Janvier 2022, me voilà à signer un CEE avec une grande entreprise. Derrière cet acronyme se cache un “contrat d’engagement éducatif”, un acte qui ressemble à un contrat de travail mais qui n’en est pas tout à fait un. Conçu pour répondre aux besoins du secteur associatif des accueils collectifs de mineurs (colonies de vacances, centres aérés, etc.), celui-ci permet de recruter des animateurs tout en dérogeant à bien des égards au Code du Travail. À tel point qu'il est désormais la norme pour tous les acteurs du secteur : des mairies aux grandes entreprises comme celle que je viens d’intégrer.
Celle-ci, spécialisée dans les séjours linguistiques et les voyages scolaires en langues étrangères avec un chiffre d'affaires de 85 millions d’euros est un “leader” de ce secteur. Pour ma part, je suis recruté en tant qu’animateur dans une des 9 marques du groupe spécialisée dans de petits séjours de 5 jours en immersion en langue anglaise au sein de centres situés en France.
Après beaucoup d’incertitudes quant à ma première affectation, j’apprends une semaine avant le début de mon contrat, en Mars 2022, que j’irai dans les Alpes. Pour moi qui habite Bordeaux c’est un coup dur puisque le voyage se fait à mes frais … autant le dire dès maintenant, le CEE va se révéler être une mauvaise option financière.
De prime abord, un CEE c’est 48 heures de travail hebdomadaire pour une rémunération journalière brute de … 23,45€. Oh mon employeur n’est pas le plus mauvais de ce point de vue, je suis à 900€ brut par mois pour, en théorie, 3,5h de travail par jour, logé et nourri. Il y a bien pire et rarement meilleur.
Toutefois, ces “bonnes” conditions de travail viennent avec un léger “twist”. D’abord, le séjour dans lequel je suis affecté interdit l’usage de la langue française sauf pour raison de sécurité, cela ne me pose aucun problème, j’étais tout à fait au courant et mon anglais est plutôt bon mais j’y suis nommé “ESL Counselor”, comprenez : professeur d’anglais sans formation aucune.
Ma formation parlons-en : je n’ai qu’un simple Brevet d’Aptitude aux Fonctions d’Animateurs … et encore : je ne l’ai pas terminé ; une infime partie des 80 jours de mon affectation, 6 jours, seront d’ailleurs dédiés à mon stage BAFA. Je n’ai en fait fait que 7 jours de formation desquelles étaient principalement constituées d’apprentissage de chants dédiés à des enfants de 6 ans et la création de plannings. Autant dire aucun aspect éducatif d’aucune sorte et rien d’applicable à ce qui va m’arriver ici.
Par chance, mon passé recouvre quelques avantages. Ayant eu une petite carrière dans l’aéronautique, puis en tant que conducteur de car scolaire sur une ligne de montagne très longue, j’ai à la fois une rigueur intellectuelle qui va me sauver à maintes reprises et une expérience avec les enfants dans un cadre, certes limité, mais qui va me permettre de gérer la frustration, tant la mienne que celle des enfants.
D’ailleurs mon premier réflexe est d’aller consulter les manuels d'instruction aéronautique, je ne suis pas certain de la pertinence de toutes les notions et méthodes mais je suis au moins certain de les comprendre. J’essaie aussi de consulter quelques documents universitaires des Sciences de l'Éducation, mais ils sont peu nombreux et mon vocabulaire n’est pas suffisant développé pour réussir à les décrypter proprement. Il ne me reste plus qu’à croiser les doigts et espérer que je ne sois pas affecté sans filet de sécurité.
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