Dimanche 22 janvier 2023 au Théâtre des Champs Élysées, au-delà même de la perfection technique, c’est à une célébration rare de la fluidité que se sont livrés Emmanuel Pahud, Trevor Pinnock et Jonathan Manson dans les Sonates pour flûte de Bach, reprenant le programme de leur enregistrement de référence de 2008 pour EMI.

On savait la ligne claire et la lecture lumineuse de ces pages qu’avaient proposée les trois musiciens dans leur enregistrement. Mais les réentendre quatorze ans plus tard dans l’extrême spontanéité de leurs jeux complémentaires et dans cette sorte de simplicité d’un concert exceptionnel fut un délice à peine descriptible. Car même en tenant compte de ce respect considérable que partagent tant d’amateurs de baroque pour Trevor Pinnock (je lui avais consacré un billet de mon blog), et même dans l’admiration unanime qui entoure à juste titre Emmanuel Pahud depuis toujours, on ne s’attend jamais tout à fait à tant d’excellence, justement dans une simplicité aussi désarmante - tant de beauté en somme.
L’écriture fuguée souvent étourdissante aussi bien que la généreuse virtuosité de ces sonates galantes qui parfois rapprochent Bach le père du fils CPE (deux sonates du cycle sont attribuées au fils) avaient ici leur écrin d’un éclat discret et non tapageur. On se rappelle ce faisant qu’Emmanuel Pahud n’est pas seulement ce brillantissime soliste, sans doute le plus grand flûtiste français depuis Jean-Pierre Rampal, il est aussi un chambriste d’exception. On ne s’étonnera pas de retrouver Trevor Pinnock dans son rôle favori d’impeccable basse continue, qu’il a exercé dans tant d’enregistrements de son English Concert. Jonathan Manson, au milieu de ce programme, a conquis le public avec une discrète et profonde première Suite pour violoncelle.
Merveille pour l’esprit et pour le cœur, comme dans les meilleures interprétations de Bach.
