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Bandits d’honneur ou la vendetta (1962), d’après une nouvelle d’Henri Omessa, Le Candidat Lauriston. Un film qu’on regarde, le deux janvier, en pensant à une année prospère ? Ou en pensant à Prosper Mérimée. La Vendetta, Matteo Falcone, ça fait sens et le film le signale. Tilt ! Dès les premiers plans, le nom est écrit dans une salle de classe. Mince, un film qu’on regarde aussi en pensant à la rentrée scolaire. Dès le générique, le film ne la joue pas Star Wars et ses menus qui défilent, mais, avec une voix off, dictée d’école avec sa ponctuation, ses virgules et ses deux points.
Dans ce film, on cultive la poésie dans un échange entre le cinéma des années 60, la fantaisie anarcho-pataphysique Mockyesque (et sa chevauchée d’ânes de western corse), une corse intemporelle et 2023 qui ramène sa fraise.
1962 et les swinging Funesties. On ne naît pas Louis de Funès. On le devient. Tant de films ont construit le personnage que ce serait bien mal aimer l’acteur que de se désintéresser de tous ces films comme autant de petits cailloux blancs menant, au-delà des frontières de la France de Molière, à Louis Le Funny. Le film sort en 1962 . Le corniaud et son youkounkoun datent de 1965. Le petit cinéphile rêveur égrène des films dans sa course à la projection.
Dans Vendetta, l’acteur retrouve ce côté bandit, explorateur d’un pouvoir dans les marges, déjà vu chez Yves Robert et son Ni Vu Ni Connu (1958) (sans Mérimée, lui, mais adapté de Marcel Aymé).
De Funès est encore un personnage des marges, il n’est pas encore le personnage puissant que la France adore voir vaciller, piquer des colères ou faire l'obséquieux.
En 1962, il a déjà ses « Paaaaaf ! ». Dès la 14ème minute. Une marque de fabrique qu’il utilise à l‘écran et au théâtre où il joue, en même temps, Oscar. En soirée, une métamorphose pour l'acteur : la version Oscar du carrosse de Cendrillon ?
Ce film met à l’affiche de Funès et Francis Blanche (et Rosy Varte, Jean Lefebvre).
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Francis Blanche. Avec son costume de marin et son perroquet, Jean Bart (Cap'tain Flint était déjà pris). Ô combien de marins, combien de capitaines ! (toutes les citations littéraires, on les imagine soufflées en impro dans les scènes par le clown Blanche). Blanche en capitaine Haddockien. « Cet enfant de sardine ! »
Ô combien de marins… Combien de maire ? Aucun. Le Maire est mort. Vive le maire ? C’est plus compliqué. C’est là que le maquis corse se fait campagne. C'est l'intrigue principale du film. Café Napoléon vs Café Bonaparte. Gars venu de loin vs gars du cru. Les élections, piège à comédies.
Pour finir, quelques belles répliques piochées dans le film :
- Vous n’avez jamais lu Prosper Mérimée ?
- Lâchez mon âne ou je vous tue.
- Brigitte Bardot, qui est-ce ?
- Une artiste.
- Aujourd’hui, tu as mis une jolie rose à ta boutonnière.
- Ah, c’est pas une rose, c’est un chrysanthème.
- Un chrysanthème ? Comment tu écris ça ?
- Eh bien, chrysanthème, ça s’écrit…euh…euh, tu as raison, c’est une rose.
- Nous ne faisons rien de mal. Pas vrai, Michel.
- Hélas, non.
- Bonapartiste de droite ou de gauche ?
- Bonapartiste de collection.
- (Rosy Varte, femme du collectionneur, parlant à la place de Napoléon) On m’a pris mon trône, on m’a pris la France, on m’a pris L’Aiglon. On ne me prendra pas mon chapeau.
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- Et la dernière (prononcée par Blanche, dans la lignée des dernières répliques cinématographiques prononcées sur mer, cf Certains l'aiment chaud, 1959) :
- Vous en faites pas, je sais nager.
- Capitaine, où avez-vous appris à nager ?
- Dans la politique ! …
Au visionnage de ce film et/ou à la lecture de cette dernière réplique, on ne s’étonnera pas que le réalisateur de ce film tienne un blog politique sur Mediapart.
Sur le site de l'INA, le premier janvier (bonne année !) 1961, la seule interview de de Funès avec un filtre à thé (le micro est tellement étrange).
https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/i09219977/louis-de-funes-a-propos-de-la-vendetta