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Merci Joëlle.

La recherche que j'ai mené avait la particularité d'être une recherche-action, une manière d'étudier ce que nous faisons, comment nous le faisons et de découvrir, petit à petit, pourquoi nous le faisons. Ce que l'on appelle en général "le fond".

"La forme" avait pour caractéristique l'utilisation des outils des réseaux d'échanges réciproques de savoirs, entre autre l'atelier d'écriture.

Pour nous aider à avancer dans nos travaux, à des moments ou sur des sujets particuliers, nous avons fait des ateliers d'écriture en lien avec nos recherches. Par ailleurs nos rencontres nous donnaient aussi la possibilité de faire le récit de l'état de nos travaux, des difficultés rencontrés, des réussites parfois.

En voici quelques exemples qui permettent de comprendre que "le temps de l'écoute" a évolué au fur et à mesure que le temps passait dans un groupe où la confiance s'installait entre ses membres soumis aux mêmes difficultés :

"...Notre groupe est bien :

- un Réseau : nous venons de régions différentes, d’univers, de professions, de parcours, et avec des questions différentes. Il y a interactions continuelles entre nous dans les regroupements à Evry et à Tours; plus relâchées lorsque nous sommes chez nous, mais permanentes tout de même

- traversé d’échanges réciproques : cette confiance dont je parle ci-dessus me paraît particulièrement importante. Elle est une dimension que j’entrevois comme essentielle, mais que je viens à peine de découvrir tout en la vivant depuis le début (ma recherche a permis de montrer à quel point elle est fondamentale et fondatrice d’un être nouveau);

- ce qui s’échange, ce sont des savoirs : ...Chacun, avec sa personne, son histoire, ses questions, interpelle les autres, les fait bouger, les conforte et les soutient..."

"...La reconnaissance de ce que j’avais construit a été un élément particulièrement porteur. Une nouvelle difficulté s’annonçait! Il fallait constater ! ... Encore des peurs, des difficultés, du temps, beaucoup de temps de travail. Une immersion totale, le groupe qui écoute, qui porte..."

"...Pendant les regroupements nous avions pour travail, à tour de rôle, d’exposer l’état de nos recherches, puis d’écouter pour renvoyer à celui qui parlait nos questions et nos incompréhensions. Dans les premiers temps de ces exercices, j’avais plutôt l’habitude de projeter sur les “dire” de l’autre mes idées et mon vécu. Petit à petit, au fur et à mesure de l’approfondissement de notre travail, cette projection s’est atténuée. Nous sommes parvenus à nous laisser imprégner, féconder par la recherche de l’autre, et sans plus chercher à l’influencer, nous avons “pénétré” sa richesse et nous en sommes “nourris”. Son vécu, son expérience, sa théorisation enrichissaient les nôtres.

Cette imprégnation consentie (j’accepte d’être fécondée par ce que tu me dis), cette captation volontaire (je veux en savoir un peu plus que ce que tu me dis), nous a permis d’amplifier notre compréhension du monde car chacun explorait un aspect différent de la relation humaine mais finalement combien complémentaire..."

Et je comprends mieux ce que cherche à nous dire l'auteur de ce livre dans cette partie nommée : Le temps de l'écoute ou un voyage vers l'autre.

Très subtile et très beau. 

C 'est cela peut être la paix sur l 'altérité. (jeru principe de l altérité, Salem.. La paix) 

Acceptation des différences  et des complémentarités, sans la frontière tenace de la peur, facteur essentiel de division et d' isolement.

Bien sûr que par la grâce de la verbalisation, tout peut se dire, s 'exprimer, se fluidifier.

La parole comme outil  indispensable du rassemblement... De la Réunion... De l' 'ecclesia en somme.... Bien au delà de la confiscation d' idée que les religieux en ont fait....... c'est heureux de lui donner un sens plus universel.

Magnifique Josiane

Dis ainsi, je comprends mieux la valeur de ce que j'ai pu connaître et qui m'habite encore aujourd'hui, voir l'autre comme un possible enrichissement du "simple" fait que nous sommes différents.

Je vous remercie de le pointer ainsi.

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